Couverture du livre La Chanson Du Souvenir

La Chanson Du Souvenir

Dans la charmante ville côtière de leurs enfances, Ilyan et Amina ont tissé une amitié unique, pleine de rires et de complicité. Mais le temps les a séparés, et Amina a dû partir loin, laissant Ilyan avec leurs souvenirs.

Quand Amina revient, des années après, c’est comme si un vieux livre préféré s’ouvrait à nouveau pour Ilyan. Il est déterminé à la retrouver, se demandant si l’amitié peut survivre au temps et à la distance.

Cette chronique est une invitation à découvrir une histoire touchante de retrouvailles, où l’amitié et l’amour tentent de triompher du passé. C’est une promesse de sourires, de larmes et de la joie de se retrouver.

Auteur

Papywoss

Éditeur

Poésie.io

Nombre de pages

316 Pages

Date de parution

2018

Langue

Français 

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Chapitre 1

« La vie c'est des étapes : la plus douce c'est l'amour ; la plus dure c'est la séparation ; la plus pénible c'est les adieux ; la plus belle c'est les retrouvailles. »

POINT DE VUE DE ILYAN.

Dimanche soir, 20h15.
Je franchis le seuil de ma demeure, accueilli par la douce quiétude d’une soirée déjà avancée. Ayant pris le temps de me délasser dans un bain réconfortant, je me décidai à revisiter mon exposé. Mon sujet d’étude portait sur cette entité sacrée qu’est l’amitié. Une notion tant décriée par les foules ignorantes, aveugles à sa présence dans ce monde empreint de mortalité. Mais, à vrai dire, je contemple l’amitié tel un fruit miraculeux, jailli des plus majestueux arbres de l’univers.

Après avoir couché sur papier et corrigé maintes pages de mon exposé, je le replaçai soigneusement dans mon sac, afin de ne point l’oublier. L’horloge délicatement gravait les sillons du temps, frôlant déjà les vingt-et-une heures. Dès lors, je résolus d’abandonner les dédales de la veille pour embrasser le repos nocturne qui m’attendait.

Lundi, 06h.
Le lendemain matin, l’aube se levait à l’horizon, les rayons du soleil perçant à travers les rideaux de ma chambre. Mon réveil s’accompagna d’un soubresaut, comme si j’avais déjà manqué le train en direction de l’école. Pourtant, tel ne fut pas le cas. Ainsi, après m’être immergé dans un bain réconfortant, je me dirigeai d’un pas assuré vers la salle à manger, en quête du repas matinal. À ma grande surprise, ma sœur aînée avait déjà pris les devants, préparant le festin qui s’offrait à moi.
– Une nuit paisible ? demanda-t-elle d’une voix empreinte de tendresse.
– Oui, et toi ? répondis-je, désireux de connaître les méandres de son sommeil.
– De même.
– Maman est-elle absente ? questionnai-je, curieux.
– Elle s’est rendue en ville. Ton argent de poche est posé sur la table de sa chambre.
– D’accord.
Les paroles échangées laissèrent un léger silence flotter dans l’air. Ma sœur et moi étions seuls dans la salle à manger. Sophie avait toujours été présente à mes côtés, cette compagne fidèle qui me comprenait bien mieux que quiconque, y compris notre mère. Elle se tenait toujours à mes côtés, féroce protectrice lorsque mes égarements s’emparaient de moi. Récemment diplômée en finance, elle entamait désormais un stage au sein d’une entreprise de renom.

Mon petit déjeuner achevé, le temps pressait. Cependant, la proximité de mon établissement scolaire atténuait mes préoccupations. Je saisis mon sac sans plus attendre, prêt à entamer cette nouvelle journée de découvertes et d’apprentissage.

08h30.
– Monsieur Diop, permettez-moi de vous présenter le fruit de mon labeur, déclarai-je, exhibant avec fierté mon exposé, tandis que je m’avançais vers le tableau. Les regards de nombreux élèves se posèrent sur moi, ce qui suscita une légère nervosité en moi. Toutefois, je rassemblai mon courage et entrepris d’expliquer mon travail avec assurance.

Une fois mon exposé terminé, les élèves se mirent à me poser des questions sur le thème abordé. J’y répondis de manière satisfaisante à chaque fois. Monsieur Diop, mon professeur de français, me remercia chaleureusement, avant d’inviter les élèves à m’applaudir pour l’effort fourni. Reconnaissant, je leur adressai à mon tour mes remerciements, puis regagnai ma place. Ainsi, le professeur commença à rédiger son cours sur la littérature africaine.

10h05.
La récréation était déjà là. Je sortis de la salle de classe en compagnie de mes camarades Bintou, Muhamed, Cherif, Aicha et Libasse. Nous nous rendîmes au café de l’établissement pour prendre une pause tous ensemble.
Levant les yeux, je croisai le regard attentif d’Aicha.
– Ilyan, tu as brillé lors de ton exposé aujourd’hui, déclara-t-elle avec enthousiasme. J’ai vraiment adoré.
– J’avais un peu peur au début. Je ne sais même pas comment j’ai réussi à me maîtriser, répondis-je.
– C’est difficile d’être sous les feux des projecteurs, avec tous les élèves qui te fixent avec leurs grands yeux, ajouta Bintou. Les professeurs doivent avoir du mal à gérer cela.
– Ils ont l’habitude de le faire, fit remarquer Muhamed.
– Oui, c’est certain, acquiesçai-je.
Après quelques minutes de discussion animée avec mes amis, la sonnerie retentit, signalant la fin de la récréation. Nous nous levâmes pour regagner la classe, en nous dirigeant vers notre prochain cours. Muhamed et moi partagions la même table, avec Cherif et Libasse assis derrière nous. Dans l’autre rangée, se trouvaient Bintou et Aicha. C’est alors que le professeur de mathématiques, Monsieur Sané, fit son entrée dans la salle de classe, marquant ainsi le retour du silence absolu parmi les élèves.

12h05.
La journée de cours touchait déjà à sa fin. Je rassemblai les cahiers de texte et d’absence pour les remettre à notre surveillante, Madame Mané. Vérifiant que la salle de classe était bien fermée, je confiai les clés au gardien de l’école. Rejoignant mes amis à l’intérieur de l’enceinte de l’établissement, nous nous lancions dans une discussion animée sur le système éducatif de notre pays. Soudain, une voix féminine m’interpella. Je me tournai et découvris une jeune fille d’à peu près mon âge, d’une élégance discrète. Vêtue d’une chemise blanche et d’un jean bleu ciel, elle arborait un teint clair et des yeux étincelants. Sa taille fine devait atteindre près d’un mètre soixante-dix, tandis que ses cheveux noirs encadraient gracieusement son visage.
Elle s’approcha de moi et m’embrassa sur la joue, sous le regard de tous mes camarades.
– Ilyan, comment vas-tu ? me demanda-t-elle.
– Amina ! m’écriai-je, surpris et heureux de la voir.

 

4 ans auparavant.

Samedi, 16h15.
Je marchais seul, les écouteurs nichés dans mes oreilles, en direction du parc de notre quartier. Après quelques minutes de marche, j’atteignis enfin cet havre de tranquillité. Je choisis un coin paisible où m’installer et sortis mon téléphone de ma poche pour parcourir Instagram. Soudain, je sentis la présence de quelqu’un à mes côtés, mais je ne lui accordai pas tout de suite mon attention.
– Salut, comment tu vas ? demanda une voix féminine.
Je levai les yeux et me retrouvai face à une jeune fille, à peu près de mon âge.
– Ça va super bien, répondis-je.
– Je m’appelle Amina, se présenta-t-elle.
– Moi, c’est Ilyan.
– Ravie de te rencontrer, dit-elle. Cette ville à l’air génial !
– Tu es nouvelle ? demandai-je.
– Oui, j’ai déménagé ici récemment.
– Alors tu vas découvrir à quel point c’est magnifique ici, déclarai-je.
– Pourrais-tu me faire visiter ? J’aimerais découvrir les endroits intéressants de cette ville.
– Bien sûr, je serais ravi d’être ton guide, répondis-je.
– Merci beaucoup. Depuis combien de temps vis-tu ici ? demanda-t-elle.
– Depuis ma naissance. Mon père a participé à la construction de cette ville et nous avons décidé de nous y installer en famille.
– Donc, tu dois connaître le quartier comme ta poche, dit-elle avec un sourire.
Je lui rendis son sourire et me levai du banc.
– Viens, faisons un tour.
Elle se leva à son tour sans dire un mot.

18h00.
Nous avions passé tout l’après-midi à explorer la ville : les centres commerciaux, les parcs d’attractions et d’expositions, les supermarchés, les terrains de football et de basketball, la plage, et bien d’autres endroits encore.
– C’est vraiment incroyable ici, s’exclama-t-elle.
– C’est une ville extraordinaire, acquiesçai-je.
– Viens, je vais te montrer ma maison, proposa-t-elle.
– Avec plaisir !
Nous marchions côte à côte. Elle était calme et silencieuse, comme plongée dans une profonde réflexion. Pourtant, sa beauté ne cessait de m’éblouir. J’avais envie de la connaître davantage, sa famille, ses amis, ses passions. Je voulais tout savoir d’elle. Alors, je décidai de rompre ce silence devenu pesant afin d’entamer une conversation.
– Peux-tu me parler un peu de toi ? lui demandai-je.
– Que veux-tu savoir ? répliqua-t-elle.
– L’essentiel, sur toi.
– Tu connais déjà mon nom. J’ai seize ans et je vis avec ma grand-mère. Mes parents ont divorcé il y a deux ans.
– Je suis vraiment désolé pour toi, dis-je.
– Ce n’est pas de ta faute, répondit-elle.
– Sinon, tu fais tes études ici ? m’enquis-je.
– Oui, en classe de troisième.
– Moi aussi, je suis en troisième.
– Oh, vraiment ? C’est super ! Peut-être pourrions-nous réviser ensemble ?
– Bien sûr, avec plaisir.
– Merci beaucoup… Nous sommes arrivés chez moi. Ma grand-mère sera ravie de te rencontrer.
Nous entrâmes ensemble dans la maison. L’intérieur était spacieux et superbement décoré. Des portraits ornaient les murs blancs et les meubles du salon étaient simplement magnifiques. La maison offrait une vue incroyable sur les rues de la ville.
– C’est vraiment beau chez toi, m’exclamai-je.
– Tu aimes ? demanda-t-elle.
– Oui, j’aime beaucoup.
– Viens, ma grand-mère est dans la cuisine.
En pénétrant dans la cuisine, j’aperçus une vieille dame affairée à préparer des pâtisseries. Une délicieuse odeur emplissait la pièce.
Amina s’appuya contre elle et se tourna vers moi.
– Grand-mère, je te présente Ilyan. Nous nous sommes rencontrés cet après-midi, au parc.
– Jeune garçon, comment vas-tu ? demanda la grand-mère.
– Je vais bien, grand-mère.
– Votre après-midi s’est bien passé ? s’enquit-elle.
– Je pense que oui, je lui ai fait visiter les lieux les plus intéressants de la ville.
– C’est formidable ! J’espère que tu resteras pour dîner.
– Non, je ne pense pas. J’ai promis à ma mère d’être rentré avant le dîner.
– Dommage. Ce sera pour une prochaine fois, alors, conclut-elle.
– Oui, une prochaine fois.
Je quittai la maison en compagnie d’Amina, heureux d’avoir fait sa connaissance et vice versa. Son sourire pouvait tout exprimer. Elle me serra la main et s’apprêta à parler.
– Quand est-ce qu’on se reverra ? me demanda-t-elle.
– Je ne sais pas vraiment.
– Laisse-moi ton numéro, je t’enverrai un message.
Elle me tendit son téléphone que je pris pour y entrer mon numéro.
– Merci, dit-elle.
– Je t’en prie.

20h05, chez moi.
La douce quiétude de ma chambre enveloppait mes pensées tandis que je me délectais des mots couchés sur les pages du livre de Danielle Steel, «Le Fantôme ». Ce récit d’une profondeur émouvante avait su captiver mon esprit avide de découvertes littéraires. Chaque phrase, telle une mélodie envoûtante, résonnait en moi, transportant mon âme dans un univers intime et introspectif.
Soudain, un bruissement se fit entendre, rompant le silence qui régnait dans ma chambre. Ma mère fit son apparition, un sourire bienveillant aux lèvres, tenant un paquet volumineux entre ses mains. Son regard pétillant trahissait l’excitation de partager cette surprise qui émanait du cœur paternel.
– Salut mon fils !, lança-t-elle d’une voix chaleureuse.
Je relevai les yeux de ma lecture, curieux de découvrir ce mystérieux présent qui suscitait tant d’effervescence. Un frisson d’anticipation parcourut mon corps, tandis que ma mère me tendait le paquet avec délicatesse, tel un précieux trésor.
– C’est de la part de ton père, murmura-t-elle, laissant planer une aura de mystère.
Les battements de mon cœur s’accélérèrent alors que mes doigts s’activaient pour dénouer les ficelles qui retenaient le papier d’emballage. L’instant était suspendu, comme figé dans une parenthèse intemporelle. Le souffle court, mes yeux s’ouvrirent en grand, découvrant avec émerveillement ce qui se trouvait à l’intérieur.
Quoi ? Un ordinateur portable ! L’éclat de l’écran immaculé et la finesse de l’appareil captivèrent mon regard, ébloui par tant de technologie et d’élégance.
Un sourire radieux illumina mon visage, mêlant gratitude et émotion. Je ne pouvais contenir ma joie face à un présent aussi magnifique. Mes pensées s’envolèrent vers mon père, son amour se révélant à travers ce geste empreint de générosité.
– Ça te plaît, on dirait ? me demanda ma mère, les yeux pétillants de fierté.
– Oui, bien sûr. Je suis comblé, répondis-je d’une voix chargée d’émotion.
Le silence s’installa un instant, chacun savourant ce moment privilégié.
– Le dîner sera bientôt prêt, rejoins-nous dans la salle à manger, m’invita-t-elle avec tendresse.

 

POINT DE VUE DE AMINA.

21h45, dans ma chambre.
La nuit s’étendait doucement sur la ville, enveloppant ma chambre d’une aura paisible. J’avais raccroché le téléphone, laissant derrière moi les voix joyeuses de mes amies résonner dans mes pensées. Leur présence me manquait cruellement, les souvenirs de nos aventures passées se bousculaient dans ma mémoire. Je me sens de plus en plus enfermée dans cette nouvelle réalité. Mes sorties se faisaient rares, et les murs de ma chambre devenaient mes compagnons silencieux. Les mots s’échappaient de ma plume pour se réfugier dans mon journal intime, comme une échappatoire à cette solitude grandissante. Grand-mère, préoccupée par mon isolement, me prodiguait sans relâche des conseils pour découvrir la ville. Mais chaque fois, une excuse trouvait refuge sur mes lèvres, m’empêchant de franchir le seuil de ma chambre.

Parmi les visages inconnus, il y avait Ilyan. Sa gentillesse et son regard bienveillant m’avaient touchée en plein cœur. Bien que nous ne nous connaissions que peu, sa compagnie avait illuminé mon après-midi. Il avait pris le temps de me faire découvrir la ville, de me guider avec une patience rare. Une idée germa alors dans mon esprit : lui envoyer un message pour le remercier.
– Salut Ilyan, comment se passe ta soirée ? écrivis-je avec un léger sourire.
La réponse tarda à arriver, mais finit par se matérialiser sur l’écran de mon téléphone.
– Salut ! À qui ai-je l’honneur ? répondit-il.
J’avais oublié qu’il n’avait pas encore mon numéro et que je ne me suis pas présentée.
– C’est Amina, la fille de cet après-midi, écrivis-je rapidement pour me présenter.
– Ah, je vois. J’ai oublié d’enregistrer ton numéro, répondit-il.
– Ce n’est pas grave. Alors, qu’est-ce que tu deviens ? questionnai-je, cherchant à prolonger la conversation.
– Rien de bien intéressant pour le moment. Et toi ? rétorqua-t-il.
– Je suis dans ma chambre, m’ennuyant profondément. Je tenais surtout à te remercier pour cet après-midi. C’était vraiment gentil de ta part, lui écrivis-je avec une pointe de sincérité.
– Tu n’as pas à me remercier. J’ai simplement fait ce qu’il fallait. Après tout, c’est à moi de te souhaiter la bienvenue, répliqua-t-il humblement.
– C’est vraiment gentil.
– Cela ne te dirait pas que je t’invite chez moi ? proposa-t-il.
– Avec plaisir, répondis-je enthousiasme.
– Je t’enverrai l’adresse, comme ça tu pourras venir demain si une fois tu es libre, dit-il chaleureusement.
– C’est parfait pour moi, répondis-je.
– On se dit donc à demain ? demanda-t-il.
– À demain. Salut

 

POINT DE VUE OMNISCIENT.

Le lendemain, 12h00.
Amina se préparait avec soin, impatiente de rejoindre Ilyan chez lui. Elle parcourait les vêtements de son armoire, essayant de trouver la tenue parfaite pour cette occasion. Heureusement, sa grand-mère était là pour l’aider dans cette quête vestimentaire.
– Je pense que celle-là fera l’affaire, déclara sa grand-mère en sortant une ravissante robe.
– Cette robe ? Tu penses vraiment que ça me va ? s’étonna Amina.
– Oui, je le pense sincèrement, à moins que ce ne soit qu’une simple rencontre amicale, répliqua sa grand-mère malicieusement.
– Grand-mère, arrête. Ce n’est vraiment pas le moment de plaisanter, répondit Amina avec une pointe de gêne.
– Je ne faisais que plaisanter, ma chérie, dit sa grand-mère en souriant.
Amina enfila la robe avec hésitation et se contempla dans le miroir, cherchant à évaluer elle-même l’effet rendu par cette tenue. La robe bleue qui lui arrivait aux genoux lui conférait une élégance certaine. Elle décida de se coiffer en queue de cheval, pour une allure à la fois décontractée et soignée. Une fois prête, elle envoya un message à Ilyan pour lui annoncer son arrivée imminente. Elle déposa un doux baiser sur la joue de sa grand-mère pour lui dire au revoir.
– Fais bien attention, ma chérie, lui rappela sa grand-mère d’une voix inquiète.
– Ne t’inquiète pas, grand-mère. Je serai prudente, la rassura Amina avant de partir, le cœur empli d’une agréable anticipation.

13h02.
La sonnerie résonnait dans les murs centenaires de la maison de Ilyan, agitant l’atmosphère tranquille qui y régnait. Lorsque la mélodie s’apaisa enfin, c’est Sophie, la sœur de Ilyan, qui, curieuse, se dirigea vers la porte d’entrée. Un sourire accueillant illumina son visage lorsqu’elle découvrit Amina, une jeune femme au charme envoûtant.
– Salut. Je voulais voir Ilyan, déclara Amina, avec une lueur d’excitation dans les yeux.
– Tu dois bien être Amina, répondit Sophie, émerveillée par la beauté de la nouvelle venue.
– Oui, c’est moi, confirma Amina, un soupçon de timidité dans sa voix.
– Vous êtes vraiment ravissante. Je t’en prie, entre. Ilyan est dans sa chambre, invita Sophie avec chaleur.
Amina la remercia chaleureusement avant de franchir le seuil de la demeure. Les escaliers, témoins silencieux du temps qui passe, l’attendaient, la conduisant avec grâce vers la chambre de Ilyan. Lorsqu’elle poussa la porte, une inattendues se dévoila à ses yeux : Ilyan se tenait sur le lit, en compagnie d’un ami.
– Bonjour ! salua Amina, débordant de joie et d’assurance.
– Amina ! Tu es là, s’exclama Ilyan, invitant la jeune femme à les rejoindre. Tu es vraiment ravissante, ajouta-t-il avec un brin de fascination.
Amina, touchée par le compliment, s’assit avec élégance aux côtés de Ilyan.
– Tu as pris du temps, constata Ilyan.
– J’avais du mal à trouver les rues, s’excusa Amina, sa voix débordant d’innocence.
– Oh ! J’avais complètement oublié que tu es nouvelle ici, s’excusa Ilyan, submergé par l’embarras.
– Ne t’inquiète pas, je suis là quand même, rassura Amina d’une voix douce.
Ilyan, alors, présenta Moussa à Amina. Le regard de la jeune femme se teinta d’une lueur pétillante tandis qu’elle saluait courtoisement le jeune garçon.
– Je suis ravie de faire ta connaissance, Moussa, exprima-t-elle avec une élégance naturelle.
– Enchanté, Amina, répondit Moussa d’une voix empreinte de politesse. Je vous laisse discuter, je suis en bas, ajouta-t-il en s’éclipsant avec discrétion.
Ainsi, Amina et Ilyan se retrouvèrent seuls dans la chambre, plongés dans une conversation animée. Ils partagèrent leurs vies, leurs aspirations, les souvenirs précieux de leurs familles respectives. Le temps s’écoulait, à peine perceptible, alors qu’ils échangeaient rires et confidences, savourant chaque instant de cette connexion naissante.

Après quelques heures de complicité et d’éclats de rire, Sophie les convia à partager un déjeuner convivial. La mère de Ilyan, déjà présente dans la demeure, se joignit à eux, désireuse de rencontrer Amina. À première vue, elle fut saisie par la beauté et la douceur de cette jeune fille.

Le déjeuner se déroula dans une ambiance joyeuse, rythmée par des blagues et des rires qui résonnaient entre les murs. Amina savourait chaque instant de cette convivialité, mais une mélancolie discrète s’insinuait en elle lorsqu’elle se remémorait les repas en famille, partagés avec son père et sa mère. Elle nourrissait le désir intense de les retrouver, de réunir à nouveau tous les membres de sa famille autour d’une table. Cependant, l’atmosphère chaleureuse et bienveillante qui régnait dans la maison de Ilyan réussissait à chasser momentanément ces pensées, offrant à Amina l’occasion de s’évader et de profiter de chaque instant, aussi fugace soit-il.

Après le festin, Ilyan, empli d’une douce satisfaction, convia Amina à partager un moment privilégié en visionnant un film en sa compagnie. D’un geste élégant, elle accepta l’invitation, sans la moindre once d’hésitation. L’excitation se lisait dans ses yeux pétillants alors que Ilyan dévoilait son trésor nouvellement acquis, un ordinateur dernier cri offert par son père. Leur complicité grandissait alors qu’ils prenaient place côte à côte sur le lit, scellant leur proximité d’un éclat subtil.

Ilyan sélectionna avec soin le film, « LACOLLE », une œuvre cinématographique née de la créativité d’Alexandre Castagnetti. Dès les premières images projetées, l’esprit critique d’Amina s’exprima sans retenue.
– Ce film est d’une complexité déconcertante, une énigme que je peine à saisir. Il se perd dans un incessant recommencement, murmura-t-elle avec une pointe de frustration.
Conscient de son désarroi, Ilyan décida de l’éclairer, lui offrant ainsi un nouvel éclairage.
– Permets-moi de t’éclairer sur le sujet. Benjamin, suite à un vœu formulé en ligne, se retrouve prisonnier d’une retenue en compagnie d’autres élèves, notamment Leila. Son objectif ? La convaincre de l’embrasser dans un délai de trois minutes, un défi à relever pour que son vœu se concrétise. S’il échoue, il est condamné à recommencer jusqu’à ce qu’il triomphe, révéla-t-il, espérant dissiper les zones d’ombre qui obscurcissaient l’esprit d’Amina.
Un éclair de compréhension illumina alors le visage d’Amina.
– Ah, je saisis, merci, s’exclama-t-elle.
À partir de ce moment, ils plongèrent corps et âme dans le film, se laissant emporter par les rebondissements de l’intrigue.
Comme tout chef-d’œuvre romantique qui se respecte, la conclusion ne surprit guère. Benjamin parvint, sans contrainte, à conquérir les lèvres de Leila, révélant ainsi l’accomplissement de son vœu.
– Et voilà, tout est bien qui finit bien, lança Ilyan, éteignant délicatement son précieux écran.
– Ce fut un véritable enchantement, j’ai été captivée par ce film, s’exclama Amina, les yeux encore empreints d’étoiles brillantes.
– Je savais que tu en tomberais sous le charme, confia Ilyan, comblé d’avoir su ravir son cœur.
Soudain, Amina jeta un regard fugace à sa montre, puis fixa intensément Ilyan.
– Je crains que l’heure ne soit venue pour moi de regagner ma demeure, annonça-t-elle, la voix teintée de regret.
– Déjà ? J’aurais tant souhaité prolonger cet instant, avoua Ilyan.
– Ma grand-mère doit sans doute m’attendre avec impatience, expliqua Amina.
– Laisse-moi t’accompagner, proposa Ilyan.
– Merci beaucoup, répondit Amina, le cœur empli d’une gratitude infinie envers son hôte qui avait su illuminer sa journée.

 

Quelques mois plus tard.

Dans l’harmonie de leur relation naissante, les échanges entre Ilyan et Amina se multipliaient tels les battements d’ailes d’un papillon envoûtant. Chaque rencontre, chaque appel, chaque message approfondissait leur connaissance mutuelle, tissant les fils invisibles d’une intimité grandissante.

Amina, avec sa grâce naturelle, avait su se créer un cercle d’amies, mais parmi elles, une étoile brillait d’un éclat particulier : Fatma. Leurs chemins s’étaient croisés dans un tourbillon du destin, et leur amitié s’était épanouie comme une fleur rare dans le jardin de leurs vies entrelacées. Fatma, d’une taille équivalente à celle d’Amina, était une jeune femme au charme envoûtant. Sa demeure se trouvait à proximité de la maison d’Amina, faisant de leur complicité une évidence. Elles partageaient les bancs de l’école, assistant aux mêmes cours au lycée, et au fil du temps, leur amitié devenait indissociable.

De l’autre côté de l’univers d’Amina, Ilyan, comme un amoureux fougueux, ne cessait de parler d’elle à son confident, Moussa. Les mots s’échappaient de ses lèvres avec une passion dévorante, alimentant le feu brûlant qui consumait son cœur. Bien qu’ils partageaient le même établissement scolaire, leurs routes semblaient parfois tracées sur des chemins différents, séparés par les contraintes des classes. Mais leurs pensées s’entrelaçaient dans une danse mystérieuse, créant un écho vibrant entre leurs âmes.

Les jours et les mois s’écoulèrent inexorablement, jusqu’à ce que les rayons éclatants de l’été embrasent le paysage de leur chaleur enivrante. C’est dans cette effervescence estivale que Ilyan décida d’inviter Amina chez lui. L’occasion lui semblait propice pour enfin dévoiler les battements tumultueux de son cœur, pour lui confesser les véritables contours de ses sentiments. Il ne pouvait plus se résigner à n’être qu’un ami pour elle, il devait prendre le risque de tout révéler.
Cependant, les tentatives d’Ilyan pour joindre Amina au téléphone se heurtèrent à un silence désespérant. Ses appels restèrent sans réponse, plongeant son esprit dans un abîme d’inquiétude. Déterminé à percer ce mystère, il se résolut à se rendre chez elle.

Lorsqu’il arriva chez Amina, la scène qui s’offrit à lui fut si saisissante qu’il en fut momentanément déboussolé. Elle était là, en train de ranger ses valises, comme si l’ombre de l’adieu planait déjà sur leur lien fragile. Ilyan était tellement déconcerté qu’il en oublia de saluer grand-mère, qui se tenait stoïque devant la porte de la maison. La réalité s’imposait à lui avec une cruauté inattendue.
Les regards de Ilyan et Amina se croisèrent alors, emplis d’une intensité muette. L’atmosphère se chargeait d’une étrangeté palpable, poussant grand-mère à se retirer discrètement, laissant les deux adolescents face à face, livrés à leur tourmente intérieure.
Ilyan, bouleversé par la gravité de la situation, tenta d’interrompre le silence pesant qui les engloutissait. Les mots lui échappaient, emplis d’une tendresse teintée de désarroi.
– Amina ! Où vas-tu ainsi ? parvint-il enfin à murmurer, sa voix empreinte d’une inquiétude à peine voilée.
– Ilyan, je suis sincèrement désolée de ne pas te l’avoir dit plus tôt, mais je dois déménager chez ma mère, répondit Amina d’une voix empreinte d’émotions, les larmes perlant au coin de ses yeux. J’étais incapable de savoir comment te l’annoncer.
Ilyan se sentit désemparé, cherchant désespérément une issue à cette impasse sentimentale. La seule réponse qui émergeait de ses pensées tourmentées était de réconforter Amina, déjà submergée par les flots brûlants de ses larmes. Il ne pouvait rester insensible à sa détresse, à sa vulnérabilité. Rien n’était plus captivant, plus impérieux que de la prendre dans ses bras, de l’envelopper d’une étreinte réconfortante.
– Tout va bien, Amina. Je sais que cette situation doit être difficile pour toi, mais tu y survivras, souffla-t-il doucement en caressant délicatement sa joue mouillée.
– J’espère de tout mon cœur que tu as raison, murmura Amina entre deux sanglots, se laissant aller dans les bras réconfortants de Ilyan.
Le temps semblait s’écouler en sourdine, figé dans l’intimité de leur étreinte. Amina se dégagea doucement de Ilyan, le regard teinté d’une tristesse déchirante, puis porta ses valises vers la voiture qui les attendait sagement. Ilyan, animé d’une détermination poignante, se hâta de récupérer une des valises, désireux d’apaiser le fardeau qui pesait sur les épaules d’Amina.
– Laisse-moi t’aider, murmura-t-il avec gratitude.
– Merci, répondit-elle d’une voix empreinte de reconnaissance.
Ainsi, Ilyan transporta les valises avec précaution, trouvant dans chaque geste une façon de prolonger ce moment fugace. Il prit le temps de les ranger avec une minutie presque obsédante, prolongeant cet adieu douloureux autant que possible.
– L’heure des adieux approche, Ilyan. Je suis profondément heureuse d’avoir partagé de si beaux moments avec toi. Je les chérirai à jamais, déclara Amina, son regard empreint d’une tristesse voilée par l’espoir.
– Moi aussi, j’espère que nos chemins se recroiseront bientôt. Tu me manqueras énormément, répliqua Ilyan, un soupçon de mélancolie colorant sa voix.
– Nous garderons le contact, n’est-ce pas ? Nous resterons liés malgré la distance. À bientôt, conclut Amina, lui offrant un dernier sourire rempli de promesses.
Ilyan observa, le cœur lourd, Amina s’éloigner en montant dans la voiture aux côtés de grand-mère. Chaque pas qui la séparait de lui semblait alourdir le poids de sa solitude. Dans le silence de l’adieu, il comprit que les épreuves à venir seraient bien plus ardues qu’il ne l’avait imaginé.

Chapitre 2

« Qu'est-ce qu'un baiser ? Ce n'est autre chose que le véritable effet du désir de puiser dans l'objet qu'on aime. »

Giacomo Casanova

De nos jours.

06h00.
Le doux matin se déployait déjà alors que mon ami Moussa, pris dans les filets du sommeil, laissait échapper des ronflements rythmés. Quant à moi, j’étais déjà éveillé, m’offrant tout le temps nécessaire pour me préparer à cette journée qui s’annonçait.

07h15, À l’école.
J’arrivai d’un pas déterminé, me dirigeant résolument vers ma salle de classe. J’étais le premier à franchir le seuil, laissant l’espace se remplir peu à peu d’autres élèves. Les huit heures sonnèrent et la classe fut prise d’une effervescence bruyante, emplissant l’air d’un tumulte joyeux. Mais tout se calma soudainement lorsque le professeur de mathématiques fit son entrée majestueuse.

Les minutes s’égrainaient lentement, ponctuées par le travail studieux, lorsque soudainement une vibration familière se fit sentir dans la poche de mon pantalon. Je sortis mon portable avec hâte, curieux de découvrir l’origine de cette notification. Un nouveau message d’Amina illumina l’écran de mon téléphone.
– Salut Ilyan, comment vas-tu ? En fait, je descends à midi et j’aimerais te voir avant de rentrer.
Sans tarder, je lui répondis avec empressement :
– D’accord. Retrouvons-nous devant la porte de sortie.
Les mots d’Amina éveillaient ma curiosité, suscitant une foule de questions dans mon esprit. Qu’avait-elle à me confier ? L’intrigue s’épaississait et je me sentais à la fois excité et nerveux à l’idée de cette rencontre à venir. Le temps s’étirait lentement, les aiguilles de l’horloge semblant se moquer de mon impatience. Les secondes semblaient éternelles, amplifiant l’incertitude qui me consumait.

12h05.
Une fois les dernières heures de cours terminées, je m’empressai de quitter la classe d’un pas décidé, animé par l’impatience de retrouver Amina. À mon arrivée sur les lieux convenus, je la découvris déjà présente, attendant mon arrivée. Un sourire léger se dessina sur mes lèvres tandis que je m’avançais vers elle.
Dès qu’elle croisa mon regard, une lueur de joie illumina ses traits, témoignant de son bonheur de me voir. Cependant, la sortie de l’école était envahie par une foule agitée, ce qui nous poussa à chercher un endroit plus tranquille pour nous retrouver.
Une fois installés, Amina plongea dans un silence profond, observant les élèves qui s’écoulaient hors de l’établissement. Ses yeux semblaient chercher quelqu’un dans la masse.
Je décidai de briser le silence qui s’était érigé entre nous et que je ne pouvais plus supporter.
– Comment s’est déroulée ta journée de cours ? demandai-je, cherchant désespérément un sujet de conversation.
En réalité, je n’avais pas grand-chose à lui demander.
Elle se sortit de ses pensées et me fixa enfin du regard.
– Ah, c’était super, répondit-elle. Et toi, comment ça s’est passée ?
– Plutôt bien aussi, répliquai-je.
– Parfait alors.
Ne pouvant plus contenir mon impatience, je décidai de lever la question qui m’avait amené ici.
– De quoi voudrais-tu me parler ?
– Excuse-moi de t’avoir fait attendre, lança-t-elle. Aujourd’hui, c’est mon anniversaire et j’ai décidé d’organiser une petite fête chez moi. Je serais honorée que tu sois présent.
J’avais complètement oublié que cette journée marquait son jour de naissance. D’ordinaire, j’étais parmi les premières personnes à lui souhaiter. Mais cette fois-ci, cette date avait complètement échappé à ma mémoire.
Je levai les yeux pour croiser son regard pétillant.
– Ce sera un plaisir pour moi, répondis-je, la sincérité teintant mes paroles.
– Super ! Alors, rendez-vous ce soir ? proposa-t-elle avec enthousiasme.
– Oui, ce soir, dis-je en lui serrant la main avec délicatesse. Et merci pour l’invitation.
– Je t’en prie, murmura-t-elle tout en me gratifiant d’une étreinte fugace avant de s’éloigner.

Le poids de l’oubli se dissipait, laissant place à l’excitation de la soirée à venir. Une soirée d’anniversaire, une occasion de célébrer et de partager un moment précieux avec celle qui occupait mes pensées. Le destin nous réservait une nouvelle page à écrire, et j’étais prêt à en savourer chaque instant.

13h00.
De retour dans le cocon douillet de mon foyer, je découvris avec surprise la présence de Moussa dans ma chambre. J’avais cru qu’il était déjà rentré chez lui. Il était plongé dans une conversation téléphonique animée tandis que je déposais mes affaires avec précaution.
Sans tarder, je m’empressai de lui raconter les événements de ma journée, y compris l’invitation d’Amina. Sa réaction fut bien plus enflammée que la mienne à cette nouvelle.
– Je peux venir avec toi ? s’enquit-il, tout excité.
– Pourquoi cette question ? Tu sais pertinemment que nous irons ensemble, répliquai-je en souriant. Il éclata de rire et poursuivit sa conversation téléphonique.
Quant à moi, l’idée de la soirée chez Amina me poussa à réfléchir à ma tenue. Je me demandais ce que je devrais porter pour cette occasion particulière. C’est alors que l’idée germa en moi de solliciter l’aide de ma sœur, dont le sens du style était incontestable. Elle saurait m’épauler et me guider dans cette quête vestimentaire. Je me dirigeai d’un pas assuré vers la chambre de ma sœur, prêt à recevoir ses précieux conseils et à me parer de mes plus beaux atours.

20h00, chez Amina.
J’arrivai chez Amina, accompagné de mon fidèle ami Moussa. Ma tenue, soigneusement choisie pour l’occasion, se composait d’une chemise d’un bleu éclatant, rehaussée de détails blancs subtils, accompagnée d’un jean noir parfaitement ajusté. Moussa, quant à lui, arborait un t-shirt blanc qui mettait en valeur ses muscles sculptés, associé à un jean bleu nuit délicieusement déchiré.
Un coup retentit à la porte et, après quelques secondes de suspens, une âme charitable nous ouvrit le passage, nous invitant à entrer. La demeure était envahie d’une foule animée, vibrant au rythme d’une atmosphère électrique. C’était un spectacle grandiose, une célébration exubérante de la vie. Les visages qui m’entouraient semblaient tous inconnus, ce qui éveilla en moi le désir ardent de retrouver Amina au plus vite. Mon regard parcourut la pièce, en quête de sa présence. Cherchant à distinguer ses traits familiers dans cette mer de visages inconnus, je scrutai chaque recoin de la salle, mais en vain. Où pouvait-elle bien être ? J’envisageai presque de quitter la pièce lorsqu’un regard croisa le mien, m’immobilisant sur place. C’était elle.
Vêtue d’une robe écarlate magnifique, ses talons noirs ajoutant une touche d’élégance à sa silhouette, Amina était tout simplement éblouissante. Elle exhibait avec grâce une poitrine qui ferait rêver bien des hommes, et son maquillage, d’une simplicité délicate, mettait admirablement en valeur sa beauté naturelle. Je m’approchai d’elle, saisis sa main délicatement, et lui déposai un baiser tendre. Un sourire magique naquit sur ses lèvres, illuminant l’espace qui nous entourait. La prenant par la main, je l’entraînai au cœur de la scène.
– M’accorderais-tu cette danse ? lui demandai-je, empreint d’une douceur teintée de complicité.
– Avec plaisir, répondit-elle d’une voix envoûtante.
Je la rapprochai de moi, mes mains se posant avec assurance sur sa taille, nos fronts se rejoignant dans une proximité enivrante. En cet instant, les mots superflus se taisaient, car nos regards échangés étaient bien plus éloquents. Au rythme de la musique qui berçait nos mouvements, nous nous laissions emporter par une danse intime, une communion silencieuse des corps et des âmes.
Cette soirée était d’une nature singulière, différente de toutes les autres. Elle se tenait là, près de moi, d’une beauté envoûtante, avec sa peau d’ébène, ses yeux semblables à des perles précieuses, et son sourire éclatant dévoilant des dents d’une blancheur immaculée. Je restais là, captivé par sa présence, hésitant à franchir le pas de la proximité physique. À cet instant précis, mon désir le plus fou, le plus ardent, était de l’embrasser, de la caresser. Son corps d’une douceur infinie diffusait un parfum enivrant, unique, qui me donnait l’envie irrésistible de rester à ses côtés, de ne jamais la quitter. Alors, courageusement, je scellai nos lèvres dans un baiser magique, un moment suspendu dans l’éternité. Cette étreinte passionnée se renouvela, et je souhaitais qu’elle dure pour toujours. Mais Amina retint ses ardeurs, se montrant réservée, hésitante.
Plutôt que de la brusquer, je choisis de prendre mon temps, conscient que ce baiser était le premier d’une série de découvertes intimes. Bien que mon désir me poussât vers des horizons plus audacieux, je savourais avec gratitude l’instant présent, ce moment véritablement magnifique.

Après une danse qui semblait s’étirer à l’infini, Amina m’invita à partager un verre avec elle. Acceptant avec enthousiasme son invitation, je la suivis alors qu’elle se dirigeait gracieusement vers la cuisine.
Installés dans cet espace intime, elle me demanda quel rafraîchissement je désirais. Savourant ce précieux moment en sa compagnie, je pris quelques instants pour hésiter, profitant ainsi de cette opportunité de prolonger notre échange. Les yeux levés vers elle, je l’observai à nouveau, émerveillé par sa beauté éclatante. Depuis son retour dans cette ville, jamais je n’aurais pensé ressentir à nouveau cette flamme amoureuse pour elle. Pourtant, l’amour que je lui portais était resté, grandissant jour après jour.
– Es-tu simplement là pour m’admirer toute la soirée ? demanda-t-elle, rompant brusquement mes pensées.
– Si c’est ton désir, je pourrais bien le faire, répondis-je avec un brin de malice.
Elle baissa les yeux, évitant mon regard.
M’approchant d’elle, je m’arrêtai à sa hauteur.
– Pourquoi te sens-tu ainsi en ma présence ? Ce n’était pas mon intention, murmurai-je.
Elle leva les yeux vers le ciel, cherchant ses mots.
– Je me sens bien, dit-elle en se dirigeant vers le réfrigérateur.
Elle prit deux glaces et m’en tendit une. Ensemble, nous retournâmes dans la salle, rejoignant nos amis qui se donnaient entièrement à la musique et à la danse. Soudain, je réalisai que je n’avais plus croisé Moussa depuis notre arrivée. Il était temps de le retrouver. Je tentai de le joindre par téléphone, mais il ne répondait pas. Peut-être était-il trop absorbé par l’effervescence de la fête pour remarquer les appels.
Une certaine inquiétude m’envahit. Amina, remarqua mon souci, posa ses mains délicates sur mon épaule.
– Tu sembles préoccupé, à ce que je vois, lança-t-elle.
– Oui, un peu, répondis-je. C’est mon ami. Depuis notre arrivée, je ne l’ai pas revu une seule fois.
– N’est-ce que cela ? demanda-t-elle avec un brin de malice. Regarde, il est juste là-bas, ajouta-t-elle en le pointant du doigt.
Je me retournai et aperçus Moussa, assis avec une jeune fille à une table. Ils semblaient engagés dans une conversation animée pendant que les autres se trémoussaient au rythme de la musique. Soudain, il se tourna vers moi, comme s’il avait senti mon regard peser sur eux et mes hypothèses se former. Pour ne pas le déranger, je lui fis un clin d’œil complice, puis reportai mon attention sur Amina. Mais elle n’était plus à mes côtés. Un sentiment de surprise me saisit et je me hâtai de chercher dans la cuisine, mais elle n’était pas là non plus. Où pouvait-elle bien être ? Une question sans réponse qui tournoyait dans mon esprit. Je balayai la salle du regard, en quête de sa silhouette, mais elle restait introuvable. Alors, je fis signe à Moussa, lui faisant comprendre qu’il était temps de partir.

Malgré la déception de voir la soirée prendre une tournure inattendue, elle demeurait tout de même merveilleuse. Cependant, l’énigme de la disparition soudaine d’Amina sans un geste d’adieu me tourmentait l’esprit.
Sur le chemin du retour, Moussa cherchait désespérément à comprendre la raison de mon comportement énigmatique. Mais mes réponses restaient évasives, ne lui fournissant aucune explication précise. Il continua alors à me parler de la fille avec qui il avait passé du temps. Toutefois, il ne saisissait pas que je n’étais nullement disposé à aborder cette soirée, malgré les moments agréables partagés en compagnie d’Amina.

Le lendemain, 09h00.
Accompagnant Moussa jusqu’à son domicile pour passer la journée ensemble, je me réjouissais de cette pause bien méritée, étant donné l’absence de cours. Sa résidence n’était pas loin de la mienne, une imposante demeure luxueuse. Son père, conseiller auprès du ministre des infrastructures, occupait une position influente au sein du gouvernement. Après avoir suivi une formation en cinématographie à l’étranger, Moussa était revenu et avait rapidement obtenu des contrats avec des agences, réalisant des documentaires, des films et parfois même des publicités.

Nous franchîmes les portes de sa demeure pour y découvrir sa mère et sa jeune sœur de dix-sept ans, Laïcha. Ensemble, nous montâmes à l’étage jusqu’à sa chambre, plus spacieuse que la mienne. Les murs d’un blanc éclatant encadraient un vaste lit pouvant accueillir trois personnes. Une petite bibliothèque se tenait à côté du lit, tandis qu’un écran plat était fixé sur le mur en face.
Après avoir déposé ses bagages dans sa chambre, nous nous adonnâmes à une partie de jeu vidéo. Les souvenirs des bons vieux temps me revinrent en mémoire, où je surpassais toujours Moussa dans nos affrontements vidéoludiques. Je le battais à maintes reprises. Toutefois, cela faisait près de deux ans depuis notre dernière partie. Je savais qu’il s’était préparé minutieusement, espérant prendre sa revanche.

Après quarante-cinq minutes de jeu acharné, le score était toujours nul partout. Au moment d’entamer une deuxième manche, mon téléphone se mit à sonner, interrompant notre duel. C’était Amina qui appelait.
– Allô ! dis-je en décrochant.
– Ilyan ! Comment ça va ? s’exclama-t-elle.
– Je vais à merveille, et toi ?
– Pareil pour moi, répondit-elle.
– Tu dois être en train de te reposer, j’imagine. Tu dois être vraiment fatiguée.
– Je ne peux pas te dire le contraire. Je suis épuisée.
– Il faut que tu te reposes un peu.
– Oui, c’est ce que je compte faire.
– Au fait, je ne t’ai pas revue de toute la soirée hier, mentis-je, sachant bien que je n’étais pas resté jusqu’à la fin.
– C’est justement pour ça que je t’appelle. Je m’excuse sincèrement. Mon petit ami est arrivé de manière inattendue et je suis partie sans te dire au revoir.
Je fus submergé d’incrédulité. Je ne m’attendais pas du tout à cela. Amina avait un petit ami ? Je refusais de le croire. Mes rêves d’un avenir partagé avec elle, mes sentiments que j’étais sur le point de lui avouer, tout s’effondrait brutalement. Un autre problème venait de surgir, rendant la situation de plus en plus complexe à gérer. L’espoir qui nous animait s’estompait peu à peu.
– Ilyan ! Tu es toujours là ?
– Oui… oui… bon, je te laisse te reposer… à demain.
– D’accord, à demain. Salut.
Je raccrochai le téléphone, perdu dans mes pensées. Le poids des révélations m’écrasa, me laissant sans voix. Les mots me manquaient, tout comme les gestes appropriés. Mon téléphone et la manette glissèrent de mes mains, abandonnés sur le sol. Me levant lentement, je me dirigeai vers la sortie de la chambre, cherchant un répit dans l’immensité de la maison. Descendant jusqu’à la cuisine, je cherchai désespérément quelque chose qui puisse apaiser mon esprit. Je me servis une tasse de café, espérant que sa chaleur dissipât mes pensées tumultueuses. Mon ami, ne comprenant pas mon état, n’osait poser de questions pour le moment. Il préférait me laisser le temps de retrouver mon calme.
Malgré tout, je remontai finalement dans la chambre, me glissant silencieusement sur le lit. À cet instant précis, je ressentais le besoin d’être seul, de m’entretenir avec moi-même. Que devais-je faire désormais ? Étais-je contraint d’abandonner mes aspirations envers elle ? Un moment de réflexion s’imposait pour prendre une décision cruciale.

12h00.
Après un long sommeil réparateur, je me levai lentement et me dirigeai vers la salle de bain, laissant Moussa dans la chambre, absorbé par son téléphone. Lorsqu’il réalisa que j’étais réveillé, il déposa immédiatement son portable et adopta une expression sérieuse, me fixant droit dans les yeux.
– Tu t’es enfin réveillé. Peux-tu me dire ce qui s’est passé ? demanda-t-il d’un ton préoccupé.
N’ayant rien à lui dissimuler, je m’installai sur le canapé à ses côtés et lui racontai en détail toute la conversation, sans omettre le moindre détail.
– Je suis vraiment désolé pour toi, dit-il d’un ton compatissant.
– Ne t’en fais pas pour ça, répondis-je. Tu n’y es pour rien.
– Mets de côté ce qui s’est passé et continue de lui montrer ton amour. Peut-être qu’un jour, elle réalisera à quel point elle compte pour toi.
– Je saurai quoi faire, répliquai-je.
– Parfait. Poursuivons notre partie, j’ai vraiment envie de te battre aujourd’hui, lança-t-il, cherchant à me taquiner.
Un sourire s’esquissa sur mes lèvres face à ses provocations.
– Viens, je vais te prouver que je suis toujours meilleur que toi.
Après notre brève discussion, je me sentis plus serein qu’auparavant. Malheureusement, cette fois-ci, j’avais perdu contre lui. C’était la première fois qu’il me battait, mais cela n’avait guère d’importance comparé aux défis auxquels je devais faire face.

21h00.
La lueur argentée de la lune filtrait à travers les rideaux, éclairant faiblement ma chambre. Je m’étais enfin retrouvé chez moi, après une journée tumultueuse. Dans l’intimité de ma chambre, je m’affalai sur mon lit, laissant mes yeux errer vers le plafond, tandis que mon esprit se perdait dans ma situation complexe. Un tourbillon d’émotions me submergeait, et elle me manquait d’une manière déchirante. Je me sentais désorienté, incapable de percer les mystères de cette fille énigmatique. L’amour existait-il entre nous ? Ressentait-elle les mêmes sentiments que moi ? Ces questions restaient sans réponses, flottant dans l’atmosphère. Pourquoi donc avait-elle posé ses lèvres sur les miennes ? Mon cœur se tordait de douleur, mais je persistais à encaisser les coups, bravant les tourments. Je donnerais tout pour percer le voile de ses pensées, pour comprendre ses véritables intentions. Avait-elle simplement joué avec moi, cherchant à me troubler ? Les doutes m’assaillaient, me torturant l’esprit. Je brûlais d’envie de lui parler, de la voir, de la serrer contre moi, de sceller notre amour par un baiser ardent.

Que me restait-il à faire, face à cette situation déconcertante ? L’épuisement m’envahissait peu à peu, mes paupières se faisaient lourdes, mais le sommeil m’échappait, car mon esprit était empli de sa présence obsédante. Elle régnait en maître sur mes pensées, monopolisant mon univers intérieur, faisant naître en moi un tourbillon d’émotions inextricables.
Dans cette nuit troublée, je me trouvais piégé dans un labyrinthe émotionnel, en quête d’une clarté salvatrice, d’une réponse qui apaiserait enfin mon âme tourmentée.

Chapitre 3

« L'amour meurtrier. L'amour infâme. L'amour funeste. Amour. Amour. Unique vie en ce monde. »

Anne Hébert

Cinq jours plus tard.

10h00.
Le dimanche s’étendait devant moi tel une toile vierge, offrant l’opportunité idéale de vaquer à quelques courses. Mon premier arrêt était chez mon ami Moussa. Près de trois jours s’étaient écoulés depuis notre dernière rencontre, à l’exception des échanges téléphoniques qui parvenaient difficilement à combler le vide de nos retrouvailles. Je montai sur ma moto, faisant vrombir le moteur, et pris la direction de sa demeure.

Une fois sur place, je découvris Moussa occupé à finir ses dernières réalisations. Assis à ses côtés, j’observai avec fascination la maîtrise avec laquelle il effectuait ses ajustements. Au départ, les subtilités de son travail m’échappaient, mais il prit soin de m’expliquer les effets visuels et les nuances chromatiques qu’il soignait avec minutie. Son talent m’émerveillait, et je ne pouvais que saluer son travail avec admiration.
– Comment te portes-tu ? m’interrogea-t-il une fois son ordinateur éteint.
– À merveille, répondis-je d’un ton enjoué. Ne le vois-tu pas ?
– Certes, acquiesça-t-il. Te souviens-tu de Fatma, par ailleurs ?
– Fatma ? Ce nom m’échappe totalement, en toute franchise, avouai-je, perplexe.
– C’est la fille que j’ai rencontrée lors de l’anniversaire d’Amina.
Amina ! Rien qu’à l’évocation de son nom, mes pensées se tournèrent irrémédiablement vers elle. Malgré tous mes efforts pour l’effacer de ma mémoire, elle persistait dans mon esprit, telle une présence indomptable.
Moussa m’arracha brusquement à mes divagations.
– Ilyan, es-tu encore avec moi ? s’enquit-il, cherchant à capter mon attention.
– Oui, répondis-je, me recentrant sur la conversation. Et comment va-t-elle, Fatma ?
– Elle se porte à merveille, révéla-t-il avec assurance, avant d’ajouter :
– Elle souhaite même que nous nous retrouvions ce soir.
– Ce soir ? Mon frère, tu as gagné le gros lot ! m’exclamai-je.
– Serait-ce trop te demander de m’accompagner ? sollicita-t-il, l’espoir perceptible dans son regard.
– Mais ne devrait-ce pas être une soirée en tête-à-tête ? m’enquis-je.
– Certes, mais j’ai évoqué ta présence pour qu’elle puisse faire ta connaissance, m’expliqua-t-il.
– Très bien, finis-je par concéder. J’y serai.

21h00.
Lorsque nous pénétrâmes dans l’enceinte majestueuse de la demeure de Fatma, tout était orchestré à la perfection. Elle rayonnait d’une élégance exquise, vêtue d’une robe noire à la coupe raffinée qui descendait jusqu’à ses genoux. Les perles scintillantes semblaient danser sur le tissu sombre, ajoutant une touche de mystère à sa tenue. Ses cheveux courts encadraient gracieusement son visage, accentuant sa beauté saisissante. Elle avait préparé une table somptueuse dans la salle à manger, regorgeant de mets délicats qui éveillaient nos sens.
Nous prîmes place autour de cette table opulente, nous préparant à savourer un festin tant gustatif qu’émotionnel. Les discussions animées et les rires remplissaient la pièce, créant une ambiance chaleureuse et conviviale.

Après avoir dégusté les mets délicieux, Fatma fit taire la cacophonie en lançant une mélodie douce qui se répandit dans l’air. D’un geste gracieux, elle invita Moussa à la rejoindre sur la piste de danse improvisée. Il acquiesça, captivé par son charme indéniable. Quant à moi, je demeurai assis, mon regard oscillant entre leur complicité naissante et les ombres qui dansaient sur les murs, reflétant mes pensées tumultueuses. Fatma, percevant mon trouble, interrompit leur danse en éteignant la musique d’un geste délicat.
Elle revint s’installer à sa place, aux côtés de Moussa, avant de poser sur moi un regard empreint d’une sollicitude.
– Est-ce que tu penses à elle ? murmura-t-elle d’une voix à la fois douce et inquiète.
– Désolé, dis-je. Je ne te suis pas.
– Je parle d’Amina, lança-t-elle.
Surpris, je restai silencieux un instant, cherchant mes mots dans un mélange de confusion. Comment se faisait-il que cette énigmatique jeune fille fasse partie de l’entourage d’Amina depuis si longtemps, sans que je n’en aie jamais eu connaissance ?
– Vous vous connaissez ? demandai-je.
– Oui, répondit-elle. C’est ma meilleure amie.
– Elle ne m’a jamais dit qu’elle avait une meilleure amie.
– Ça fait à peu près trois ans qu’on s’est connu.
– Tu es amie avec elle depuis trois ans ? demandai-je, cherchant à comprendre la portée de leur lien.
Elle acquiesça légèrement, révélant une profondeur de complicité entre elles qui m’était étrangère. L’idée qu’Amina puisse évoquer notre histoire avec une autre personne m’emplissait d’un mélange d’inquiétude.
– Elle me parle de toi souvent, déclara Fatma, laissant planer une ambiguïté troublante dans l’air.
Ma perplexité grandissait tandis que je tentais de percer le voile de mystère qui entourait leur amitié. Les mots de Fatma semblaient indiquer qu’elle était au courant des événements qui se déroulaient entre Amina et moi, bien que je n’aie jamais eu la moindre indication de la part d’Amina quant à leur relation.
– Que sais-tu exactement ? m’enquis-je.
– Je ne peux pas tout te révéler, répondit-elle énigmatiquement. Mais je peux te dire qu’elle ne t’a pas menti au sujet de son petit ami. Il fréquente le même lycée que vous.
Cette révélation soudaine provoqua une onde de choc à l’intérieur de moi. Je me sentais confus et perdu dans un labyrinthe d’émotions contradictoires.
Perdant peu à peu l’élan qui m’avait poussé à assister à cette soirée, je jetai un coup d’œil à l’horloge murale et réalisai que les heures s’étaient envolées, emportant avec elles une part de mon enthousiasme. Il était temps pour moi de quitter ce tumulte d’émotions et de rentrer chez moi.
– Je suis désolé de devoir quitter cette belle soirée, annonçai-je. Ma mère doit m’attendre.
Moussa sembla enclin à rester, captivé par la présence envoûtante de Fatma, mais il comprit ma détresse et se leva pour me suivre.
– Nous nous reverrons bientôt, n’est-ce pas ? lança Moussa, cherchant à préserver les liens tissés durant cette soirée.
– Cela me convient parfaitement, répondit-elle avec un sourire aimable.
Alors que nous quittions la demeure de Fatma, prêts à affronter les ténèbres de la nuit, elle m’interpella une dernière fois.
– Si tu as besoin d’aide, n’hésite pas à m’appeler, offrit-elle d’une voix empreinte de compassion.
Je lui adressai un regard reconnaissant, sentant que ses paroles allaient bien au-delà des simples politesses.
– Merci, vraiment, murmurai-je, exprimant ma gratitude sincère.
Ainsi, nous nous enfonçâmes dans la nuit, portant avec nous le poids des révélations et les promesses de lendemains incertains.

Le lendemain, 10h00.
D’un pas résolu, je m’acheminai vers la salle où se déroulerait le prochain cours. À mon arrivée, le professeur se faisait encore attendre. Je pris place et sortis mon téléphone portable, parcourant machinalement mes nouvelles notifications. Soudain, une présence se manifesta devant moi. Je levai les yeux pour découvrir un visage familier qui s’imposa à ma conscience.
– Amina ! Je ne m’attendais pas à ta visite, laissai-je échapper, surpris.
– Salut ! Je m’excuse sincèrement de me présenter ainsi à l’improviste, répondit-elle.
– N’aie crainte, ce n’est rien, la rassurai-je d’un ton apaisant.
– J’aimerais m’entretenir avec toi, en tête-à-tête, juste quelques instants, confia-t-elle d’un air empreint de mystère.
– Entendu, consentis-je avec curiosité.
Je me levai, me laissant guider par Amina vers la sortie.
Ensemble, nous trouvâmes un refuge sûr où nous pourrions enfin échanger en toute intimité. Mon regard ne pouvait s’empêcher de se perdre dans la beauté de son visage.
Amina semblait épanouie, pleinement elle-même.
– Comment ça se passe pour toi ? demanda-t-elle d’une voix douce.
– Tout va bien, merci, répondis-je avec assurance.
Un silence pesant s’installa, Amina baissant les yeux. Cette attitude troubla légèrement mon être.
– De quoi souhaitais-tu me parler ? interrogé-je afin de rompre cette atmosphère suspendue.
– En fait, je voulais te confier que j’ai enfin…, commença-t-elle d’une voix timide.
– Amina ! Cela fait des heures que je te cherche, interrompit un jeune garçon d’une stature moyenne. Le prochain cours nous attend, et l’heure avance, ajouta-t-il d’un ton pressant.
Je m’interrogeai sur l’identité de cet intrus. Plus grand que moi, il arborait un short noir moulant qui mettait en valeur sa silhouette athlétique. Une légère barbe ornait son visage.
Amina, sur le point de me confier quelque chose d’important, m’adressa un regard empreint d’excuses.
– Je dois me rendre en cours. Nous nous reverrons plus tard, n’est-ce pas ?, demanda-t-elle désolée.
Je lui fis signe de la tête, exprimant mon consentement tacite.
Amina fit volte-face pour rejoindre cet inconnu.
Les paroles énigmatiques de Fatma refirent surface dans mon esprit, créant une tourmente intérieure qui semblait prête à ébranler mes certitudes. Il devait certainement être son petit ami. C’était la première fois que je l’apercevais dans les couloirs de notre lycée. Son visage ne m’était pas familier, nulle rencontre antérieure ne l’avait placé sur mon chemin.
La sonnerie stridente de l’école vint brutalement interrompre mes pensées. Je jetai un coup d’œil à ma montre et constatai avec une pointe de panique que j’étais en retard de cinq minutes. Je m’empressai donc de quitter précipitamment les lieux, cherchant à rejoindre ma classe le plus rapidement possible.

17h00.
Le soleil déclinait lentement dans le ciel alors que mes dernières heures de cours touchaient à leur fin. Une fois mes obligations éducatives accomplies, je me dirigeai vers ma fidèle moto, prête à m’emmener chez moi. Cependant, le destin, semblant se jouer de moi, avait d’autres plans en réserve.
Au moment où j’approchais de la porte de sortie du lycée, mes yeux furent captivés par la scène qui se déroulait de l’autre côté. Amina se tenait là, accompagnée du mystérieux jeune garçon qui avait fait irruption dans ma journée. Mon esprit et mon cœur se disputaient en un ballet d’incertitude, me murmurant des conseils contradictoires.
Après un long moment de réflexion, je décidai finalement de ne pas m’approcher d’eux. Les conséquences imprévisibles d’une telle rencontre semblaient trop lourdes à supporter. Faisant volte-face, je retournai vers ma moto, cherchant ainsi à éviter un enchevêtrement de sentiments complexes et à préserver ma tranquillité d’esprit.

18h00.
Baigné dans le calme de ma chambre, mes pensées tourbillonnaient telles les pages d’un livre suspendues en l’air. La journée qui venait de s’achever avait semé le trouble dans mon esprit, mais je refusais de rester inerte face à l’incertitude qui m’assaillait. D’un geste résolu, je m’emparai du téléphone de Moussa, en quête d’un réconfort dans une voix familière. Mon doigt effleura le numéro de Fatma, que je savais prête à m’écouter.
Après quelques sonneries, le timbre mélodieux de sa voix résonna enfin à travers le combiné.
– Bonsoir ! s’exclama-t-elle.
– Bonsoir Fatma, ici Ilyan. Comment te portes-tu ? lançai-je avec une pointe d’anxiété, cherchant un réconfort dans notre échange.
– Ilyan ! Je vais bien, merci. Et toi ? répondit-elle d’une voix douce et chaleureuse.
– Je vais bien également. Comment s’est déroulée ta journée ? l’interrogeai-je.
– Ce fut une journée plutôt agréable, répondit-elle avec une légère inflexion.
– Je m’en réjouis. Mais, pourrais-tu m’en dire davantage sur le petit ami d’Amina ? l’interrompis-je, cherchant avidement des réponses qui éclaireraient mes pensées.
– Hmm, aurais-tu finalement pris une décision ? répliqua-t-elle, piquant ma curiosité d’un soupçon de taquinerie.
– Oui, il est grand temps que je prenne les choses en main, avouai-je, déterminé à affronter les défis qui se dressaient devant moi. Je suis prêt à tout pour conquérir le cœur d’Amina. Crois-tu en mes chances ?
Fatma fit une pause, laissant flotter le poids des doutes et des possibles dans l’air.
– Je ne peux te promettre l’issue de cette quête amoureuse, répondit-elle d’une voix apaisante. Mais tu ne sauras jamais si tu ne tentes pas ta chance, Ilyan.
– C’est vrai, murmurai-je. Je dois parler à Amina.
– N’attends pas, si c’est réellement ce que tu désires, m’encouragea Fatma avec bienveillance.
– Je te remercie, Fatma, lui confiai-je avec une gratitude sincère.
– C’est un plaisir de pouvoir t’apporter mon soutien, Ilyan. Je te souhaite bonne chance.

20h00.
Après avoir raccroché avec Fatma, je pris mon téléphone dans le but d’envoyer un message à Amina, lui demandant à ce que l’on se retrouve dans le parc dans quelques minutes, prêt à lui dévoiler mes pensées les plus profondes. J’étais déterminé à prendre ce risque, à me jeter à corps perdu dans l’inconnu.

Le poids de ma décision se faisait sentir alors que je quittais ma demeure, croisant ma sœur qui, curieuse, me scrutait de ses yeux inquisiteurs. Je lui offris un baiser furtif sur la joue, n’ayant guère le temps de lui expliquer mes intentions.
Ma sœur, complice de mes secrets, observa mon départ avec une lueur d’inquiétude dans le regard.

20h15.
J’étais arrivé au parc. Amina était assise sur un banc, son visage trahissant une légère appréhension mêlée d’une pointe d’inquiétude. Vêtue d’une robe blanche qui semblait l’envelopper d’une aura angélique, elle captivait mon attention. Chaque fibre de mon être aspirait à la toucher, à ressentir la douce chaleur de ses mains et à m’enivrer de son parfum envoûtant. Je m’approchai d’elle, silencieux comme une ombre glissant dans la pénombre.
Doucement, j’effleurai ses yeux de mes mains, les cachant derrière mes doigts avec délicatesse.
– Ilyan ! C’est toi ? s’écria-t-elle, légèrement troublée.
En retirant mes mains, je me présentai devant elle, mon regard vibrant d’émotions retenues.
– Toi ! Tu m’as fait peur, reprit-elle.
Mais ses mots furent rapidement engloutis par le silence qui s’installa entre nous, nos regards s’entremêlant dans une danse muette. Un instant suspendu, où chaque souffle résonnait d’une intensité palpable.
– Puis-je m’asseoir près de toi ? osai-je demander.
Elle acquiesça avec un soupçon d’autodérision dans son ton.
– Oui, bien sûr. Je suis sotte de ne pas te l’avoir proposé plus tôt.
M’installant à ses côtés, je ressentis une chaleur familière se répandre dans mon être. Le banc devint notre îlot d’intimité, où nous pouvions partager nos vérités les plus profondes.
– De quoi voudrais-tu me parler ? demanda-t-elle.
La vérité me tiraillait, engendrant en moi une profonde appréhension. Malgré les multiples efforts déployés pour la retrouver en cette soirée, il était hors de question que je la quitte sans lui révéler les raisons qui m’avaient poussé à la rencontrer.
Je m’emplis les poumons d’une inspiration profonde, plantant mes yeux dans les siens sans la moindre hésitation.
– Amina, j’ai ressenti le besoin irrépressible de te parler, de te dévoiler les sentiments qui s’agitent en moi depuis que nos chemins se sont croisés, commençai-je d’une voix empreinte de douceur et de conviction. Chaque jour qui passe, ton impact sur ma vie grandit, et je ne peux plus ignorer cette force magnétique qui nous unit.
Elle écoutait attentivement, ses yeux cherchant les réponses dans mes paroles.
– Je sais que tu as un petit ami qui semble occuper une place importante dans ta vie. Mais, malgré cela, je ne peux m’empêcher de penser qu’il existe peut-être une chance pour nous, une connexion plus profonde qui dépasse les limites de l’amitié.
Un silence pesant s’installa entre nous, empli d’incertitude et d’attente. Les secondes semblaient s’étirer à l’infini, le monde entier retenant son souffle. La peur de la perdre s’empara de moi, m’enserrant le cœur. Nos regards se croisaient, mes mains fermement posées sur ses genoux, empreintes d’une impatience dévorante pour connaître sa réponse.
Finalement, Amina brisa ce silence, sa voix transperçant l’air avec délicatesse. Les paroles de la belle créature résonnèrent dans l’air comme une mélodie tragique, tandis qu’elle retirait délicatement mes mains posées avec tendresse sur ses genoux.
– Ilyan, tes paroles me touchent au plus profond de mon être, répondit-elle d’une voix empreinte d’émotions. Notre amitié est précieuse, et je ne peux nier l’existence de cette connexion spéciale entre nous. Mais mon cœur appartient déjà à un autre, susurra-t-elle d’une voix empreinte de douceur, faisant naître une lueur d’amertume dans mes yeux.
Ces paroles résonnèrent en moi comme une symphonie douloureuse, accentuant la tristesse qui embrumait mon esprit. Bien que j’eusse déjà connaissance de l’existence de son petit ami, je ne pouvais me résoudre à prendre cela comme une excuse pour taire les sentiments qui me dévoraient.
– Te souviens-tu de ce jour où, de manière inattendue, je m’étais présenté à ta porte et avais découvert, effaré, que tu préparais tes bagages, prête à quitter notre ville ? C’était ce jour-là que je nourrissais l’espoir de tout te révéler. Mais hélas, il était déjà trop tard pour moi. Et maintenant, je refuse que nous nous retrouvions un jour à regretter nos silences.
– Nous ne nous perdrons pas à nouveau, murmura-t-elle d’une voix chargée d’émotion. Je te le promets.
Mon regard se perdit dans le vide, cherchant à échapper à l’attraction magnétique de son visage qui m’emplissait d’une tristesse grandissante.
– Je suis réellement désolée, Ilyan, reprit-elle avec sincérité. Cette situation m’est également pénible.
– Je comprends. Tu n’as pas à t’excuser, répondis-je d’une voix empreinte de mélancolie, dissimulant tant bien que mal la douleur qui m’assaillait. Laisse-moi te raccompagner chez toi.
– Ilyan, ne le prends pas ainsi. Ce n’était pas mon intention, s’empressa-t-elle de préciser, maintenant son regard fixé intensément sur le mien.
– Je te prie de bien vouloir excuser ma demande qui t’a pris ton temps, murmurai-je.
Elle se leva alors, gardant nos yeux captivés l’un par l’autre, avant de s’éloigner lentement.
– Ce n’est rien. Je peux rentrer seule. Salut, dit-elle.
– Salut, soufflai-je à voix basse, observant avec une pointe de déchirement l’éloignement de celle que j’avais toujours aimée.

21h30.
Au crépuscule de la nuit, je me tenais devant l’entrée majestueuse de la demeure de Moussa, partagé entre le désir d’y pénétrer et la crainte de ce qui m’attendait à l’intérieur. Mais alors que je m’apprêtais à me dérober et à fuir, mes yeux croisèrent ceux de Moussa qui descendait d’une voiture. Il était impossible de m’échapper à présent, le destin avait scellé notre rencontre.
– Que fais-tu ici, à une heure aussi tardive ? interrogea-t-il, s’approchant de moi avec une démarche empreinte de prestance.
– Je peine à trouver moi-même une réponse à cette question, répondis-je.
– Serais-tu aux prises avec un souci ? demanda-t-il avec une sincère préoccupation.
– Je te confierai mes tourments une fois à l’abri des murs de cette demeure, répliquai-je.
Il me fixa d’un regard pénétrant, reflétant une inquiétude profonde, puis fit signe de la tête, m’invitant à le suivre à l’intérieur.
La porte s’ouvrit lentement, dévoilant les secrets qu’elle renfermait. Je franchis le seuil, conscient que le moment était venu de libérer mon cœur de son fardeau.
Une fois les portes de sa chambre refermées, Moussa m’offrit un verre d’eau, geste de bienvenue teinté de sollicitude. Nous nous installâmes face à face, tandis que l’atmosphère s’alourdissait de l’intensité de nos émotions. Chaque silence pesait de tout son poids, annonciateur des révélations à venir.
– Dévoile-toi, murmura-t-il, sa voix à la fois douce et chargée d’appréhension. S’agit-il d’Amina ? demanda-t-il d’un ton presque étouffé, cherchant à percer les mystères qui m’avaient poussé à franchir sa porte en cette heure.
– J’ai parlé avec elle, répondis-je d’une voix brisée, les mots se frayant un chemin difficile à travers ma gorge nouée.
– Et maintenant ? souffla-t-il, anticipant une vérité qui nous envelopperait telle une nuit sombre et sans étoiles.
– Elle a refusé. Je l’ai perdue, confessai-je dans un murmure teinté de désespoir, les larmes brûlant mes yeux.
Moussa se rapprocha, déplaçant son corps pour se tenir à mes côtés, un soutien silencieux en cette heure où les mots se faisaient superflus.
D’un regard empreint de compassion, il murmura :
– Je suis sincèrement désolé. Que comptes-tu faire désormais ?
– Je l’ignore. Le voile de l’incertitude m’enveloppe de toutes parts, confessai-je.
– Prends le temps de te reposer jusqu’à demain. Alors, nous pourrons en reparler. Pour l’heure, je vais me retirer. Si tu as besoin de quoi que ce soit, n’hésite pas à me solliciter, déclara-t-il, laissant planer la promesse d’un soutien inconditionnel.
Un faible sourire se dessina sur mes lèvres, témoignant de ma gratitude envers son geste d’amitié. Je m’acheminai lentement vers la salle de bain, mon reflet dans le miroir témoignant de ma vulnérabilité. L’eau chaude caressa ma peau, accompagnant mes pensées qui s’égarèrent parmi les souvenirs des moments heureux partagés avec Amina. De notre première rencontre à notre dernière soirée, ce baiser qui avait scellé nos âmes pour la première fois.
Le robinet se referma, signe d’une pause nécessaire. Je quittai la salle de bain, me glissant sous les draps du lit, mes yeux fixés sur le plafond. Dans cet instant de solitude, je méditai sur la dure réalité de ma « nouvelle vie », une existence désormais orpheline d’Amina. Mon cœur meurtri vacillait entre l’agonie et l’espoir, alors que je cherchais la force nécessaire pour traverser les ténèbres qui s’étendaient devant moi.

Le lendemain, 08h05.
Au détour de ma conscience embrumée par le sommeil, je découvris trois appels manqués de ma mère. Malgré mes tentatives de la joindre, nos échanges se limitaient à sa boîte vocale. Désireux de la tranquilliser, je pris l’initiative de lui adresser un message.
– Maman, je viens tout juste de remarquer tes appels et je tiens à te rassurer. Je me porte bien et je suis actuellement chez Moussa, où j’ai passé la nuit. Je m’excuse sincèrement de ne pas t’avoir prévenu plus tôt.
Quittant le lit avec une lenteur désabusée, je me dirigeai d’un pas las vers la cuisine, en quête d’une réconfortante pitance. C’est là que je trouvai Laïcha, la sœur de Moussa, affairée aux fourneaux, préparant un festin matinal.
– Besoin d’une main secourable ? lui lançai-je.
Un éclat de rire lui échappa.
– Penses-tu réellement pouvoir me venir en aide ? répliqua-t-elle, s’approchant de moi avec une pointe d’amusement. Tu n’as pas vraiment l’étoffe d’un homme aux mains agiles.
– Et sur quoi te bases-tu pour émettre un tel jugement ? rétorquai-je, curieux de connaître son opinion.
Un court silence s’installa avant qu’elle ne daigne me répondre.
– C’est la pure réalité, déclara-t-elle d’un ton neutre. Dis-moi, es-tu là uniquement pour m’épauler ou y a-t-il autre chose qui motive ta présence ?
Sa question me prit légèrement au dépourvu.
– Eh bien, j’ai le ventre vide, avouai-je en posant une main sur mon estomac insistant. Si tu avais la gentillesse de me concocter un petit quelque chose à déguster, je t’en serais infiniment reconnaissant.
Son visage afficha une surprise mêlée d’amusement à ma demande.
– Bien sûr que oui, installe-toi donc. Je vais te préparer un succulent petit-déjeuner, déclara-t-elle en s’affairant autour des ustensiles de cuisine.
Alors que je prenais place, je ne pouvais m’empêcher de reconnaître l’excellence et la générosité de Laïcha. Sa bienveillance naturelle et son dévouement pour le bien-être de ceux qui l’entourent transparaissaient dans chaque geste.
– À quoi penses-tu donc ? m’interrogea-t-elle, déposant devant moi un délicieux sandwich accompagné d’une soupe fumante. Tu sembles légèrement mélancolique, ajouta-t-elle en me tendant une canette de boisson rafraîchissante.
– Je ne pense à rien, mentis-je, désireux de garder mes tourments intérieurs pour moi seul.
– Alors, bon appétit, conclut-elle doucement, me laissant savourer mon repas dans un silence propice à l’apaisement de mon esprit.

Pendant que je savourais chaque bouchée de ce délicieux repas, Laïcha retourna vaquer à ses occupations, me laissant apprécier le calme ambiant. Les saveurs encore présentes dans ma bouche me tentaient même à réclamer une autre portion.
– Où est Moussa ? Je ne l’ai pas vu depuis mon réveil, demandai-je, remarquant son absence.
– Il m’a simplement dit qu’il avait des affaires à régler en centre-ville. Il rentrera ce soir, répondit-elle d’une voix calme.
– D’accord. Et comment ça se passe avec Amar , lançai-je, faisant référence à son petit ami qu’elle m’avait présenté lors de ma dernière fête d’anniversaire. Tous deux partageaient la même classe au lycée.
En l’examinant plus attentivement, je décelai une lueur de tristesse dans ses yeux étincelants.
– Qu’est-ce qui se passe, Laïcha ? Vous vous êtes disputés, toi et Amar ? insistai-je, soucieux de son bien-être.
Elle entretenait une relation avec ce garçon depuis leurs premières années au lycée. Amar était quelqu’un de relativement sympathique, mais il ne semblait pas capable de susciter une passion véritable. Je croyais sincèrement que Laïcha méritait quelqu’un capable de l’émouvoir et de partager son enthousiasme. Au lieu de cela, Amar se montrait instable avec elle, manquant de gentillesse.
– Les disputes entre Amar et moi ne sont pas monnaie courante, soupira-t-elle. Ce personnage est en passe de m’emprisonner dans un tourbillon d’ennui, anéantissant mon existence prématurément.
– Alors, pourquoi ne pas rompre ? suggérai-je. Trouve quelqu’un d’autre.
Elle haussa légèrement les épaules, cherchant ses mots avec précaution.
– Ce n’est pas comme si, un jour, je me réveillais subitement en apercevant une silhouette et en m’exclamant : « Mon Dieu, voilà l’homme de ma vie ! C’est lui que j’aime ! »
– Tu n’en auras aucune idée tant que tu ne te seras pas affranchie d’Amar. Qui sait sur qui tu pourrais bien tomber ?
Un soupir profond s’échappa des lèvres de Laicha, trahissant le poids de son dilemme.
– Tu soulèves un point juste, mais quitter quelqu’un avec qui j’ai partagé tant de temps n’est pas une chose facile. Il est véritablement attentionné.
Dans un flot d’émotion, ses yeux s’emplirent de larmes qu’elle balaya d’un geste empreint d’impatience.
– En réalité, je l’ai déjà quitté, reprit-elle. J’ai blessé Amar, Ilyan, la voix teintée de remords. C’est comme porter un coup à un chiot qui te voue une confiance aveugle. Je me sens atroce.
– Il est préférable de souffrir quelques heures, voire quelques semaines, plutôt que d’être malheureuse toute sa vie. Amar se remettra. Je t’assure qu’il trouvera quelqu’un pour te remplacer en un clin d’œil.
Au même instant, une sonnerie impromptue retentit, rompant le silence ambiant. mon téléphone se tintait d’une mélodie familière, annonçant l’appel de ma mère. D’un geste hâtif, je décrochai et sa voix douce s’éleva à travers l’appareil.
– Ilyan, murmura-t-elle. Je viens d’écouter ton message sur ma boîte vocale.
– Oui, maman, répondis-je. J’ai manqué tes appels, mais ne t’inquiète pas pour moi. Je vais bien, je rentrerai bientôt à la maison.
– D’accord, souffla-t-elle d’un ton apaisant. Je t’attends. Prends soin de toi, lança-t-elle avant de mettre fin à notre conversation téléphonique.
Je me levai alors de mon siège, l’esprit en ébullition, et déposai un tendre baiser sur la joue de Laïcha.
– Je dois partir, ma mère m’attend, lui fis-je savoir.
Un soupçon se dessina sur son visage.
– Tu ne m’as pas encore partagé les détails de ton affaire, fit-elle remarquer.
– Un autre jour, répondis-je avec un léger amusement.
Elle acquiesça doucement.
– D’accord, dit-elle, laissant entrevoir une pointe de mélancolie. Salut.
– Salut, soufflai-je, réprimant un profond soupir.

Quittant l’intimité de notre échange, je me dirigeai vers la chambre de Moussa pour récupérer mes effets personnels, veillant à ne rien laisser derrière moi. Puis, traversant la cuisine d’un pas rapide, je m’approchai de Laïcha pour exprimer ma gratitude sincère envers sa bonté inébranlable. Son sourire lumineux illumina la pièce et elle m’enlaça tendrement, scellant notre lien indéfectible en cet instant fugace.

Chapitre 4

Un jour le soleil de l'intérieur finit par s'éteindre, ne reste que la lumière allumée par les souvenirs de l'amour.

À mon domicile, 10h00.
Dans un élan teinté de bonheur, ma mère s’exclama :
– Ilyan ! Te voilà de retour.
– Oui, maman, répondis-je, une douce émotion transparaissant dans ma voix. Comment te portes-tu ?
– Super. J’ai préparé des cookies et du lait pour toi, s’exclama-t-elle avec enthousiasme.
– Ô, mille mercis, maman, murmurai-je. Je les dégusterai avec une joie infinie.
– Je dois m’absenter pour quelques heures, affaires à régler en ville, continua-t-elle. Ta sœur rentrera d’ici une heure. Si tu as besoin de quoi que ce soit, n’hésite pas à me le dire. Sinon, nous nous retrouverons ce soir pour au dîner.
– Ça ira, maman, répondis-je. À ce soir.
Après avoir savouré ce délicieux repas, je m’engageai dans les escaliers, montant les marches avec une certaine lassitude. J’atteignis enfin ma chambre, assoiffé d’un peu de repos bien mérité.

16h00.
Deux longues semaines s’étaient écoulées depuis ma dernière sortie de course à pied. Ce soir-là, après une sieste réparatrice, je décidai de chasser les ténèbres qui obscurcissaient mon être. Je me résolus à enfiler une tenue appropriée, à ajuster méticuleusement mes chaussures de sport, puis je me lançai sur le chemin qui menait à la plage.

L’air empreint de liberté caressait mon visage tandis que mes pas rythmés résonnaient sur l’asphalte. Le paysage, éclairé par les derniers rayons du soleil couchant, se déployait devant moi, offrant un répit à mon esprit. Les vagues de l’océan murmuraient une mélodie apaisante, tandis que le sable s’étendait devant moi, témoignant de l’infini potentiel de l’horizon.

Je courus sans relâche, laissant mes pensées vagabonder, cherchant à retrouver l’équilibre et la clarté d’esprit qui m’étaient si chers. Les kilomètres défilaient sous mes pieds, faisant place à une sensation de légèreté et de liberté.
Et finalement, dans un ultime effort, j’atteignis le point culminant de mon parcours, là où le ciel se fondait harmonieusement avec l’océan infini. Le spectacle majestueux qui s’offrait à mes yeux m’enveloppa d’une sérénité réconfortante. Je savourai cet instant, imprégnant chaque fibre de mon être de la beauté éphémère du monde qui m’entourait.

Par un caprice du destin, mes pas m’ont guidé en direction de la demeure d’Amina. Ce n’était pas une destination préméditée, simplement le fruit du hasard. J’avançais d’un rythme soutenu, laissant l’air humide caresser ma peau. Alors que je m’approchais de son domicile, je remarquai une silhouette féminine se dessinant dans la distance. C’était elle, Amina. J’ai ralenti mon allure, m’approchant avec une certaine prudence.
– Comment vas-tu ? demandai-je.
– Je me porte à merveille, répondit-elle. Tu sembles en forme, à ce que je vois.
– Peut-être devrions-nous faire un bout de chemin ensemble, proposai-je, espérant raviver une étincelle de conversation.
– Non, je ne crois pas. J’ai des affaires à régler, répliqua-t-elle sans hésitation.
– Alors, je t’invite à dîner chez moi ce soir, si cela te convient, insistai-je, déterminé à trouver un terrain d’entente.
Elle marqua une brève pause, avant d’accepter finalement.
– Parfait, murmurais-je avec une pointe de satisfaction. Nous nous retrouverons ce soir.
Je repris ma course, mon esprit déjà plongé dans les préparatifs de la soirée à venir.

18h05.
En franchissant le seuil de la cuisine, je vis ma mère en train préparer le repas du soir.
– Maman, prépare-toi à recevoir ce soir Moussa et Amina pour un dîner des plus agréables.
Un sourire rayonnant se dessina sur le visage de ma mère.
– Quelle merveilleuse idée ! s’exclama-t-elle. Cela fait une éternité depuis la dernière fois qu’Amina a franchi nos portes. Je pensais presque qu’elle était à jamais partie de nos vies.
– En réalité, maman, elle avait quitté la ville pendant un temps, mais elle est récemment revenue, révélai-je.
Mon aveu suscita la curiosité chez ma mère.
– Qu’y a-t-il donc entre vous ? me demanda-t-elle d’un ton empreint de malice.
– Rien d’autre que de l’amitié. Amina est une amie proche, rien de plus, assurai-je, tentant de dissiper tout malentendu.
Ma mère posa ses yeux scrutateurs sur moi, laissant transparaître une pointe de scepticisme.
– Tu ne peux pas nier que son charme t’a touché, affirma-t-elle. Je te connais mieux que quiconque. Au fait, ton père a appelé. Il rentrera ce soir.
Mon cœur bondit de joie à cette nouvelle.
– Vraiment ? m’émerveillai-je. Il m’a tellement manqué.
– Il nous a tous manqué, rectifia-t-elle d’un ton doux.
– Peut-être, mais pas Sophie, répliquai-je avec une pointe de tristesse.
Ma mère laissa échapper un soupir complice.
– C’est simplement qu’elle refuse de l’admettre, murmura-t-elle.
Plongé dans mes pensées, j’essayai de déchiffrer les énigmes du cœur, me demandant quelles surprises la soirée à venir me réservait.

20h00.
Le crépuscule enveloppait la demeure familiale d’une aura douce et chaleureuse tandis que ma mère s’affairait en cuisine à préparer un festin digne des plus grandes occasions. L’excitation dans l’air était palpable, et chacun de nous prenait place autour de la table, incluant Moussa et Amina, les invitant à partager cette soirée exceptionnelle.
Cependant, leurs présences avaient un rôle plus profond, agissant comme un rempart subtil entre Sophie et mon père. Les regards méfiants que ma sœur lançait à Malik semblaient passer inaperçus, alors qu’il continuait de lui poser des questions apparemment anodines sur son travail.
Mais ma mère, remarquant la tension monter, mit fin à cet échange tendu avec une voix ferme et douce à la fois :
– On ne parle pas d’affaires à table, déclara-t-elle, son regard bienveillant balayant l’assemblée. Je suis persuadée que nous pouvons trouver mille autres sujets de conversation. Après tout, combien de temps s’est écoulé depuis notre dernière réunion sous ce toit ? Faisons de ce dîner un moment véritablement spécial, à la hauteur de cette occasion unique.
Mes pensées se bousculaient dans ma tête, cherchant désespérément un sujet léger pour détendre l’atmosphère tendue à table. Puis, comme une échappatoire improvisée, les mots s’échappèrent de ma bouche sans que je puisse les retenir.
– Comment se passent les projets en Chine, papa ? lançai-je, espérant détourner l’attention de la conversation pesante.
Un silence pesant enveloppa la pièce avant que mon père ne réponde d’une voix empreinte d’amertume.
– J’ai fini tous mes projets en Chine, dit-il. Je ne pense pas y retourner. Mes collaborateurs sur place seront capables de gérer les derniers détails. Et toi, comment se passent tes études ?
– Ça se passe très bien, répondis-je avec un soupçon de fierté dans la voix.
– Je n’en doute pas, répliqua Malik, sans chercher à dissimuler son amertume.

Alors que l’atmosphère à la table devenait de plus en plus tendue, je pris l’initiative de proposer une escapade gourmande à mes amis.
– Moussa, Amina, que diriez-vous d’une savoureuse glace à déguster en plein air ? Nous pourrions profiter d’un moment de détente, lançai-je avec un sourire.
– Avec plaisir, Ilyan ! s’exclama Amina, curieuse de connaître les choix qui s’offraient à nous.
– Voyons ce que maman a dans son congélateur, proposai-je, même si je connaissais déjà la réponse.
Le congélateur de ma mère était réputé pour être une véritable caverne d’Ali Baba des plaisirs glacés. La fraise, en hommage à son parfum préféré, y trônait en majesté. Le chocolat, favori de mon père et de ma sœur, occupait également une place de choix. Quant à moi, mon palais se réjouissait à l’idée de déguster une vanille onctueuse agrémentée d’éclats de caramel croustillants.
Moussa et Amina, complices dans leur choix, optèrent pour les saveurs qui faisaient également danser leurs papilles. Je leur servis avec enthousiasme deux généreuses boules de glace à la fraise, tandis que je m’octroyais une boule de mon péché mignon.
Une fois munis de nos délices glacés, nous nous aventurâmes à l’extérieur. La douce brise caressait nos visages, apportant avec elle un parfum de légèreté. Les tensions de la table semblaient s’envoler, remplacées par des éclats de rires et des conversations détendues.

Dans les lueurs crépusculaires de cette soirée estivale, alors que le silence enveloppait notre petite bulle d’intimité, nos destins se sont entrelacés d’une manière mystérieuse. Les battements de nos cœurs résonnaient en harmonie, comme si le monde entier s’était figé pour nous laisser vivre ce moment précieux. Moussa, remarquant mon désir de rester seul avec Amina, trouva une excuse pour se retirer.

Je fixai Amina avec un mélange de fascination et d’émerveillement, captivé par sa beauté énigmatique qui semblait s’épanouir dans l’obscurité. Ses yeux étincelaient d’une lueur profonde, révélant un océan de pensées et d’émotions qui m’attiraient irrésistiblement. Dans cet instant suspendu, je réalisai à quel point elle avait bouleversé mon existence, faisant éclore en moi des sentiments que je ne pensais jamais ressentir.

Le vent doux caressait nos visages, faisant danser ses mèches de cheveux dans un ballet céleste. Elle tenait encore sa glace entre ses doigts, le froid givré contrastant avec la chaleur de nos émotions naissantes. Je m’approchai lentement, l’envie de la prendre dans mes bras devenant irrépressible.

Le temps sembla s’étirer, chacun de mes pas vers elle rempli d’une tension électrique. Finalement, je me trouvai face à elle, si près que nos souffles se mêlaient dans une danse intime. Son regard se posa sur moi, une lueur de vulnérabilité mêlée d’audace.
– Quelque chose te tracasse ? susurrai-je, mes mots portés par une sincérité brûlante.
Son sourire timide vacilla légèrement, puis elle parla d’une voix douce, révélant ses pensées les plus profondes.
– Non… Enfin, si. Je sais que ce n’est pas vraiment mon affaire, mais je ne peux pas m’empêcher de m’en soucier.
– Dis-moi, je suis là pour t’écouter, murmurai-je, le souffle court.
– C’est à propos de ton père et de ta sœur. Je ne peux m’imaginer à quel point cela doit être difficile pour eux.
Les tensions entre mon père et ma sœur étaient palpables, créant un fossé entre eux. Les années avaient laissé leur empreinte sur les épaules de Sophie, l’aînée de notre famille, qui avait dû porter le fardeau de l’absence paternelle plus que quiconque. Elle avait grandi avec un sentiment d’abandon, reléguée au second plan derrière les ambitieux projets professionnels de notre père, Malik. Celui-ci avait réussi à faire sa marque en tant qu’entrepreneur visionnaire, collaborant avec ses frères, un architecte talentueux et un écologiste passionné.
Sophie oscillait entre amour et ressentiment envers notre père. Elle lui reprochait de ne pas avoir fait les efforts nécessaires pour être présent dans sa vie. Il semblait que sa carrière passait avant tout, reléguant sa famille au second plan. Les rares fois où il se trouvait loin de la maison, il se contentait d’appels sporadiques, négligeant souvent les détails de la vie quotidienne. Il payait les factures et les frais d’éducation, mais il manquait cette connexion émotionnelle si importante.
– Les frêles contours de leur relation ne résistent guère à l’épreuve du temps, fis-je remarquer. Mais j’ai foi en un avenir plus clément.
– Puisse Dieu nous exaucer, souffla-t-elle. Et je tiens à te remercier pour cette soirée, elle fut véritablement merveilleuse.
– Admettons que cela ne se soit pas déroulé comme prévu.
– Pourtant, j’en ai tiré une profonde satisfaction.
– Je tâcherai de me rattraper à une autre occasion.
– Tu sais que tu n’y es pas tenu.
– Je le sais. Cependant, ce serait un plaisir pour moi.
– Si tu le souhaites, alors.
– Au fait, comment se porte ta relation avec Junior ? interrogeai-je, empreint de curiosité.
Elle baissa les yeux, submergée par la tristesse. Elle ne voulait guère m’en parler, mais j’insistai pour connaître les tenants et aboutissants de cette situation.
– C’est terminé entre nous deux, répondit-elle, sans même me regarder.
Je m’apprêtai à parler, mais aucun mot ne franchit mes lèvres. Finalement, je hochai simplement la tête.
– C’était excessivement complexe, ajouta-t-elle.
En cet instant, deux sentiments me dominaient. D’un côté, une profonde peine m’envahissait à son égard. À en juger par sa voix, il était évident qu’elle tenait énormément à Junior. D’un autre côté, je ressentais un léger soulagement en la voyant s’éloigner de lui. Je m’imaginais qu’il y avait encore un espoir de conquérir son cœur. Peut-être une seconde chance se présentait-elle à moi.
Je la contemplai, cherchant à la réconforter.
– Je suis sincèrement désolé, dis-je en lui tendant ma main qu’elle saisit sans la moindre hésitation. Je serai toujours là pour toi au besoin.
– Merci, murmura-t-elle.
Ma main s’égarait le long de sa taille, et elle se blottit contre ma poitrine. Ensemble, nous contemplions les milliers d’étoiles illuminant le firmament.

Le lendemain, 12h00.
Ce jour-là, à l’école, une atmosphère familière régnait, ponctuée par les discussions passionnées de Libasse sur la politique sociale du gouvernement. Tel était son leitmotiv, et c’était presque toujours lui qui s’emparait de la parole, déversant ses griefs contre le ministre de l’éducation, soulignant les erreurs récurrentes des syndicats et lançant des diatribes cinglantes à l’encontre des professeurs. De temps à autre, Ramatoulaye et Aicha, membres de notre groupe, osaient lui répliquer, mais sans vraiment y mettre tout leur cœur. Les deux autres, Muhamed et Cherif, demeuraient le plus souvent silencieux. Muhamed, désintéressé par la politique, trouvait sa passion dans le jardinage. Chez lui, il cultivait avec soin un petit lopin de terre, veillant amoureusement sur ses patates et ses choux. Cependant, conscient que cet intérêt suscitait peu d’enthousiasme au sein du groupe, il préférait garder le silence. Quant à Cherif, son domaine de prédilection résidait dans l’élevage, et il gardait jalousement ses idées pour lui-même, les préservant tel un trésor précieux.

Quelques instants avant la reprise des cours, une proposition alléchante émanait d’Aicha : un repas à la cafétéria pour apaiser nos estomacs affamés. Une idée qui ne manquait pas de charme.
Nous nous retrouvâmes attablés ensemble, goûtant avec délectation nos mets favoris. Les conversations s’animaient, embrassant une multitude de sujets sans réelle direction.

13h00.
– Mes chers amis, je crains que la fin de la pause ne soit venue, déclara Cherif d’un ton solennel.
– Bonjour, cher horloger, s’esclaffa Libasse d’un rire effronté.
Cherif lui jeta un regard sombre, mais Libasse se souciait peu des réactions qu’il suscitait.
– Il serait judicieux de regagner nos salles de classe, annonça Muhamed d’un air sérieux, scrutant chacun d’entre nous.
Les autres se levèrent à leur tour, emportant leurs sacs.
Il suffisait de jeter un coup d’œil à l’horloge pour constater que la récréation touchait à sa fin.
Nous pénétrâmes les uns après les autres dans la salle de classe, rejoignant nos places habituelles.
Bien le bonjour, ô noble discipline qu’est la philosophie !

Alors que les paroles éphémères de M. Diop résumaient le précédent cours, une vibration discrète émanait de ma poche, attirant mon attention. Je déployai l’écran de mon téléphone pour découvrir un message d’Amina.
– Salut ! Mes cours sont terminés. Je t’attends au restaurant, je préfère éviter de rentrer seule.
Je pris le temps de composer une réponse.
– Salut ! Je te rejoindrai dès la fin de mes cours. Il ne m’en reste qu’un à présent.
Un sourire fugace se dessina sur mes lèvres tandis que je replaçai délicatement mon téléphone dans ma poche.
– Que se passe-t-il ? interrogea Muhamed.
– Oh, ce n’est rien.
– Je suis convaincu qu’il se trame quelque chose, répliqua-t-il avec insistance.
– Il s’agit d’Amina, finis-je par avouer.
– Êtes-vous ensemble ? Pourquoi ne nous en as-tu rien dit ?
– Nous ne sommes pas ensemble, rectifiai-je. Apaise-toi, bon sang.
– Est-ce qu’il y a un problème entre vous deux ? interrogea le professeur en notre direction.
– Non, monsieur, répondit Muhamed.
– Alors taisez-vous avant que je ne vous renvoie, grogna le professeur.
– Oui, monsieur.

15h00.
Au terme de plusieurs heures de cours, mes oreilles furent enfin caressées par les notes mélodieuses de la sonnerie libératrice. Les dernières paroles de l’enseignant s’estompèrent tandis que je rassemblai mes affaires avec une hâte impatiente, pressé de me frayer un chemin vers la sortie.
– Tu ne nous attends pas, cher ami ? s’exclama Ramatoulaye depuis les confins de la classe.
– Non ! J’ai des affaires à régler, répondis-je d’un ton énigmatique.
– Ou plutôt, quelqu’un à retrouver, répliqua Muhamed, détenant déjà l’indice de mon dessein secret.
Je ne daignai pas répondre à sa provocation et m’engouffrai hors de la salle de classe, avide de continuer mon chemin.

Je m’approchai d’Amina, la découvrant en pleine conversation avec Junior. Les rejoignant, je m’installai avec assurance aux côtés d’Amina.
– Est-ce que je vous dérange ? demandai-je d’une voix teintée d’une légère ironie, connaissant déjà la réponse qui planait dans l’air.
– Pas du tout, répondit Amina d’un ton doux. Tu t’es fait attendre.
Elle jeta ensuite un regard en direction de Junior.
– Excuse-moi, je dois rentrer, fit-elle, esquissant un léger mouvement pour prendre congé.
Je me levai gracieusement, m’avançant vers elle alors que Junior, les yeux assombris par une rage inavouée, me fixait d’un regard noir. Je lui adressai un sourire envoûtant, poursuivant ma route avec assurance, laissant dans mon sillage une aura magnétique.

15h15.
Après quelques minutes de marche, alors que nous nous éloignions du lieu où s’était déroulée la brève rencontre avec Junior, un silence pesant s’était installé entre nous.
D’un ton empreint de curiosité, je m’enquis de notre destination.
– Et bien, où allons-nous exactement ? demandai-je avec une pointe d’interrogation.
Amina, sans se détourner, répondit d’une voix calme mais résolue :
– Nous rentrons tout simplement.
Ma curiosité grandissait à mesure que les pas nous rapprochaient de notre destination. J’étais avide de connaître les tenants et les aboutissants de cette étrange rencontre avec Junior.
– Peux-tu me dire ce qu’il voulait de toi ? insistai-je doucement.
Son regard se perdit dans le lointain et elle murmura :
– Pour l’instant, je préfère garder le silence.
Chaque réponse énigmatique alimentait mon désir de comprendre la nature de cette situation. Je saisis délicatement sa main dans la mienne, cherchant à instaurer un lien de confiance et de complicité.
– Amina, pourquoi ne viendrais-tu pas partager un repas avec moi ? proposai-je. Il semble que tu en aies bien besoin.
Elle détourna légèrement son regard, ses pensées semblant se perdre dans une profonde réflexion.
– Ce serait une mauvaise idée, crois-moi.
Ma curiosité se transformait en détermination.
– Pourquoi serait-ce une mauvaise idée ? argumentai-je. Nous serons entourés de nombreuses personnes, aucun risque de succomber à la tentation, au milieu de cette foule.
Elle tourna finalement son regard vers moi, une lueur d’incertitude dans les yeux.
– Qui te dit que je serais tentée de succomber à ton charme ? questionna-t-elle d’une voix chargée de sous-entendus.
Un sourire se dessina sur mes lèvres, amusé par sa remarque perspicace.
– Peut-être est-ce l’inverse, peut-être suis-je celui qui redoute d’être séduit, répliquai-je, révélant une pointe d’autodérision.
Un court silence s’installa entre nous.
– D’accord, tu m’as percé à jour, admis-je avec une pointe d’humour. Allons-y alors, il ne s’agit que d’un simple repas, bien loin d’un rendez-vous amoureux.
Ses pensées s’entremêlaient dans un ballet incertain entre les arguments en faveur et les hésitations. Lorsque, enfin, ses lèvres prononcèrent le mot « oui », je fus plongé dans une profonde perplexité. Étais-je parvenu à la convaincre, à titiller sa curiosité, ou bien était-ce l’ombre de la colère envers son ex qui planait sur ce fragile consentement ? Quelle qu’en fût la raison, une vague de soulagement s’empara de mon être.
– Permettrais-tu que je t’adresse une question ? soufflai-je.
– Seulement si tu tiens ta promesse de me nourrir, répondit-elle malicieusement.
– D’accord, trouvons un endroit qui nous plaise.
Nous nous mîmes à déambuler, nos pas s’accordant harmonieusement. Dans un murmure, je lui demandai si elle avait repéré un lieu qui lui plaisait.
– Ils semblent tous bons. Choisis à ta guise, me répondit-elle.
Mon regard se posa sur un recoin à l’atmosphère paisible. Doucement, je l’accompagnai jusqu’à une table, lui demandai avec galanterie ce qui émoustillerait son palais, puis, discrètement, j’adressai un signe au serveur pour l’informer de notre présence et lui commander deux divines pizzas.
Le garçon se hâta de nous servir, apportant avec célérité notre festin tant attendu.
– Désormais que ton appétit est satisfait, permettrais-tu que ma question prenne enfin vie ? osai-je, captivé par son regard.
– Oui, je t’écoute, répondit-elle.
– Qui, parmi vous deux, avait souhaité mettre fin à votre relation ? Les yeux rivés l’un dans l’autre, elle se livre enfin à cette délicate confession.
– Lui, murmura-t-elle d’une voix empreinte de douleur et de résignation.
Un sourire triste se dessina sur mes lèvres.
– C’est bien ce que je pressentais. Ce personnage… ce crétin sans égal.
Un éclat fugace de gratitude illumina le visage d’Amina.
– Merci d’être de mon côté.
Cependant, une interrogation subsistait, brûlante comme un brasier dans mon esprit.
– Avait-il une liaison, cet homme qui prétendait si fermement incarner des valeurs familiales irréprochables ?
Prise de stupeur, Amina s’exclama avec véhémence :
– Par les cieux, non ! Jamais ! Junior était doté d’une intégrité sans faille envers ses valeurs familiales.
– Des valeurs solides, et pourtant il aspirait à rompre le lien qui vous unissait ? m’interrogeai-je.
La voix d’Amina se teinta d’une tristesse contenue.
– Parce que je n’ai pas su être à la hauteur de son idéal de petite amie. Je me suis trop investie dans mes études, œuvrant sans relâche pour élever mon niveau.
J’émis un soupir empreint de perplexité.
– Mais ne connaissait-il pas l’ampleur de tes responsabilités professionnelles au début de votre relation ?
– Si, murmura-t-elle, mais c’est une énigme que je n’ai jamais réussi à résoudre. Je n’ai pourtant pas changé.
Une ombre de compréhension passa dans mon regard.
– Et vous en avez discuté, n’est-ce pas ? Vous vous êtes disputés, animés par une colère brûlante à ce sujet ?
Amina secoua la tête, un voile de tristesse assombrissant son visage.
– Jamais. Un jour, il m’a simplement annoncé que mes priorités ne correspondaient pas aux siennes et qu’il ne pouvait plus continuer ainsi, au sein de cette relation.
Un froncement de sourcils marqua mon visage, trahissant mon étonnement.
– Sans même essayer de trouver un terrain d’entente ? répliquai-je d’un ton empreint de réprobation.
Elle leva sa main délicatement, comme pour mettre un terme à cette discussion délicate.
– Écoute, c’est du passé. Laissons cela derrière nous, déclara-t-elle d’une voix résolue.
Pour une raison inexpliquée, je décidai soudain de changer de sujet, espérant apaiser l’atmosphère chargée.
– Que dirais-tu d’une balade en bord de mer ? lançai-je.
Son regard se fixa sur moi, décelant la curiosité mêlée de méfiance qui imprégnait mes paroles.
– Tu sembles d’humeur étrange aujourd’hui. Qu’est-ce qui se passe ? interrogea-t-elle.
– Rien. J’ai simplement le désir ardent de passer plus de temps ensemble, répondis-je. Cela t’intéresserait-il ?
– Oui.
Un éclat de rire s’échappa de mes lèvres.
– Ton enthousiasme fait plaisir à voir ! m’exclamai-je, m’enivrant de sa réaction.
Elle haussa légèrement les épaules, résolue à dissimuler l’effet qu’elle produisait sur elle.
– Ce n’est qu’une simple promenade sur la plage, dit-elle d’un ton décontracté, cherchant à minimiser l’importance de notre escapade. Nous ne sommes pas en train de planifier notre mariage, que je sache.
Mon regard s’enflamma d’une lueur intense.
– Peut-être est-ce ce que ton cœur désire secrètement ? lançai-je, bravant les limites.
Elle me lança un regard noir, masquant avec détermination l’intérêt que cette idée avait éveillé en elle.
– Non, je n’en ai absolument pas envie, répliqua-t-elle d’un ton catégorique.
– Ton refus sonne un peu trop forcé, lançai-je, plongeant mes yeux dans les siens. Un simple « non » aurait amplement suffi.
– Tu sais à quel point tu es exaspérant ? demanda-t-elle.
– Non, mais je suis sûr que tu seras ravie de me le dire, répondis-je.
Elle me fixa intensément, exaspérée par mon comportement. Elle attrapa sa veste pour la revêtir.
Lorsque je lui passai la veste sur les épaules, nos doigts se frôlèrent délicatement, provoquant un frisson captivant qui trahissait l’effet troublant que ma présence avait sur elle.
Ce frisson témoignait de l’erreur que constituait notre décision de partir en promenade ensemble. Les émotions tumultueuses qu’elle réveillait en elle, tissaient une trame complexe entre nous, une trame dont les fils s’entrelaçaient d’une manière pernicieuse, annonçant des instants tourmentés à venir.

Cependant, alors que nos pas nous guidaient à travers le tapis verdoyant de la pelouse, notre destination se dessinant au loin, Amina commença à se laisser séduire par l’idée. Peut-être que cette simple promenade ne serait pas une si mauvaise idée après tout. Et lorsque je saisis doucement sa main pour l’aider à escalader les rochers et descendre sur le sable dur, quelque chose en elle céda.

Ce qui me fascinait chez Amina, c’était sa capacité à apprécier les silences, à ne pas ressentir le besoin de combler chaque moment de paroles vides de sens. Alors que nos doigts s’entrelaçaient, nous avancions d’un pas déterminé le long du rivage, où le sable s’effritait par endroits, sculpté par les caprices de l’érosion. Son visage, baigné par les rayons dorés du soleil, reflétait une sérénité contagieuse. L’air marin emplissait mes poumons, ravivant mes sens et m’enveloppant d’une sensation vivifiante.

Depuis son retour dans cette cette ville, elle ressentit pour la première fois un sentiment d’harmonie et d’aisance. À cet endroit, au bord des flots, les pressions qui l’assaillaient en présence de ses parents, dont les querelles incessantes la plongeaient dans l’angoisse, semblaient s’évanouir.
Les sourcils d’Amina se plissèrent, traduisant une intensité de réflexion qui lui était propre. Son air sérieux et déterminé me fascina au plus haut point, et je fus submergé par une impulsion irrépressible. M’inclinant vers elle, je capturai ses lèvres dans un baiser empreint de passion. Ce n’était qu’un effleurement que je cherchais à lui offrir, mais la douceur de sa bouche était si exquise que je ne pouvais me contenter de cette brève caresse. Nos lèvres s’unirent dans une danse envoûtante, tandis que l’ivresse des sensations qui nous enveloppait me poussait à chercher davantage, insatiable dans ma quête de prolonger cet instant magique.

Après m’être redressé, nos respirations haletantes témoignaient de l’intensité de l’instant. Un voile d’incompréhension se déployait dans les yeux d’Amina, tandis qu’elle frottait délicatement ses lèvres, comme pour effacer le souvenir de notre baiser.
– Pourquoi as-tu fait cela ? demanda-t-elle d’une voix teintée de perplexité, ses mots accompagnés d’une légère vibration. Surtout après que je t’aie clairement indiqué que je n’étais pas un bon parti.
Je gardai mes mains dans mes poches, résistant à l’envie irrépressible de la toucher à nouveau, et haussai les épaules d’un air détaché.
– Il m’a semblé que c’était une bonne idée.
– Décidément, tu te trompes, répliqua-t-elle avec une détermination farouche, bien que son timbre de voix trahisse une fragilité subtile.
À ces rares instants, lorsqu’elle dévoilait ses doutes, j’éprouvais l’irrésistible désir de la protéger.
Un sourire s’esquissa lentement sur mes lèvres.
– Attendons de voir lequel d’entre nous aura raison, dis-je d’un ton calme.
Une attente qui, je le pressentais, serait comblée par une symphonie de baisers enivrants.

16h00.
Amina, encore étourdie par notre baiser, me fit un signe de la main tandis qu’elle reprenait le chemin du retour. Ses jambes tremblaient légèrement, trahissant l’effet électrisant que notre échange avait eu sur elle.
– Intéressant ! s’écria Fatma, arborant un sourire narquois. Vous voilà en train de virevolter sur la plage.
Amina réagit vivement, sa voix chargée de défense.
– Nous ne faisions pas des virevoltes ! répliqua-t-elle, cherchant désespérément à échapper aux soupçons perspicaces de Fatma.
Fatma posa un regard curieux sur Amina.
– Alors, que se passe-t-il entre Ilyan et toi ? demanda-t-elle, intriguée.
Amina, dont les mains tremblaient encore légèrement, se servit un verre d’eau glacée. Elle espérait que la fraîcheur apaiserait les flammes qui dansaient en elle. Puis, d’une voix évasive, elle répondit :
– Rien.
Elle porta le verre à ses lèvres, savourant chaque gorgée glacée dans l’espoir de calmer les tourments qui agitaient son être.
Mais cela n’eut pas l’effet escompté, et ne lui fit pas non plus gagner du temps.
Fatma, inébranlable, repartit à l’assaut.
– Je ne partage pas cet avis, répliqua-t-elle. Vous vous embrassiez avec une telle fougue et une telle voracité. De là où je me trouvais, il était même possible d’apercevoir une légère émanation de fumée, témoignage d’une passion torride entre vous.
Son regard soutenu me laissa stupéfait.
– Tu nous as espionnés ? m’exclamai-je, incrédule.
– Nullement. Je suis partie à sa recherche. Je vous ai repérés et j’ai immédiatement fait demi-tour pour vous attendre, confia-t-elle, arborant un sourire complice.
– J’ai pensé que ce serait divertissant d’observer les explications que vous alliez fournir, ajouta-t-elle.
– Je suis ravi que tu nous trouves amusants, ripostai-je d’un ton piqué.
– Non pas elle, rectifia Fatma. Vous étiez fous l’un de l’autre. Et d’après ce que j’ai pu observer, vous l’êtes toujours.
Amina lui donna un petit coup dans les côtes, taquinante.
– Je trouve cela plutôt charmant, déclara Fatma.
– Cela n’a rien de charmant, rétorqua Amina.
– Pourquoi donc ? interrogea Fatma.
– Allons, Fatma, tu sais pertinemment que ce n’est pas aussi simple. Regarde comment j’ai gâché ma relation avec Junior.
Fatma contemplait Amina d’un regard empreint de désapprobation. D’un ton calme, elle fit remarquer :
– Eh bien, nous sommes tous encore en vie. C’est l’essentiel, n’est-ce pas ? Laisse tomber. Nous nous égarons du sujet. Tu te prives d’un avenir avec Ilyan qui pourrait être absolument extraordinaire. Tu ne tentes même pas d’explorer la possibilité que ça fonctionne. À mon humble avis, tu te trompes.
Amina ne pouvait nier la justesse des paroles de Fatma. Elle se comportait de façon défaitiste, guidée par les cicatrices de ses expériences passées. Elle avait appris qu’elle n’était pas faite pour les relations, redoutant tout échec qui pourrait laisser une marque indélébile. Ainsi, elle ne voyait aucune raison de s’engager à nouveau dans une telle situation, même si je ravivais ses sens et lui rappelais à quel point notre connexion était profonde.
Posant son verre vide avec délicatesse, Amina se leva de sa chaise.
– Mettons un terme à cette discussion. J’ai du travail à accomplir, tout comme toi.
Le visage de Fatma se teinta de déception, ses yeux reflétant un brin de tristesse.
– Comme tu veux. Après tout, c’est ta vie, souffla-t-elle.
D’une voix teintée de détermination, Amina répondit :
– Oui, c’est ma vie.

Chapitre 5

« Regarde-toi, rassurant les autres avec les mots que tu voulais entendre. »

Le lendemain, 12h00.
Après avoir consacré toute ma matinée à réviser mes cours, une pause s’imposait à midi. Vêtu d’un jean et d’un t-shirt blanc, légèrement élimé mais porteur d’authenticité, je décidai de faire un détour par la pizzeria qui trônait au coin de la rue, en face de la plage. Alors que je tournais l’angle de la rue pour m’approcher de l’établissement tant apprécié, mes yeux s’arrêtèrent net sur un garçon s’approchant de moi. Son visage finement ciselé et ses vêtements griffés avaient marqué ma mémoire. Bien que son allure fût plus décontractée ce jour-là, chacun de ses gestes trahissait une éducation empreinte d’aristocratie.
– Hé là-bas ! Comment ça va ? s’exclama-t-il, s’avançant rapidement vers moi.
– Ça va à merveille, répondis-je d’un ton enjoué.
– Vous allez quelque part ? interrogea-t-il.
– Je vais à la pizzeria d’à coté, révélai-je, levant les yeux vers lui. Je suis Ilyan, ajoutai-je en lui tendant la main.
– Junior, rétorqua-t-il sèchement, saisissant ma main avec une poigne ferme mais éphémère. Amina m’a parlé de vous.
– Oui, exact, acquiesçai-je.
– Comment la connaissez-vous ? demanda-t-il alors, une pointe de jalousie teintant sa voix.
– Nous avons partagé des moments ici, confiai-je.
– Je vois, murmura-t-il, cherchant à cacher son trouble.
– Bien, je vais vous laisser, conclus-je, me préparant à reprendre mon chemin, bien que les émotions tourbillonnant autour de nous laissent présager d’une suite plus complexe à notre rencontre.

Tout homme qui aurait délibérément choisi de s’éloigner d’Amina était indubitablement dépourvu de tout sens commun. Et cela s’appliquait également au garçon se tenant devant moi, car il avait commis cette même erreur fatale. Peut-être n’était-il pas parti de son plein gré, mais il n’avait rien fait pour retenir Amina. Avec le recul, il m’était évident qu’il avait agi d’une manière d’une profonde stupidité, ignorant les véritables joyaux de la vie qu’il avait laissé échapper.

POINT DE VUE DE FATMA.

Le lendemain, 12h00.
Je franchis les portes de l’école pour me retrouver dans le restaurant, à la recherche d’Amina qui siégeait solitaire à une table.
– Que fais-tu là, assise seule sans même un repas devant toi ? m’enquis-je d’un ton préoccupé.
Elle baissa les yeux, une expression chagrine dessinant les contours de son visage.
– Je me cache, confessa-t-elle. Junior est à ma recherche.
Je fis mine d’un frisson exagéré, cherchant à conjurer les pensées de ce rendez-vous indésirable.
– Arrête, je t’en prie, n’en dis pas plus. Le simple fait de le revoir serait encore trop tôt pour moi.
Les sourcils d’Amina se froncèrent légèrement.
– Tu ne l’as jamais véritablement porté dans ton cœur, n’est-ce pas ?
Je haussai les épaules, sachant qu’il n’était plus nécessaire de dissimuler la vérité maintenant qu’ils étaient séparés.
– Je suis désolé, mais en effet, je n’ai jamais vraiment été son plus grand admirateur, concédai-je avec une pointe de regret. J’ai essayé, pourtant, par égard envers toi. Mais je n’ai pu m’empêcher de le trouver rigide et jugeant les autres. Bien qu’il soit un bel homme, cela n’a jamais compensé son absence d’humour et de personnalité.
Un éclat de rire s’échappa des lèvres d’Amina.
– Allons, ne sois pas si dur envers lui !
– Malheureusement, il souffre d’un sérieux déficit en matière d’humour, insistai-je. Il ne s’est pas privé de me faire comprendre à quel point il me méprisait. Il me tenait responsable de chaque minute que tu consacrais à m’écouter ou à me venir en aide.
Amina secoua légèrement la tête.
– Tu exagères en disant qu’il te déteste à ce point.
L’air de scepticisme se peignit sur mon visage, tandis que je levais un sourcil interrogateur en réponse aux paroles d’Amina.
– Je te prie, épargne-moi tes mensonges. Allons, Amina, tu ne peux ignorer les sentiments qu’il nourrit à mon égard. Son regard glacial en dit long, comme s’il considérait que je ne suis qu’une perte de temps pour vous deux. Il cherche à me rabaisser, à me faire sentir que je ne suis qu’une insignifiance.
Un sentiment de culpabilité s’empara d’Amina, trahissant la véracité de mes paroles.
– Je suis désolée, je ne me rendais pas compte que c’était à ce point-là.
– J’y suis habitué, répliquai-je. Ce qui me chagrine, c’est qu’il t’ait fait ressentir la même chose.
Amina sembla stupéfaite.
– Mais non, il ne s’est jamais comporté ainsi avec moi !
– Si, c’est le cas !
– D’accord, tu as peut-êre raison, concéda-t-elle à contrecœur. Je suppose que tu as déjà trouvé l’homme parfait qui ne me traitera jamais aussi mal.
– Effectivement. Tu dois admettre que Ilyan possède de nombreuses qualités. Si ce n’était pas son amour inconditionnel pour toi, je me laisserais volontiers tenter.
– Et pourquoi ne pas essayer ? demanda Amina d’un ton feignant l’indifférence.
– Vraiment ? m’enquis-je, guettant sa réaction à mon aveu d’attirance. Cela ne te dérangerait pas ?
– Il est libre de faire ce qu’il veut. Il ne m’appartient pas. Vas-y.
Un rire s’échappa involontairement de ma bouche.
– Et risquer de te voir furieuse si tu nous surprenais en train de nous embrasser ? Je ne pense pas, non.
Amina me lança un regard noir.
– Je t’ai dit que tu pouvais y aller.
– Tu le dis, mais tes yeux trahissent une autre vérité. Je pense qu’il vaut mieux que je reste à distance, loin de Ilyan.
– Et toi, tu peux me parler de Moussa, répliqua-t-elle.
– Il est adorable ce garçon, répondis-je.
Un sourire espiègle se dessina sur les lèvres d’Amina.
– Il te plaît, à ce que je vois.
– On dirait bien. Tu sais, je l’ai même invité chez moi pour dîner un soir, et il était venu accompagné de Ilyan. Ils formaient un duo si charmant, tu n’imagines même pas.
– Fatma est amoureuse, plaisanta Amina.
– Oui, et au moins, je l’assume pleinement.

POINT DE VUE DE MOUSSA.

13h15.
Les pensées de Fatma occupaient la majeure partie de ma journée, semblant tisser un lien invisible entre nos âmes. Inlassablement, j’avais tenté de la joindre, mais mes appels demeuraient sans réponse. Sa présence me manquait cruellement, ses mots et son sourire m’étaient indispensables.
Portant mon téléphone comme un précieux talisman, je dévalai les rues jusqu’à atteindre la paisible rive. Là, assis sur un banc solitaire, je contemplai le spectacle enchanteur de la mer baignée par la lueur argentée de la demi-lune, tandis que les étoiles scintillaient dans le firmament. Des couples s’étreignaient, des groupes d’amis riaient aux éclats et des familles profitaient de ce doux soir d’été.

Pourtant, cette sérénité ambiante ne faisait qu’accroître mon envie inextinguible d’entendre la voix de Fatma. D’un geste empreint de détermination, je pris mon téléphone et composai une fois de plus son numéro, espérant secrètement qu’elle décrocherait.
– Allo ? résonna sa voix d’une tonalité froide.
– Pardon de te déranger, osai-je avec précaution.
– Je suis contrariée, murmura-t-elle.
– Qu’est-ce qui ne va pas ? m’enquis-je, cherchant à percer le mystère de son chagrin.
– Ce n’est pas important, répondit-elle dans un soupir.
– Sache que je suis désolé si j’ai causé du tort, fis-je avec sincérité.
– Ce n’est pas de ta faute. Pourquoi m’appelles-tu maintenant ? demanda-t-elle.
– J’avais simplement besoin d’entendre le son de ta voix, avouai-je, sachant pertinemment que ce n’était peut-être pas le bon moment.
Le silence s’évanouit dans l’air, enveloppant notre conversation d’une aura d’attente.
– Fatma, que dirais-tu de passer du temps ensemble, ne serait-ce qu’un instant ? osai-je.
– Oh vraiment ? répliqua-t-elle d’un ton qui oscillait entre surprise et amusement.
– Oui, j’aimerais qu’on puisse se parler. J’ai quelque chose d’important à te confier.
– D’accord. Retrouvons-nous donc au parc, répondit-elle.
– Parfait, je t’y attendrai.
Rassuré par notre accord tacite, je rangeai mon téléphone dans ma poche et me dirigeai vers le parc.

Quinze minutes plus tard, une légère tape sur l’épaule me fit pivoter. Je découvris Fatma, les cheveux ébouriffés par la brise, et un léger rougissement animant ses joues.
– Ah, te voilà enfin, la saluai-je avec un soupçon d’excitation.
Un sourire taquin apparut sur son visage.
– Oui, me voilà.
– Approche, que je puisse contempler ton visage, l’invitai-je chaleureusement.
– Alors, que voulais-tu me dire ? demanda-t-elle, curieuse.
– Tu m’as manqué, révélai-je avec une sincérité palpable.
– Tu m’as également manqué.
– Comment s’est déroulée ta journée ? demandai-je, s’intéressant à son quotidien.
– Plutôt bien. Et toi ? répliqua-t-elle.
– Différemment, avouai-je en cherchant les mots justes.
– Pourquoi donc ? s’enquit-elle, intriguée par ma réponse.
– Parce que tu occupes mes pensées de manière incessante, déclarai-je avec une sincérité troublante.
– Ah bon, murmura-t-elle, laissant planer une légère tension dans l’air.
– Oui, Fatma. Ces derniers temps, je ressens des émotions que je ne peux expliquer. C’est comme si quelque chose d’exceptionnel s’éveillait en moi. Avec toi, je me sens extraordinairement à l’aise, libre d’être moi-même. Nous n’avons peut-être pas passé beaucoup de temps ensemble, mais cela suffit pour que je sache que je te veux dans ma vie. Je ne pouvais garder ce secret pour moi. Je t’aime réellement, Fatma.
Un silence pesant emplissait l’air, comme suspendu entre espoir et désespoir. Je sentais chaque seconde s’étirer, attendant anxieusement que Fatma prononce ne serait-ce qu’un mot.
Mes paroles, empreints d’une vulnérabilité palpable, avaient créé un précipice entre nous, un gouffre qui menaçait de nous séparer à jamais.
– Dis quelque chose, s’il te plaît, lançai-je, espérant que ces simples mots puissent briser le silence qui nous enserrait.
Le temps semblait s’étirer à l’infini, alors que Fatma gardait le silence, son visage impénétrable. Les doutes m’assaillaient, me torturant de questions sans réponses. Qu’est-ce qu’une fille aussi exceptionnelle que Fatma trouverait en moi ? Étais-je destiné à être éternellement privé du bonheur qui semblait toujours m’échapper ?
Soudain, la main de Fatma se posa légèrement sur mon épaule, ses yeux plongeant dans les miens avec une intensité troublante. Et puis, enfin, les mots tant attendus s’échappèrent de ses lèvres :
– Je suis tombée amoureuse.
Un frisson d’incrédulité parcourut mon être alors que j’essayais d’assimiler cette révélation.
– D’une autre personne ? balbutiai-je, prêt à accepter ma défaite, à voir mes espoirs réduits en cendres.
Mais Fatma secoua la tête avec douceur.
– Non, de toi, Moussa. Je suis tombée amoureuse de toi.
Un flot d’émotions contradictoires m’envahit. L’étonnement céda rapidement la place à une joie pure et débordante. Elle ressentait la même attraction que moi, elle partageait mes sentiments.
– Vraiment ? m’échappai-je, un sourire incrédule se dessinant sur mon visage.
Un sourire lumineux illuminait le visage de Fatma.
– Oui, vraiment.
Les barrières qui nous séparaient s’effondrèrent en un instant, libérant une vague de bonheur indescriptible. Je sentis un poids s’élever de mes épaules, remplacé par l’euphorie de savoir que Fatma m’aimait en retour. Les mots s’échappèrent de ma bouche, portés par un torrent d’émotions profondes.
– Fatma, je t’aime aussi. Je veux passer ma vie à tes côtés, partager chaque instant avec toi.
Son regard se fit plus tendre, empreint d’une confiance renouvelée.
– Moi aussi, Moussa. Je veux être avec toi.
Le destin avait finalement souri à notre histoire, unissant nos cœurs dans une danse enivrante, où chaque mot murmuré était une déclaration d’amour éternel.

Dans l’étreinte enivrante de ce moment d’extase, je me délectais de l’écho harmonieux de nos cœurs en fusion. Le bonheur débordait de chaque fibre de mon être, une béatitude ineffable qui trouvait son apogée dans les bras de celle qui illuminait ma vie. Je me perdais dans ses prunelles étincelantes, captivé par la profondeur de son regard.

Le souffle coupé, je parcourus délicatement les contours de son visage de mes mains, caressant chaque courbe avec tendresse. Nos lèvres, complices dans cette danse amoureuse, se cherchaient avec une ardeur infinie. Je me laissai submerger par la douceur de son étreinte, le parfum envoûtant qui émanait d’elle m’emportant vers des horizons inexplorés.
Un frisson d’extase parcourut mon être alors que nos corps se rapprochaient intimement. Nos souffles entremêlés témoignaient de la fusion de nos âmes, de l’union de nos destins qui s’entrelaçaient avec une magie envoûtante.
– Ma joie est indescriptible, murmurai-je, mes yeux se perdant dans l’infini du ciel étoilé.
– Tu n’es pas le seul à ressentir cela, répondit-elle, se blottissant contre ma poitrine.

POINT DE VUE DE ILYAN.

16h00.
Les vacances de Pâques s’étiraient déjà, comme un fil de soie aux reflets chatoyants. J’avais choisi de me confiner dans ma chambre, emprisonné par les mondes fantastiques des films de science-fiction. Malgré ce retrait solitaire, mes amis me manquaient cruellement. Notre complicité était si profonde, si enracinée, que passer ne serait-ce qu’une journée sans leur présence était une véritable épreuve.
Soudain, un frôlement léger se fit entendre à ma porte, rythmant l’air ambiant de son timbre délicat.
– Qui est-ce ? demandai-je.
– C’est moi, Moussa, répondit une voix familière.
– Entre, l’invitai-je, impatient de découvrir ce qui avait poussé Moussa à me rendre visite en ce jour tranquille.
Il fit son apparition, s’installant devant moi avec un sourire bienveillant qui éclairait son visage.
– Comment vas-tu, Moussa ? questionnai-je.
– Je vais très bien, répondit-il. J’ai une bonne nouvelle à t’annoncer.
Mon intérêt se raviva instantanément, curieux de connaître cette nouvelle qui semblait le remplir de joie.
– Une bonne nouvelle ? lançai-je, mes yeux s’animant d’une lueur avide.
– Fatma et moi, nous sommes désormais ensemble, annonça-t-il avec une fierté discrète.
Un éclat d’excitation parcourut mon être tout entier.
– Vraiment ? m’écriai-je, incapable de contenir ma joie.
– Oui, confirma-t-il avec un sourire rayonnant.
– C’est absolument fabuleux. Tu dois être aux anges, m’émerveillai-je, partageant sa joie avec une émotion palpable.
Pendant un instant, nous nous sommes enveloppés dans une bulle d’allégresse, laissant les rires et les éclats de bonheur s’élever jusqu’aux confins du ciel.
– Nous devons célébrer cela, m’exclamai-je avec enthousiasme. Attends-moi ici, je vais chercher des glaces qui feront écho à la douceur de votre bonheur.
Un sourire complice illumina son visage.
Je descendis d’un pas décidé dans la cuisine, mon regard se posa sur le congélateur de ma mère. D’un geste assuré, j’ouvris ses portes, saisissant deux glaces. Le congélateur refermé, je remontai les escaliers, retrouvant Moussa dans ma chambre.
– Voici ton trophée, déclarai-je, lui tendant une glace. Maintenant, raconte-moi tout. Depuis le début. Je veux savoir comment cela s’est déroulé, insistai-je.
Il acquiesça et se lança dans le récit, dévoilant chaque étape avec une précision captivante, du premier échange de regards jusqu’au fameux baiser qui avait scellé leur destinée.
– Je vous souhaite tout le bonheur du monde, murmurais-je, touché par la profondeur de leurs émotions.
– Merci infiniment, répondit-il, son regard brillant de reconnaissance. Et toi, où en es-tu avec Amina ?
Un soupir s’échappa de mes lèvres.
– Hier, je l’ai invitée à déjeuner. Puis nous avons décidé de passer l’après-midi à la plage, commençai-je, laissant planer un suspens léger.
– Et ensuite ? s’enquit-il, captivé par le dénouement imminent.
– Ce qui devait arriver arriva, avouai-je.
– Sérieusement ? s’exclama-t-il.
– Oui. Et Fatma nous a surpris, confessai-je, mon ton se faisant plus sérieux.
Moussa éclata de rire, une réaction qui m’agita légèrement.
– Au moins, Fatma était de ton côté. Mais depuis lors, tu n’as pas parlé à Amina ?
– Je ne laisserai pas tomber, affirmai-je.
– Ne baisse pas les bras, soutint-il, s’allongeant sur le lit d’un air détendu. Alors, quel film allons-nous regarder maintenant ?
– Le labyrinthe, répondis-je.
Dans cet instant de complicité et d’amitié, nous nous laissions emporter par les images en mouvement, nous évadant dans un monde imaginaire qui se mêlait harmonieusement à nos propres histoires.

Chapitre 6

« Et quand le cœur aime quelque chose, les yeux le voit comme le paradis. »

POINT DE VUE DE LAÏCHA.

16h20.
Les vastes murs de ma demeure renvoyaient des échos silencieux alors que je me trouvais seule. Moussa avait entrepris un congé pour rendre visite à son ami Ilyan, tandis que ma mère, luttant vaillamment pour subvenir à nos besoins, était prise par ses responsabilités professionnelles.
Je me dirigeai d’un pas lourd vers la cuisine, espérant trouver une parcelle de réconfort dans une tasse de café. Cependant, aucun breuvage ne pouvait apaiser le tourbillon de pensées qui tourmentait mon esprit. Les remords me submergeaient, alimentant ma culpabilité face à Amar. Comment avais-je pu lui infliger une telle douleur ? Ses sentiments sincères à mon égard auraient mérité une réponse différente. Les paroles avisées de Ilyan résonnaient dans mon esprit, me murmurant que le temps était venu de tout recommencer, de rectifier mes erreurs. Mais comment pourrais-je me racheter ? Je déposai la tasse vide sur la table, résolue à chercher un peu d’air frais pour éclaircir mes pensées.

Le vent marin m’appelait, et la plage se dressait devant moi comme un refuge serein, une toile vierge où je pourrais réécrire mon destin. Je m’engageai sur le chemin solitaire, les mains croisées, contemplant les vagues fougueuses et les grains de sable scintillants. La plage, tel un aimant, attirait les âmes en quête de libération et les corps assoiffés de baignades rafraîchissantes. Les doux rayons du soleil caressaient ma peau, emplissant l’air d’une atmosphère vibrante de liberté. C’est à ce moment précis qu’un garçon au teint clair et à la taille modeste se dressa devant moi, tel un ange apparaissant au seuil de mon chemin solitaire.
– Salut, murmura-t-il d’une voix envoûtante. Tu te trouves seule en ce lieu enchanteur ?
Mon regard se posa sur lui, mêlant méfiance et curiosité. Néanmoins, l’étincelle de son charme me poussa à engager une conversation.
– Oui, répondis-je d’une voix légèrement tendue.
Un sourire se dessina sur son visage, éclairant ses traits d’une lueur chaleureuse.
– Peut-être pourrions-nous partager un moment ensemble ? suggéra-t-il.
Je sentis mon cœur hésiter, balançant entre la prudence et l’attraction naissante.
Finalement, je cédai à l’appel de l’aventure et décidai de le suivre incertaine.
Il me guida vers un lieu insoupçonné, un recoin secret où le parfum de l’océan se mêlait à l’arôme envoûtant du café fraîchement préparé.
– Mon nom est Cherif, avoua-t-il en me regardant avec le sourire.
– Laïcha, répondis-je.
– Alors, où réside-tu ? m’interrogea-t-il, ses yeux plongeant dans les miens.
– Pas loin d’ici, répondis-je, laissant planer un voile de mystère autour de ma demeure.
Un sourire malicieux éclaira son visage alors qu’il partageait avec moi sa proximité géographique. Nous découvrîmes alors que nos chemins se croisaient bien plus souvent que je ne l’aurais imaginé.
– Moi aussi, j’habite dans ce quartier, révéla-t-il. Je fréquente le lycée du coin, en terminale, spécialisation en gestion.
L’étonnement se peignit sur mon visage.
– Dans la même classe que Ilyan ?
– Ah, tu connais Ilyan ? s’exclama-t-il, surpris par cette révélation.
– C’est mon ami, répondis-je ouvertement.
– Nous sommes dans la même classe et le même groupe, répondit-il.
Mon esprit s’embrasa de questions. Était-ce le fruit du destin ou une intervention subtile de Ilyan qui avait orchestré cette rencontre ? Peu importait, car en cet instant, je me laissai bercer par l’intrigue et la douceur de ce nouveau compagnon de route.

Cependant, le temps avait filé entre nos doigts, et il était l’heure de rentrer chez moi. Me levant, je le remerciai chaleureusement pour cette parenthèse enchantée. Une proposition s’envola de ses lèvres : m’accompagner jusqu’à mon domicile. Bien que l’idée de le laisser franchir cette frontière intime m’effleura l’esprit, je me sentis étrangement en confiance à ses côtés.

Ensemble, nous marchâmes dans les rues familières, laissant les étoiles nous guider vers ma demeure. Je lui indiquai l’adresse avec précaution, et dans un élan d’audace, je lui confiai mon numéro de téléphone.

Lorsque j’arrivai chez moi et me préparai à monter les escaliers vers ma chambre, une voix familière résonna dans l’air, me faisant brusquement tourner la tête.
– C’était qui, ce garçon ? demanda ma mère.
Je me tournai lentement, face à ma mère dont les yeux perçants semblaient sonder mon âme.
– C’est un ami, maman, répliquai-je d’une voix que je voulais calme et assurée, bien que les battements frénétiques de mon cœur trahissaient ma nervosité.
Un silence pesant s’installa, rempli de non-dits et d’interrogations muettes.
– Un ami ? répéta-t-elle, sa voix teintée de scepticisme.
– Oui, maman. Nous sommes camarades de classe au lycée, dis-je, cherchant à tempérer ses soupçons. Nous nous sommes rencontrés aujourd’hui à la plage, et il a été aimable en me proposant de m’accompagner.
Ma mère plongea son regard profond dans le mien, sondant mes pensées et mes émotions. Finalement, un soupir d’acceptation s’échappa de ses lèvres.
– Si tu le dis.
Prenant une grande inspiration, je m’éclipsai de sa présence et me dirigeai vers ma chambre.

POINT DE VUE DE AMINA.

20h00.
L’après-midi passé avec Fatma avait été d’une exquise douceur, empreinte de cette complicité unique qui nous unissait depuis toujours. Les rires et les plaisanteries s’étaient mêlés harmonieusement, comme dans les jours bénis de notre jeunesse insouciante.

Dans l’intention délibérée d’éviter une rencontre gênante avec Junior, dont les sombres secrets avaient été révélés par Fatma, j’avais prolongé notre soirée jusqu’à une heure tardive chez elle. Autour d’une délicieuse pizza partagée, nous avions dévoré les derniers potins et discuté passionnément de l’amour naissant dans la vie de Fatma.

Le doux murmure de mon téléphone interrompit brusquement notre harmonie. Mon regard se posa sur l’écran illuminé, révélant le nom de Ilyan. Fatma et moi échangions un sourire complice, avant d’être pris d’un fou rire contagieux.
– Qu’est-ce que tu attends pour répondre ? me taquina Fatma, ses yeux pétillants d’excitation.
Une réticence m’envahit, un désir de garder mes distances avec Ilyan, du moins pour l’instant.
– Je n’ai guère l’envie de lui parler pour l’instant, avouai-je.
Fatma posa sa main chaleureuse sur la mienne.
– Amina, cesse de te faire des idées et réponds-lui. Tu ignores la raison de son appel.
Sa voix douce et raisonnable me fit réfléchir. Elle avait raison, je ne pouvais pas continuer à esquiver les conversations avec Ilyan sans connaître ses véritables intentions.
Au moment où j’allais répondre à l’appel, il se coupa brusquement. Perplexe, je reposai mon portable et reportai mon regard sur Fatma. Ses yeux reflétaient autant d’incompréhension que les miens.
– Ne me regarde pas ainsi. Je ne sais pas ce qui t’arrive, déclara-t-elle.
Je me levai du lit, attrapai mon sac et me préparai à partir. Un baiser délicat sur la joue de Fatma, accompagné d’un bref « au revoir », scella notre séparation momentanée.

Je quittai la maison, mes mains engourdies glissées dans les poches de ma veste. Marchant paisiblement dans la rue, une sensation d’insidieuse présence m’envahit. Je me retournai et aperçus un homme vêtu de noir, dissimulé sous une capuche. Son visage demeurait invisible, seuls ses yeux perçants transparaissaient. Une terreur s’empara de moi et mes jambes s’emballèrent instinctivement, m’incitant à fuir.

Je me retrouvai, sans bien comprendre comment, à l’intérieur de la demeure de Ilyan. Comment avais-je atterri ici ? Aucune réponse ne se profilait à l’horizon. D’un côté, l’idée de rester dans cette maison m’était désagréable, tandis que de l’autre, une appréhension profonde me retenait de sortir.

POINT DE VUE DE ILYAN.

20h15.
Le repas familial s’était conclu, et cherchant un répit dans le jardin, je m’évadais dans l’atmosphère apaisante de l’air pur qui y régnait. Les effluves de la nature m’enveloppaient, tandis que le souffle bienfaisant du vent chuchotait une mélodie rassurante à mes oreilles.

Soudain, un bruit émana de la porte, captant mon attention aiguisée. Je m’élance prestement pour voir ce qu’il en était.
Je découvre une silhouette féminine, figée dans l’obscurité. Incapable de distinguer ses traits dans le crépuscule, je m’approche d’elle avec précaution, désireux de lui apporter soutien.
– Excusez-moi, dis-je d’une voix empreinte de sollicitude.
Un court instant s’écoule, suspendu dans l’air, avant qu’elle ne se retourne enfin, révélant ainsi son visage à mes yeux ébahis.
– Amina ! Que fais-tu ici ? m’échappe spontanément, surpris.
Son regard, teinté de détresse, se fixe sur moi, témoignant de la profondeur de ses tourments.
Dans l’obscurité enveloppante de la nuit, je serrais Amina contre moi, offrant mon étreinte comme un bouclier contre ses peurs. Les mots peinaient à franchir ses lèvres, emprisonnés dans le poids de sa terreur indicible.
– Que…quel…quelqu’un me suivait, parvint-elle enfin à murmurer d’une voix tremblante.
Je maintenais ma prise réconfortante autour d’elle, mes doigts caressant doucement ses cheveux dans une tentative de réconfort.
– Quelqu’un ? répétais-je à voix basse. Ne crains rien, c’est terminé maintenant.
Mon regard s’ancrait dans le sien.
– Viens, rentrons à l’intérieur pour que tu puisse retrouver ton calme.
– Ma mère doit m’attendre, souffla-t-elle avec une urgence palpable. Je dois rentrer.
– Je t’accompagne alors, répondis-je promptement. Donne-moi un instant.
Un sourire timide se dessina sur ses lèvres, transmettant une gratitude muette. Je m’éclipsai rapidement vers ma chambre, récupérant un pull-over pour chacun d’entre nous. Le vent glacial mordait l’air, et je voulais qu’elle se sente protégée, enveloppée de chaleur.
– Tiens, mets ceci, lui dis-je tendrement en lui tendant le pull-over. La nuit est froide, et cela t’aidera à te réchauffer.
– Merci, répondit-elle.

Nous sortîmes dans les rues paisibles du quartier, baignées dans une tranquillité profonde. Les pas feutrés résonnaient sur le pavé, entremêlés avec le murmure lointain des chiens, comme une mélodie apaisante au sein de la nuit.

POINT DE VUE DE AMINA.

20h30.
J’ai marché aux côtés de Ilyan, tandis qu’un sentiment de sécurité profonde m’envahissait. Fatma avait discerné avec justesse l’intensité de mes émotions. Pourtant, malgré cette certitude, j’ai ressenti une appréhension à l’idée de me lancer dans une nouvelle relation. L’étreinte de son pull, porteur de son parfum envoûtant, m’a plongée dans une quiétude absolue, comme si sa présence enveloppait chaque fibre de mon être.

Il m’arracha à mes pensées, me rappelant que nous avions atteint le seuil de ma demeure. D’un geste délicat, il sonna à la porte. Après quelques battements de cœur palpitants, ma mère se présenta devant nous, son visage empreint d’une inquiétude palpable.
– Amina ? Où étais-tu jusqu’à cette heure tardive ? s’enquit ma mère.
Ilyan prit la parole à ma place, répondant avec une aisance naturelle.
– Elle se trouvait chez son amie, Fatma. Comme il se faisait tard, j’ai décidé de l’accompagner.
Un sourire s’épanouit sur les lèvres de ma mère, avant qu’elle ne me serre tendrement dans ses bras.
– Merci de m’avoir ramenée ma fille adorée, lança ma mère à Ilyan.
Je pénétrai dans la maison et me dirigeai directement vers ma chambre. Là, je m’allongeai sur le lit, toujours enveloppée par le doux réconfort du pull de Ilyan. Mes pensées étaient empreintes de sa présence, et je me laissai aller à la quiétude qu’il avait insufflée en moi.

Chapitre 7

« Puissiez-vous trouver quelqu'un qui a prié toute sa vie pour vous trouver. »

POINT DE VUE DE SOPHIE.

09h05.
D’un pas pressé, je descendis les escaliers à la recherche d’un peu de dose de caféine. Lorsque j’entrai dans la cuisine, je découvris ma mère assise à la table à manger, accompagnée de mon père. Le salut poli que je leur adressai fut suivi d’une brève révérence, tandis que je me hâtais de faire demi-tour, désireuse de m’éloigner de leur regard perçant. Néanmoins, ma mère me rappela avant que je ne puisse quitter la pièce.
– Sophie ! Où t’en vas-tu ainsi ? interrogea-t-elle.
– Dans ma chambre, répliquai-je d’un ton las.
Je quittai la cuisine d’un pas déterminé, mon cœur alourdi par l’inconfort persistant causé par cet homme.
Une impulsion me fit diriger vers la chambre de Ilyan.
Je le découvris allongé sur son lit, absorbé par une série télévisée. Son visage s’illumina aussitôt lorsqu’il m’aperçut, se parant d’une joie pure qui rayonnait en ses traits. Je remerciais silencieusement le destin d’avoir placé sur mon chemin ce jeune frère si aimant et attentionné. Il veillait sur moi jour après jour, ne cherchant qu’à combler mon bonheur, sans même que je n’aie à exprimer mes tourments. En lui, j’avais trouvé un confident, un pilier solide sur lequel je pouvais m’appuyer dans l’océan tumultueux de ma vie.
Je m’installai gracieusement à ses côtés, me glissant délicatement sous les draps qui nous enserraient.
– Qu’avons-nous au programme ce soir ? lançai-je d’une voix douce.
– The Blacklist, répondit-il d’un ton nonchalant.
Un soupir léger m’échappa.
– Est-ce ainsi que tu envisages de passer tes vacances ? demandai-je.
– Comment les ai-je passées ? répliqua-t-il.
Je laissai échapper un sourire en coin.
– Où est Amina ? m’enquis-je.
– Elle va bien, répondit-il d’une voix mesurée.
Mon regard chercha à percer le sien.
– Êtes-vous ensemble maintenant ? demandai-je.
– Non, murmura-t-il, ses mots glissant sur ses lèvres avec une légèreté teintée de mélancolie.
Une lueur d’empathie s’alluma dans mon regard.
– Pourquoi ? Elle ne te plaît pas ? osai-je demander.
– Évidemment que si. Mais elle ne veut pas s’engager dans une nouvelle relation, d’après ce que j’ai pu déduire, répondit-il.
Mes yeux reflétaient une compréhension silencieuse.
– Elle sort d’une relation difficile ? Je présume qu’elle a beaucoup souffert, déduisis-je, partageant mes pensées avec une empathie profonde.
– On peut dire que ce n’a pas été une période facile pour elle, confia-t-il d’une voix chargée d’émotions.
Mon regard s’emplissait de compassion.
– J’espère sincèrement qu’un jour elle t’ouvrira les portes de sa vie, exprimai-je avec une tendresse enveloppante.
– Oui, espérons, murmura-t-il.
Soudain, il capta mon état d’anxiété, son regard perçant scrutant mon visage comme pour lire mes pensées les plus intimes.
– Tu sembles stressée. Y a-t-il un problème avec papa ou maman ? demanda-t-il d’une voix douce.
Un mois s’était écoulé depuis le retour de mon père à la maison, après des batailles incessantes pour obtenir les précieux permis nécessaires à son dernier projet. Malik, malgré ses plus de cinquante ans, refusait toujours d’être rappelé à l’ordre par ma mère. Il préférait affronter une armée de bureaucrates plutôt que d’admettre qu’il avait, d’une certaine manière, laissé sa famille de côté. Il était conscient que c’était la raison pour laquelle je lui en voulais. Il n’avait pas réussi à réparer les choses. Quel genre d’homme était-il donc ? Acclamé dans le monde entier en tant qu’entrepreneur accompli, mais incapable de sauver les liens familiaux qui se dégradaient.
– Avec papa, c’est toujours ainsi, répondis-je, laissant échapper une partie de ma peine.
– Quand est-ce que vous allez enfin régler votre problème ? souffla-t-il, désirant ardemment une réconciliation.
– Ce n’est pas facile, Ilyan, murmurai-je.

Nous partagions un instant de silence, nos pensées se mêlant dans l’obscurité de la pièce. À travers son regard bienveillant, je trouvai un réconfort inattendu. Peut-être, à travers nos liens indéfectibles, trouverions-nous le courage de surmonter les épreuves qui nous attendaient.

POINT DE VUE DE MARIAM,
MAMAN DE ILYAN.

– Malik, je veux que l’on se parle, déclarai-je, mon regard fixé sur cet homme dont l’absence avaient semé tant de douleurs.
Levant les yeux de ses affaires, Malik enfilait sa veste, arborant une expression empreinte d’impatience.
– De quoi voudrais-tu me parler ? rétorqua-t-il.
– De Sophie, évidemment, répondis-je.
– Est-ce qu’elle a des ennuis ? A-t-elle besoin d’argent ? De mes hommes ? De quoi ? Tu sais que je ferais tout mon possible pour l’aider. Elle n’a qu’à demander, répliqua-t-il.
Un lourd soupir s’échappa de mes lèvres.
– Malik, tu sais bien qu’elle ne le fera jamais, confiai-je.
– Mais pourquoi, bon sang ? Je suis son père, s’exclama-t-il, déconcerté par l’incompréhension qui régnait entre lui et sa fille.
– Elle essaie de te prouver des choses. Elle pense être responsable de ton départ, parce qu’elle posait trop de problèmes, murmurai-je, dévoilant les blessures profondes qui tourmentaient l’âme de Sophie.
– Sophie est une fille excellente, commença-t-il.
– Il faut que quelqu’un arrange les choses entre vous. Il est grand temps ! Quand comptes-tu retourner ? l’interpellai-je.
– Dans quelques semaines, voire moins, si tu me dis pas de quoi il retourne, dans un langage suffisamment clair pour mon cerveau d’homme obtus ! répliqua-t-i.
– Ne le prends pas sur ce ton avec moi, répliquai-je d’une voix empreinte de fermeté.
– Mariam, s’il te plaît ! implora-t-il, réalisant l’urgence de la situation.
– Pourquoi ne l’appelles-tu pas pour parler avec elle ? proposai-je, sachant que Sophie refusait catégoriquement de prendre l’initiative.
– Elle n’acceptera jamais et tu le sais, rétorqua-t-il.
– Tu sais, c’est son anniversaire dans quelques semaines. Tu n’as jamais assisté à l’une de ses fêtes qu’elle organisait. S’il te plaît, fais l’effort d’assister à celle-ci, plaidai-je, espérant susciter en lui une étincelle de réconciliation.
– Mariam, toi-même tu sais que je n’ai pas beaucoup de temps, même pas pour moi, répliqua-t-il, saisissant ses clefs et son sac, prêt à se plonger à nouveau dans l’engrenage de son travail.

Alors que je le regardais partir, désemparée, une certitude douloureuse s’ancra en moi. Malik était véritablement prisonnier de son propre monde, laissant la fracture grandir entre lui et sa famille, telle une fissure béante dans l’édifice de nos existences entrelacées.

POINT DE VUE DE JUNIOR.

10h00, À l’école.
Les festivités pascales, déjà éclipsées, n’étaient que souvenirs lointains, tandis que mon désir brûlant se portait exclusivement sur une seule personne : Amina, son visage angélique, ses yeux ensorcelants. Comment avais-je pu sombrer dans une telle négligence ? Son absence me tourmentait, et l’ardent désir de la reconquérir s’emparait de moi. Je rêvais de la serrer contre mon cœur, de lui démontrer l’ampleur de mon amour. Hélas, les mots se figeaient dans ma gorge, inaptes à franchir mes lèvres.

Depuis notre séparation, ses paroles s’étaient tues, elle m’évitait avec obstination. Inexorablement, elle se rapprochait d’un autre garçon. Chaque pas que je tentais de faire vers elle devenait une épreuve insurmontable. Pourtant, je devais lui parler, braver les obstacles qui s’élevaient sur ma route.

Je me levai d’un pas déterminé, et m’enfonçai dans le bâtiment qui abritait mes espoirs et mes tourments. Le seuil de la salle de classe franchi, mon regard se posa instantanément sur elle, solitaire, lovée dans l’obscurité du fond. D’une démarche hésitante, je m’approchai d’elle, cherchant à percer le mur de glace qui l’entourait. Lorsque mes mots tentèrent de franchir mes lèvres, elle arbora une expression de surprise teintée de froideur.
– Qu’est-ce que tu me veux ? m’assaillit-elle d’une voix cinglante.
– Je désire simplement échanger avec toi.
– Je t’accorde deux petites minutes.
– Amina, s’il te plaît, écoute-moi sérieusement.
– Une minute cinquante secondes, me coupa-t-elle avec une ironie mordante.
– Bien. Amina, je souhaite sincèrement exprimer mes regrets, te présenter mes plus profondes excuses pour t’avoir laissé tomber. Je te demande pardon, et aspire à ton retour à mes côtés. Je t’assure, par tout ce qui est sacré, que je ne réitérerai pas les mêmes erreurs.
Son regard se fit ferme.
– As-tu fini ? m’interrompit-elle d’un ton glacial.
– Oui, Amina, je t’en prie…
– Je te pardonne, mais notre histoire est terminée, déclara-t-elle en se levant avec grâce. Excuse-moi, je dois poursuivre mes cours.
Elle m’abandonna seul dans la pièce, tandis que les regards des élèves se posaient sur moi, témoins silencieux de ma détresse palpable.

POINT DE VUE DE ILYAN.

12h00.
Les aiguilles de l’horloge se rejoignirent en un parfait alignement sur le douze, signalant l’heure fatidique du déjeuner. Une ambiance joviale régnait autour de la table, vibrant d’une complicité taquine.
– Muhamed, je t’en prie, arrête tes blagues, lâcha Ramatoulaye. Cela ne fait rire personne.
Un éclat de rire collectif embrasa la pièce, animant nos échanges tandis que nous partagions ce repas en commun.
– Comment se sont déroulées les fêtes chez vous ? m’enquis-je ouvertement.
– Pour ma part, confia Aicha, j’ai passé des bons moments entourée de ma famille et de mes amies.
– Les miennes se sont plutôt bien déroulées, révéla Libasse. J’ai profité de l’occasion pour rendre visite à mon grand-père, vivant à quelques kilomètres d’ici.
– Pour ma part, soupira Ramatoulaye, je suis restée cloîtrée chez moi, me laissant absorber par les histoires captivantes des feuilletons télévisés.
– Rien de bien extraordinaire de mon côté, s’empressa d’ajouter Muhamed. J’ai saisi l’opportunité pour explorer les trésors que renferment les musées éparpillés à travers la ville.
– Et moi, s’enorgueillit Cherif avec un air jovial, j’ai fait la rencontre d’une jeune filles ravissante.
– Formidable ! m’exclamai-je, enthousiasmé par ces récits.
– Et toi, comment se sont déroulées tes fêtes ? m’interrogea Cherif.
– Moi ? Je me suis retrouvé prisonnier de ma chambre, avouai-je avec une pointe d’ironie.
Un éclat de rire général accompagna ma réponse lorsque soudain, une personne, débordant de colère, se dirigea rageusement vers moi.
– Ilyan ! Viens immédiatement ici ! tonna-t-il.
Mes amis se dressèrent d’un bond pour faire barrage à sa progression, formant une barrière protectrice autour de ma personne.
– Qu’est-ce qu’il se passe ? m’enquis-je, perplexe.
– Ignores-tu la situation ? Vraiment ? s’exclama-t-il, abasourdi.
– Je ne sais pas de quoi il s’agit, répliquai-je d’un ton empreint d’innocence.
– Je t’ordonne de laisser Amina tranquille, comprends-tu ? Elle m’appartient. Amina ne ressent rien pour toi. Laisse-la en paix, vociféra-t-il avec une colère palpable.
Un sourire mesquin se dessina sur mes lèvres alors que je me rassis gracieusement sur ma chaise.
– Je suis navré, mais tu n’as pas à t’adresser à moi, rétorquai-je d’un ton calme.
Son regard étincelait de fureur alors qu’il s’éloignait brusquement, frustré par son impuissance.
Mes compagnons retrouvèrent leurs places, s’éloignant peu à peu de cette confrontation tendue.
– Mais qui est donc cet individu ? s’enquit Cherif, la curiosité piquée à vif.
– C’est l’ancien compagnon d’Amina, lui répondis-je simplement.
– Vraiment ? s’étonna Ramatoulaye.
– Oui, avouai-je.
– Pourquoi cherche-t-il à t’éloigner d’elle ? demanda Muhamed, perplexe.
– Voilà une question à laquelle il devrait répondre, affirmai-je.
Un léger sourire flotta sur mes lèvres alors que Aicha émit un commentaire perspicace.
– Amina doit vraiment être extraordinaire, remarqua-t-elle.
– Pourquoi dis-tu cela ? m’enquis-je.
– Vous vous battez littéralement pour elle, fit-elle remarquer.
Un rictus fugace anima mon visage.
– Je ne me suis pas battu, précisai-je.
– Peut-être pas physiquement, répliqua-t-elle.
– Parler du loup, voilà qu’apparaît sa queue, lança Libasse avec malice.
Je me retournai vivement et aperçus Amina qui s’avançait vers moi, son visage illuminé par un sourire radieux.

POINT DE VUE DE AMINA.

12h30.
Après le cours de philosophie, une ambiance singulière flottait dans l’air. Fatma était étrangement absente de l’école aujourd’hui. Son absence laissait un vide en moi.
Mes yeux se posèrent de l’autre côté de la cour, où se tenait Ilyan, accompagné de sa bande. Depuis le jour où il avait fait preuve d’une étonnante gentillesse en me raccompagnant chez moi, un silence pesant s’était installé entre nous. Je me levai et m’avançai d’un pas déterminé pour le rejoindre.

Lorsque Ilyan se retourna et croisa mon regard, un sourire énigmatique s’esquissa sur ses lèvres. Je m’approchai du groupe avec une certaine grâce, me joignant à leur cercle.
– Bonjour à tous, lançai-je en m’asseyant parmi eux.
– Bonjour, répondirent-ils d’une même voix.
Ilyan prit l’initiative de les présenter tour à tour.
– Les amis, je vous présente Amina, une amie à moi. Amina, voici Muhamed, Aicha, Ramatoulaye, Libasse et Cherif, déclara-t-il, désignant chaque individu d’un geste élégant.
Un sentiment de bienveillance m’envahit.
– Je suis ravie de faire votre connaissance, prononçai-je avec une douceur feutrée.
– L’enchantement est partagé, répondit Ramatoulaye.
Je lançai un regard à Ilyan, lui signifiant que j’avais besoin de lui parler en privé.
– Ilyan, puis-je t’emprunter quelques instants à l’écart ? murmurai-je avec une délicatesse.
Il acquiesça d’un mouvement de tête et se leva, me suivant docilement vers un endroit plus retiré, à l’abri des oreilles indiscrètes.
Je pris une profonde inspiration avant de m’adresser à lui d’une voix douce.
– Il est une invitation que je souhaite te faire part, Ilyan, confiai-je avec une certaine hésitation. Je t’invite à venir chez moi, demain soir. Ma mère serait enchantée de te rencontrer.
Il prit un moment de réflexion avant de me répondre.
– Je ne saurais décliner une telle invitation, déclara-t-il.
– Je vous en suis sincèrement reconnaissante, murmurai-je.
Un léger sourire se dessina sur ses lèvres.
– C’est avec un réel plaisir, ajouta-t-il.
L’idée de le voir franchir le seuil de ma demeure, de partager un moment en compagnie de ma mère, éveillait en moi un tourbillon d’émotions indescriptibles.

POINT DE VUE DE LAÏCHA.

12h40.
Après avoir terminé ma journée de cours, je me retrouvai seule, le poids de la fatigue se faisant sentir dans chacun de mes pas. Une envie irrésistible de rentrer chez moi en solitaire m’envahit, m’offrant une rare parenthèse de tranquillité. Alors que je m’approchais de la porte de sortie, mon regard fut irrémédiablement attiré par la présence de Ilyan, entouré de sa bande d’amis. Parmi eux, Cherif se démarquait, son visage illuminant la scène de sa présence. Je me dirigeai vers eux avec discrétion.
– Quelle est la nature de cette réunion ? lançai-je.
Un sourire chaleureux se dessina sur les lèvres de Ilyan, manifestant à la fois sa surprise et sa joie de me voir.
– Eh bien, chère Laïcha, comment te portes-tu ? demanda-t-il avec bienveillance.
– Je vais plutôt bien, répondis-je en adressant un regard complice à Cherif. Et toi, Cherif, comment vas-tu ?
Cherif, rayonnant d’une aura positive, répondit avec une énergie contagieuse :
– Tout va à merveille, merci.
Un échange de regards complices se fit entre nous deux.
– Vous vous connaissez ? interrogea Ilyan, surpris.
– Nous nous sommes croisés lors des vacances, révélai-je. Il m’a dit que vous étiez dans la même classe.
– Ah, je vois, articula-t-il avec malice.
Une idée audacieuse me vint à l’esprit.
– Cherif, serais-tu prêt à m’accompagner ?
Sans hésitation, Cherif se leva, saluant ses amis d’un geste gracieux. Puis, prenant ma main avec une délicatesse révélatrice, il se prépara à quitter le cercle d’amis pour s’aventurer avec moi.

Chapitre 8

« Tu es la première personne à qui j'ai montré mon cœur et tu es la raison pour laquelle personne ne le reverra jamais. »

POINT DE VUE DE FATMA.

21h00.
La journée avait défilé sans que je mette le pied dehors, confinée dans ma demeure. Une pensée m’effleura l’esprit : il y avait toujours eu ces hommes, rares et précieux, qui m’avaient aimée sans condition. Mon père, empreint d’une bienveillance paternelle, en faisait partie, de même que mes frères. Au fil de mes pas, je tirai mon téléphone portable de ma poche et composai le numéro d’un quatrième homme, Moussa.
À la deuxième sonnerie, il décrocha.
– Salut, je ne m’attendais pas à recevoir ton appel ce soir, s’exclama-t-il.
– La maison est vide, et je me sens en quête de compagnie. Es-tu disponible ? demandai-je.
– Je peux l’être. Je suis en train de finaliser un projet, mais je peux rapidement prendre une douche et être prêt dans une demi-heure. Souhaites-tu que nous nous retrouvions quelque part ? répondit-il d’un ton chaleureux.
Cette proposition suscita une réflexion en moi. Je ne pouvais m’empêcher de songer aux étincelles qui avaient jailli entre nous depuis que nous avions entamé notre relation. Malgré la connaissance de mes propres intentions pour l’avenir, un désir irrésistible de découvrir où ces étincelles nous mèneraient s’empara de moi.
– Et si je venais chez toi ? J’aimerais beaucoup observer ton travail, suggérai-je.
Une longue hésitation se fit sentir dans sa voix, comme s’il était conscient que mes intentions dépassaient le simple intérêt pour son travail.
– Es-tu réellement sûre de ce que tu désires ? Une rencontre entre nous deux, dans l’intimité, peut s’avérer dangereuse, articula-t-il.
– Ce soir, je suis en proie à une audace débordante. Prends une douche rapide. Je serai chez toi dans vingt minutes, ripostai-je.
Son rire s’éleva dans l’air.
– Est-ce donc nécessaire que je m’habille ? plaisanta-t-il.
– Bien sûr, rétorquai-je, amusée par son impatience grandissante. Gardons au moins l’illusion d’une visite innocente.
– Fatma, Fatma, marmonna-t-il. Qu’est-ce qui te traverse l’esprit ?
– Maman dirait que j’ai le feu sacré en moi, mais j’aime à croire que, pour une fois depuis le début de notre histoire, je viens simplement chercher ce que je convoite, déclarai-je.
– Et ce que tu désires, c’est moi ? interrogea-t-il.
– Oui, répondis-je. Peux-tu l’accepter ?
– J’en suis capable, pourvu que tu me promettes de ne rien regretter par la suite, assura-t-il.
– Il n’y aura aucun regret, promis-je. Et toi, le pourras-tu ?
– Si des regrets se font sentir, je trouverai le moyen de vivre avec, confia-t-il. Je te veux, Fatma. Je t’ai toujours désirée et je te désirerai toujours.
Un sourire lumineux éclaira mon visage. Ces mots, précieux et sincères, résonnaient en moi comme une mélodie envoûtante.

POINT DE VUE OMNISCIENT.

21h30.
La porte de l’appartement s’ouvrit lentement, laissant apparaître Moussa dans toute sa splendeur. Il était vêtu d’un simple jean, dont les boutons étaient encore défaits, et aucune autre parure ne venait dissimuler son torse musclé et ses abdominaux sculptés. Ses cheveux humides exhalaient un parfum envoûtant de savon frais. Un frisson parcourut le corps de Fatma, qui lutta pour ne pas se précipiter dans ses bras avant même que la porte ne se referme.
– Tu es éblouissant, murmura-t-elle, ses yeux fixés sur son apparence irrésistible.
Comment pouvait-il maintenir une telle condition physique, lui qui passait la majorité de ses journées devant un écran d’ordinateur ? Un mystère qui amplifiait son charme magnétique.
Les regards brûlants de désir, Moussa referma la porte derrière elle et la pressa contre le mur, scellant leur intimité.
– Toi aussi, tu rayonnes, chuchota-t-il en repoussant une mèche de cheveux pour déposer de tendres baisers sur son cou délicat. Et ton parfum… il m’enivre totalement.
Sa langue caressa délicatement sa peau, provoquant chez Fatma une sensation de chaleur qui se propagea de la tête aux pieds. Elle sentait le désir monter en elle, bouillonnant et insatiable.
– Tu as un goût exquis, murmura-t-il d’une voix rauque qui fit frissonner Fatma de plaisir.
Débordant de sensations intenses, Fatma avait du mal à rester debout. Elle posa les mains sur les épaules de Moussa, puis les retira brusquement. Sa peau était brûlante, lisse et irrésistible. Tout cela allait bien trop vite et en même temps, pas assez. Après la journée qu’elle venait de vivre, elle ne souhaitait qu’une chose : se laisser emporter par la passion, abandonner tous les doutes et les contraintes.
Elle remarqua la lueur amusée qui dansait dans les yeux de Moussa lorsqu’elle prit ses distances. Bien sûr, avec la porte derrière elle, elle ne pouvait reculer bien loin.
Plongeant son regard dans le sien, Moussa l’encouragea à poser une main sur son épaule et l’autre sur son torse.
– Reste, chuchota-t-il. J’adore quand tu me touches. Cela fait naître en moi des idées indécentes, toutes plus enivrantes les unes que les autres.
Fatma arborait une expression faussement sévère.
– Et on renonce à cette visite innocente ?
Immobile, Moussa ne la quittait pas des yeux, son regard empreint d’une intensité captivante.
– C’est à toi de décider, répondit-il.
la chaleur et l’odeur masculine de son corps si près d’elle, Fatma sut qu’elle ne pouvait se détourner de lui, qu’il était vain de prétendre le contraire. Elle n’était plus cette jeune fille timide et maladroite, mais une fille épanouie qui connaissait ses désirs, du moins lorsqu’il s’agissait de passion. Ce soir-là, en tout cas.
Sans prononcer un mot, elle se hissa sur la pointe des pieds et scella leurs lèvres dans un baiser ardent. Ses mains se rejoignirent derrière la nuque de Moussa tandis qu’elle pressait son corps contre le sien, captant la fermeté de ses muscles virils, chaque mouvement éveillant en elle un désir brûlant.
Le baiser prit fin, les laissant tous deux à bout de souffle, leurs regards troublés par l’intensité du désir qui les consumait.
– Je pense que cette occasion nécessite un peu plus de romantisme et de finesse.
Elle refusa d’un signe de tête sans le quitter des yeux.
– Quelque chose à grignoter ?
Elle déclina l’offre de nouveau.
– Chandelles ?
– Seulement toi, dit-elle en le poussant gentiment.
– Eh bien, tu ne pourras pas me refuser si je fais ça, dit-il en la soulevant dans ses bras.
Fatma se pelotonna contre la chaleur de son corps, goûtant à la certitude que cette force serait toujours utilisée pour la protéger.

Le lendemain, 12h00.
Cinq jours avant l’anniversaire de Sophie, Ilyan se trouvait en ville, à la recherche de cadeaux pour sa chère sœur. Il franchit les portes d’un grand magasin qui regorgeait de trésors dédiés aux femmes. Perdu parmi les rayons dont il ignorait tout, il savait qu’il aurait du mal à faire les bons choix. Cependant, il décida de se diriger en premier lieu vers le rayon des chaussures, convaincu que cela pourrait être une piste intéressante.
Le regard vagabondant parmi les étagères remplies de chaussures aux styles et aux couleurs variés, Ilyan ressentait une légère appréhension. Comment savoir quelles chaussures correspondraient aux goûts de Sophie ? Il ne connaissait que très peu ses préférences en matière de mode. Il avait souvent vu sa sœur arborer des baskets confortables, mais il se demandait si elle serait plutôt tentée par une paire de chaussures plus sophistiquées pour une occasion spéciale comme son anniversaire.
Ilyan s’arrêta devant une rangée de talons élégants, imaginant Sophie les portant avec grâce lors d’une soirée spéciale. Il les examina attentivement, essayant d’imaginer si ces chaussures lui conviendraient. Cependant, le doute persistait dans son esprit. Peut-être préférait-elle des chaussures plates, plus pratiques pour une utilisation quotidienne ? Ou peut-être était-elle passionnée par les bottes, prête à affronter les intempéries avec style ? Le temps passait, et Ilyan se retrouvait de plus en plus indécis. Il comprit qu’il avait besoin d’aide pour faire le bon choix.

POINT DE VUE DE AMINA.

12h15.
Aujourd’hui, une envie irrésistible de sortir s’emparait de moi. Je pris mon téléphone et composai le numéro de ma meilleure amie. À peine quelques sonneries plus tard, Fatma décrocha et je lui fis part de mon désir de passer du temps ensemble. Avec enthousiasme, elle me proposa d’aller faire du shopping, une activité qui nous plaisait à toutes les deux.

Après une demi-heure de route à discuter joyeusement de tout et de rien, nous arrivâmes devant le plus grand magasin de la ville. Le regard brillant d’excitation, je franchis les portes en compagnie de Fatma à mes côtés. Nous étions prêtes à nous plonger dans un univers de mode et de nouvelles tendances.

Le magasin débordait de tenues fraîchement arrivées sur le marché. Nous étions ravies de découvrir les dernières créations, car nous étions toujours à l’affût des nouveautés dans le monde de la mode. Au fil des rayons, nous choisissions des vêtements qui reflétaient notre style et correspondaient aux dernières tendances que nous avions suivies avec attention.

Dans cette oasis de la mode, nous étions comme des poissons dans l’eau. Les tissus soyeux glissaient entre nos doigts, les couleurs chatoyantes éveillaient notre imagination, et les coupes impeccables suscitaient notre admiration. Entre rires complices et commentaires éclairés sur les différentes pièces, nous savourions chaque instant de notre virée shopping.
Soudain, une voix familière me tira de mes pensées, me stoppant net dans mes pas.
– Comme ça, on fait du shopping ? déclara la voix d’un ton taquin.
Je me retournai, surpris, pour découvrir Ilyan qui se tenait là, un sourire espiègle aux lèvres.
– Ilyan ! Qu’est-ce que tu fais ici ? demandai-je, étonné de le voir dans ce grand magasin.
– Je suis venu chercher quelques cadeaux pour ma sœur, répondit-il. C’est son anniversaire dans cinq jours. Et heureusement que tu es là. J’avais du mal à choisir pour elle. Tu sais, avec ces trucs de filles.
Je ne pus m’empêcher de rire devant sa confession. Son air désorienté et fatigué en disait long sur ses efforts pour dénicher les cadeaux parfaits.
– Bon, tu voulais lui acheter quoi exactement ? lui demandai-je, curieux de connaître ses intentions.
– Eh bien, je cherche des chaussures pour elle. Je ne suis pas sûr de ce qui lui plairait le plus. As-tu des conseils ?
Habituée à guider des clients dans leurs choix, je me mis à poser quelques questions sur les goûts et les activités de Sophie. Ilyan me parla de sa passion pour la danse et du temps qu’elle passait à explorer la nature. Nous échangeâmes pendant un moment, partageant ses recommandations et ses idées.
Finalement, avec mes conseils avisés, Ilyan se sentit plus confiant dans ses choix. Il décida d’opter pour une paire de chaussures de danse élégantes, ainsi qu’une paire de bottines confortables pour les escapades en plein air. Il se sentait soulagé d’avoir trouvé des cadeaux qui, espérait-il, feraient sourire Sophie lors de son anniversaire.

Fatma nous rejoignit, les bras chargés d’accessoires, prête à ajouter sa touche personnelle à nos achats. Ensemble, nous nous dirigeâmes vers l’accueil pour régler nos acquisitions, puis nous sortîmes du magasin, portant fièrement nos trouvailles.
– Les filles, je vous invite ce samedi chez moi, annonça Ilyan. Ma sœur célèbre son anniversaire et je serais ravi de vous y voir.
– Oh, merci pour l’invitation ! s’exclama Fatma, visiblement ravie.
– Nous serons là, répondis-je avec enthousiasme. J’espère que tu n’as pas oublié pour ce soir, ajoutai-je avec un sourire complice.
– Comment pourrais-je oublier ? murmura-t-il.
– Ah, maintenant vous manigancez des choses derrière mon dos, plaisanta Fatma.
– On ne manigance rien du tout, assurai-je. C’est juste un dîner chez moi.
– Bon, d’accord, acquiesça-t-elle en nous lançant un regard malicieux.

POINT DE VUE DE LAÏCHA.

21h00.
Cherif, mon cœur palpitant, me chatouilla sans relâche. Je le suppliai de s’arrêter, craignant que mon estomac ne puisse supporter davantage. Compréhensif, il cessa immédiatement ses taquineries.
Il se leva du lit sans dire un mot, quittant la pièce d’un pas silencieux. Me voilà donc seule, au milieu du lit, dans cette chambre paisible. Je me levai doucement, ressentant encore les chatouillements sur ma peau, et me dirigeai vers le miroir. Une sensation de confort m’envahit alors que je contemplais ma silhouette vêtue d’une robe rouge captivante.
Dans l’intimité de cette chambre, je me sentais belle et désirable. Un sentiment de confiance s’empara de moi, nourri par la robe qui m’enveloppait de sa grâce.
Soudain, Cherif apparut, avançant vers moi, tenant deux verres dans ses mains. Son regard se posa sur moi.
– Tu es toute belle, si tu t’en doutais, murmura-t-il avec tendresse.
Je lui offris un sourire radieux, acceptant le verre qu’il me tendit. Nos corps se rapprochèrent naturellement, l’un près de l’autre. Il posa son verre et enveloppa mes épaules de ses bras forts. Lentement, il souleva mon menton, amenant nos lèvres à se rencontrer avec une douceur enivrante…
Soudain, mon rêve fut interrompu par la voix de ma mère, me réveillant de mon sommeil profond. La réalité me saisit, mais les souvenirs du rêve avec Cherif demeuraient, flottant dans mon esprit. Un frisson d’excitation traversa mon être, tandis que je me rappelais intensément de ce moment éphémère passé en sa compagnie.

POINT DE VUE DE SOPHIE.

21h30.
Ma mère avait entrepris d’organiser un dîner familial, dans l’espoir de rassembler chaque membre de notre petite tribu avant le voyage imminent de mon père. Cependant, consciente de la présence inévitable de Malik lors de cet événement, j’avais préféré me soustraire à cette rencontre. Les souvenirs douloureux et les tensions passées étaient encore trop vifs dans mon esprit, rendant chaque interaction avec lui insupportable.
Lorsque ma mère remarqua mon refus, son regard se posa sur moi avec une intensité perçante, cherchant à comprendre mes motivations. Elle avait toujours eu cette aptitude particulière à déceler les non-dits, à sonder les recoins les plus profonds de mon âme.
– Vous avez eu une discussion, ton père et toi ? me questionna-t-elle.
Je pris une courte pause avant de répondre, tentant de masquer mes émotions derrière un masque de froideur.
– Non, pourquoi ? répliquai-je avec détachement.
Un juron étouffé s’échappa des lèvres de ma mère, trahissant sa frustration face à cette situation délicate.
– Il m’avait dit qu’il n’assisterait pas à ton anniversaire. Il doit rentrer dans deux jours, m’informa-t-elle.
L’amertume monta en moi, alimentant ma résistance à l’égard de mon père.
– De toute façon, je n’en ai que faire, lâchai-je avec une pointe de ressentiment.
– Sophie, c’est ton père, murmura-t-elle d’une voix douce.
Je relevai le menton avec détermination, laissant transparaître ma colère contenue.
– Et c’est précisément pourquoi il a de la chance. Sinon, je lui dirais des vérités qu’il ne serait pas prêt à entendre…, articulai-je. Je vais en ville. Bon appétit.
– Vas-y, si c’est ce que tu veux, mais fais bien attention, me prévint-elle.
– Merci, maman, répondis-je d’un ton légèrement plus doux.
– Amuse-toi bien. Peut-être devrais-tu appeler Oumar et lui demander de te rejoindre. Vous n’avez pas eu beaucoup de temps pour vous retrouver, ajouta-t-elle avec bienveillance.
Oumar, cet homme qui partageait mon âge tendre, était devenu une part importante de ma vie depuis un an. Notre relation avait été empreinte d’amour et de complicité, nous transportant sur des nuages d’harmonie. Cependant, un événement funeste avait marqué un tournant dans notre histoire.
Ce jour-là, je l’avais surpris en train d’échanger des baisers avec une amie proche, dans l’intimité de sa chambre, sur le lit qui avait été témoin de tant de moments précieux entre nous. Cette trahison avait ébranlé les fondements de notre amour, et depuis lors, notre relation avait sombré dans le silence et l’absence.
– Ce serait peut-être préférable de ne plus avoir de ses nouvelles du tout, lançai-je.
Les yeux de ma mère se rétrécirent légèrement.
– Pourquoi dis-tu cela ?, demanda-t-elle.
– Une divergence monumentale dans nos visions de l’avenir, résumai-je sobrement. Bonne soirée, maman.
Je laissai planer mes mots dans l’air, puis, sans un regard en arrière, je m’éloignai d’elle, me perdant dans l’obscurité de la nuit.

Chapitre 9

« Celui qui a goûté à la douleur de la perte reste effrayé, effrayé pour toujours. »

POINT DE VUE OMNISCIENT.

05h45.
Le jour pointait à peine lorsque Sophie fit son retour chez elle. Les stigmates de la nuit passée étaient visibles sur son visage, témoins silencieux de l’aventure vécue aux côtés de Momo, son nouvel amoureux. Avec une précaution infinie, elle s’efforça de traverser le seuil sans troubler le sommeil des autres. Mais le destin, facétieux, lui réservait une rencontre inattendue dans l’embrasure de l’escalier : son père. Déjà vêtu et prêt à entamer sa journée, il la fixa d’un regard empreint d’une étrangeté déconcertante, une expression insaisissable qu’elle ne sut interpréter.
– La nuit a été longue, lança-t-il d’une voix calme, presque indifférente. Tu as sans doute trouvé de quoi occuper tes heures.
Sophie sentit son cœur se serrer légèrement, mais elle refusa de se laisser submerger par les émotions.
– Je ne compte pas évoquer ma soirée en ta présence.
Son père leva les mains, comme pour se rendre à l’évidence.
– Crois-moi, je ne désire pas connaître les détails.
Cependant, ses yeux continuaient de la scruter avec attention. Sophie se sentit vulnérable face à ce regard scrutateur, comme si son père cherchait à sonder son âme en quête de réponses.
– Fort bien, déclara-t-elle enfin, d’un ton ferme. Je vais me hâter de prendre une douche et me mettre au travail.
Un froncement de sourcils fugace trahit une pensée qui traversa l’esprit de son père.
– Viens avec moi. Prends le temps de partager une tasse de café avant de te préparer.
Sophie le suivit à contrecoeur, consciente que résister ne ferait que reporter les révélations que son père était sur le point de lui faire.

La pièce était enveloppée d’un silence pesant, tandis que le doux bruit de la cafetière remplissait l’air. Malik prit place face à sa fille.
– Ta mère t’a-t-elle parlé ? murmura-t-il.
Sophie acquiesça légèrement.
– Oui, elle m’a informée de ton retour, répondit-elle d’une voix à peine audible.
Les yeux de Malik s’ancrèrent dans ceux de sa fille, cherchant des réponses qu’elle ne savait pas si elle était prête à donner.
– Penses-tu réellement que cela me préoccupe tant que ça ? lâcha-t-elle, ses mots chargés d’une douleur dissimulée depuis trop longtemps. Je suis trop occupée à essayer de construire ma propre vie pour me soucier de la tienne.
Il la fixa avec dégoût, laissant échapper un soupir de frustration.
– Pourquoi fais-tu une chose aussi stupide ? Tu es en train de mettre en péril notre relation, peut-être de manière irréversible.
Sophie le regarda, une lueur de défi dans les yeux.
– Je ne vais rien gâcher du tout, rétorqua-t-elle fermement, se levant pour verser le café.
Le regard désapprobateur de Malik témoignait de son désarroi face à l’attitude de sa fille.
– Tu ne peux pas continuer à m’ignorer indéfiniment, Sophie. Il est temps pour toi de grandir et de faire face à la réalité.
Sophie ne répondit pas, son regard se perdant dans la vapeur montant de la tasse de café. Les mots de son père résonnaient en elle, emplis de reproches. Elle savait que quelque chose devait changer, que les blessures du passé ne pouvaient être ignorées éternellement. Mais le chemin vers la réconciliation était semé d’embûches, et elle devrait trouver la force de faire face à ses démons intérieurs pour retrouver l’harmonie familiale qui lui manquait tant.

POINT DE VUE DE ILYAN.

12h05.
Les marches de l’escalier semblaient s’étendre devant moi. Je descendais avec hâte, la tête emplie d’une multitude de pensées. Et là, je vis mon père, assis devant la porte de la maison, comme un gardien silencieux.
– Papa ! Qu’est-ce que tu fais là ? m’échappai-je dans un souffle de surprise.
Il se leva gracieusement, son regard perdu dans les horizons lointains. L’air était empreint d’une mélancolie teintée de fierté.
– Mon fils, je contemple simplement le monde qui m’entoure. Cette ville qui grandit sous nos yeux, avec ses artères animées et ses commerces prospères. J’ai contribué à sa création, et cela me remplit d’une immense fierté, murmura-t-il, presque comme s’il se parlait à lui-même.
Je m’approchai de lui, absorbé par cette aura d’introspection qui l’entourait. Le sentiment d’une connexion profonde se tissa entre nous.
– C’est un travail admirable, papa, répondis-je.
Un sourire nostalgique éclaira son visage, comme s’il revivait des souvenirs intenses.
– Grâce à mes frères, malgré nos différences et nos discordes, nous avons réussi à ériger cette ville éblouissante. Cela réveille en moi une multitude de moments précieux partagés, confia-t-il.
Je contemplai le paysage à mon tour, absorbant la grandeur de cette réalisation collective.
– Tu vois, papa, c’est si réconfortant d’être chez soi, murmurai-je.
Il m’observa, ses yeux pétillants d’une profonde affection paternelle.
– Je me sens vraiment bien ici, mais malheureusement, les exigences de mes projets m’appellent, révéla-t-il, une pointe de regret dans sa voix.
Je compris la dualité qui habitait son cœur, entre sa passion pour son travail et le désir d’être présent pour sa famille.
– Pourtant, papa, ne pourrais-tu pas attendre que l’anniversaire de Sophie soit passé avant de retourner au travail ? tentai-je de lui faire entendre raison.
Il laissa échapper un soupir.
– Je n’ai pas le choix, répondit-il avec une tristesse contenue. Peut-être ferais-je un tour en voiture en ville pour me changer les idées.
– N’oublie pas d’acheter quelque chose pour moi, lançai-je.
Son regard se fit doux, un sourire bienveillant étirant ses lèvres.
– Ne t’en fais pas, me rassura-t-il avant de se diriger vers sa voiture.
Je retournai dans ma chambre, les souvenirs de ma soirée d’hier chez Amina resurgissant dans mon esprit.

FLASH BACK.

Hier, 22h.
Vêtu d’une tenue élégante, soigneusement choisie pour cette soirée chez Amina, je me contemplai dans le miroir. Ma silhouette se détachait avec grâce, accentuée par la sobriété de mon attirail. Les lunettes que je portais ajoutaient une touche de mystère à mon allure.
L’excitation me gagnait alors que je m’apprêtais à quitter la maison. Les clés de la voiture de mon père en main, je me dirigeai vers la sortie. La voiture, témoin de nombreux voyages et de moments partagés en famille, était désormais mon moyen de transport pour cette soirée mémorable.
Je m’installai derrière le volant avec une détermination palpable. Les sièges en cuir accueillirent mon corps avec douceur, et le contact du volant entre mes mains me procurait un sentiment de contrôle et d’aventure.
Le moteur vrombit doucement lorsque je tournai la clé dans le contact. La machine se mit en marche, prête à m’emporter vers ma destination. Les lumières de la ville s’étendaient devant moi, illuminant mon chemin vers la fête qui promettait d’être inoubliable.
Je me fondis dans le flot de circulation, traversant les artères animées de la ville. Les gratte-ciels se dressaient majestueusement. Chaque carrefour, chaque virage était une occasion de découvrir un nouveau visage de la cité qui m’entourait.
L’excitation grandissait à mesure que je me rapprochais de ma destination. Les pensées tourbillonnaient dans ma tête, mêlant l’anticipation des rencontres à venir. Je savais que cette soirée serait différente, spéciale à sa manière.

22h25.
Lorsque j’arrivai chez Amina, la dernière personne que j’aurais imaginé trouver sur le seuil de sa demeure était son père. Assis majestueusement sur les marches du perron, son visage arborant une expression impénétrable, il semblait délibérément bloquer mon chemin.
– J’ai entendu dire que tu venais, déclara-t-il d’un ton aussi cinglant que le vent automnal.
– J’ai un rendez-vous avec Amina, répondis-je d’une voix assurée.
D’un geste presque théâtral, il tapota la marche, m’invitant ainsi à m’asseoir près de lui.
– Viens donc t’asseoir afin que nous puissions avoir une petite discussion, toi et moi, avant que tu ne trouves refuge auprès d’Amina, lança-t-il d’un ton empreint de défiance.
Mais à peine avait-il prononcé ces mots que la porte à moustiquaire s’ouvrit brusquement, révélant la silhouette gracile d’Amina.
– Ilyan, te voilà ! s’exclama-t-elle avec une fausse jovialité. Entre donc.
Le père d’Amina fronça les sourcils.
– Ilyan et moi étions sur le point d’entamer une conversation, riposta son père.
– Cela peut attendre, affirma-t-elle d’une voix ferme, ne se laissant pas intimider.
Observant cette scène avec un intérêt grandissant, je me demandais qui, du père ou de sa fille, aurait le dernier mot. Finalement, je fus amusé de constater que c’était le père qui choisit de céder.
Se levant brusquement, il disparut sans un mot, tel un acteur sortant de scène.
– Pourquoi ai-je le sentiment que tu viens de me sauver la vie ? demandai-je à Amina.
– Parce que c’est précisément ce que je viens de faire, répliqua-t-elle. Alors, allons donc dîner.
Nous pénétrâmes dans l’enceinte de la demeure, où Amina et sa mère m’invitèrent gracieusement à m’installer dans la magnifique salle à manger. Avec une élégance naturelle, elles se mirent à préparer le dîner, orchestrant chaque mouvement avec grâce et précision.
Enfin, les plats furent servis, dégageant des arômes alléchants qui chatouillaient mes sens. Amina s’assit face à moi, prête à savourer cette expérience culinaire en ma compagnie.

Une fois nos assiettes vidées, elle me proposa de partager un moment de détente devant un film.
– Au fait, quel genre de films affectionnes-tu ?
Un éclair de surprise illumina son regard lorsqu’elle entendit ma réponse :
– Les films d’horreur, confessai-je avec un sourire en coin.
Amina, légèrement décontenancée, répliqua fermement :
– Je n’ai absolument aucune intention de me soumettre à l’angoisse et à l’effroi que procure ce genre de films.
– N’aie crainte, je serai là pour te protéger, quelles que soient les horreurs qui se dévoileront à l’écran.
Elle se tourna alors, sortit d’un sac un CD soigneusement choisi, qu’elle inséra délicatement dans le lecteur. D’un pas délicat, elle vint s’installer à mes côtés.
Le film commença.
– Je t’avais pourtant exprimé mon désir de visionner un film d’horreur, m’irritai-je.
– Et je t’ai clairement fait part de mon manque d’appétence pour ce genre cinématographique, rétorqua-t-elle.
– Alors, quel film as-tu sélectionné à la place ?
– « N’oublie jamais », déclara-t-elle sans hésitation.
– Quoi qu’il en soit, je suis persuadé que tu t’endormiras avant même la fin de ce film. Ainsi, j’aurai l’occasion de le changer, lançai-je avec une pointe de défi.
– Attendons de voir, répliqua-t-elle, pétillant d’une malice à peine dissimulée.
Blotti dans les fauteuils, nos corps enlacés, ma main glissait avec douceur sur son épaule, capturant chaque contour délicat. Un sentiment de béatitude m’envahissait tandis que je me trouvais en sa présence.

L’amour, cette force indomptable, ne nous laisse guère le choix quant à celui ou celle qui éveillera nos émotions les plus profondes. Je ne pouvais rien contre cette intrusion subtile qui avait fait irruption dans mon cœur. Était-ce sa beauté envoûtante, son sourire enchanteur ou peut-être le miroitement ensorcelant de ses yeux ? J’avais connu d’innombrables filles par le passé, mais jamais je n’avais été touché aussi intensément que par elle.

Alors que mes pensées se perdaient dans les méandres de cet amour grandissant, je pris conscience que le sommeil avait déjà enveloppé Amina de ses bras bienveillants. Je m’éclipse avec précaution de la pièce, veillant à ne pas troubler son repos. La lueur de la télévision s’éteint, plongeant la chambre dans une obscurité apaisante. Silencieusement, je quittai la chambre, prenant soin de ne pas éveiller son doux sommeil.

FIN DU FLASH-BACK

POINT DE VUE DE JUNIOR.

10h15.
Je me levai de la table avec une détermination inébranlable, l’air résolu. Je ne pouvais plus rester en spectateur passif et permettre à Ilyan de semer la discorde entre Amina et moi. Peu importe les paroles d’Amina, je savais dans les profondeurs de mon être que je devais agir, que je devais prendre les choses en main.
Ma mère, les sourcils froncés dans une expression de méfiance, me lança d’un ton soupçonneux :
– Où vas-tu ainsi ?
D’un regard assuré, je lui répondis :
– Je vais rendre visite à un ami.
– Ne t’éternise pas, j’aurai besoin de toi, insista-t-elle.
Je franchis le seuil de la maison, laissant derrière moi les murmures de ma mère. Mon regard était fixé sur un objectif clair : me rendre chez Ilyan. Mes pas, emplis d’une détermination brûlante, me guidaient vers un face-à-face inévitable. Je ne savais pas exactement ce que j’allais dire ou faire, mais une chose était certaine : je devais confronter Ilyan et régler définitivement nos différends.
Le chemin se déroulait devant moi, vibrant d’une tension palpable. Mon cœur battait à l’unisson avec ma volonté farouche de mettre un terme à cette situation qui menaçait notre amour.

10h35.
J’étais là, immobile, tapi dans l’ombre d’un coin de rue, face à l’impénétrable façade de la demeure de Ilyan. L’atmosphère était paisible, les rues silencieuses et dépourvues de toute présence. Puis, tel un signe du destin, la porte de sa demeure s’ouvrit lentement. D’abord, un homme émergea, suivi de près par un jeune garçon dont je connaissais chaque facette. À n’en point douter, il s’agissait de son père, car leurs traits familiers révélaient un lien indéniable.
Les deux hommes se dirigèrent d’un pas mesuré vers leur voiture, lorsque le père sembla réaliser qu’il avait oublié quelque chose d’important à l’intérieur de la maison. Sans hésiter, il fit volte-face, s’éclipsant de nouveau à l’intérieur, laissant Ilyan seul, face à l’automobile.
Sans plus attendre, je me levai de ma cachette, mes pas décidés me portant inéluctablement vers lui. Mon regard soutenait le sien avec une détermination farouche, prêt à affronter toutes les conséquences.
– Hey, Ilyan, il est temps que nous ayons une conversation, déclarai-je.
Il se retourna brusquement, surpris de me voir là, et nous nous retrouvâmes face à face, nos regards s’entrelaçant dans un échange silencieux.
– Je n’ai rien à te dire, rétorqua-t-il.
Je lui lançai un regard résolu.
– Tu ferais bien de m’écouter attentivement, frère, répliquai-je.
L’intensité de mes paroles se reflétait dans le contact de ma main posée fermement sur son épaule.
Dans un mouvement fulgurant, il me repoussa avec une violence inouïe, projetant mon corps au sol avec une force déconcertante. Je me relevai péniblement, mes sens en ébullition, prêt à affronter la situation qui venait de basculer dans l’abîme de la violence. Les ténèbres s’immisçaient dans mes pensées, tandis que je cherchais désespérément une échappatoire dans ce chaos grandissant.
Ma main s’empara de la première opportunité qui se présenta, une barre de fer froide et implacable. Tel un guerrier prêt à défendre sa cause, je la brandis avec une détermination farouche, ma volonté de protéger ce qui m’était cher se reflétant dans mes yeux brûlants d’intensité. Sans la moindre hésitation, je décochai un coup puissant sur la tête de Ilyan, l’impact résonnant dans l’air comme un sinistre écho.
Un silence pesant envahit l’espace, ponctué uniquement par le choc de son corps inerte qui s’affaissait au sol. Des gouttes de sang écarlate perlèrent de sa blessure béante, tissant un tableau macabre qui se dessinait sous mes yeux. L’horreur mêlée à l’incompréhension me submergea, mes mains tremblantes lâchant la barre de fer qui devint soudainement le témoin muet de mes actes irréversibles.
– Par tous les diables, qu’ai-je fait ? murmurais-je d’une voix emplie de désarroi, les mots se perdant dans l’atmosphère lourde de culpabilité. Le poids de mes actions s’abattit sur mes épaules, me plongeant dans un abîme d’angoisse.
Pris de panique, je m’élançai à toute allure, mes jambes s’enfonçant dans l’inconnu, guidées par un instinct primal de survie. Mon être tout entier était animé par une urgence aveuglante, cherchant désespérément à échapper à cette réalité qui se teintait de noirceur.

POINT DE VUE DE MALIK.

10h12.
Le temps s’écoulait paisiblement, égrenant les minutes au rythme régulier de la vie quotidienne.
– Hey Ilyan ! M’accompagnerais-tu en ville ? murmurai-je.
– Donne-moi une minute, j’arrive, répondit-il.
Nos pas se retrouvèrent harmonieusement et nous nous dirigeâmes ensemble vers la voiture, nos silhouettes se fondant dans le décor urbain. Pourtant, alors que nous atteignîmes la voiture, une étrange sensation me prit. Mon téléphone semblait s’être évaporé de ma poche.
Je m’élançai à la hâte vers ma chambre, cherchant frénétiquement à le retrouver. Les secondes s’étiraient dans une lenteur cruelle, s’entremêlant avec mes pensées agitées. Enfin, après une quête laborieuse, je parvins à retrouver mon téléphone.
Revenant vers l’extérieur, prêt à poursuivre notre périple, l’impensable se dévoila à mes yeux, figeant mes pas dans un mélange de stupeur et de terreur. Là, devant moi, gisait Ilyan, inconscient et marqué par un sinistre écoulement écarlate.
Dans un état de choc, j’eus la présence d’esprit d’appeler immédiatement les urgences, mes doigts tremblant sur les touches de mon téléphone. Puis, instinctivement, je hurlai le nom de sa mère, Mariam, priant pour qu’elle puisse nous rejoindre dans cette scène cauchemardesque.
– Tu as appelé les urgences ? demanda-t-elle d’une voix empreinte d’inquiétude en sortant de la maison.
– L’ambulance sera là dans un quart d’heure, répondis-je, mes mots à peine audibles face à l’ampleur de la situation.
– Comment cela a-t-il pu se produire, Malik ? supplia-t-elle, des larmes emplissant ses yeux.
– Je n’en sais absolument rien. J’étais à l’intérieur, cherchant mon téléphone, et quand je suis revenu, je l’ai trouvé ainsi, étendu sur le sol.

L’ambulance, telle une apparition céleste, surgit de l’horizon avec une célérité inattendue. Ses portes s’ouvrirent, dévoilant une équipe de secouristes habiles et dévoués, prêts à prendre en charge mon cher enfant. Délicatement, ils déposèrent son corps vulnérable sur un brancard, leurs gestes empreints d’une solennité presque sacrée. Une gravité invisible enveloppait l’atmosphère, laissant présager l’ampleur de la situation.
Une seule personne serait autorisée à accompagner Ilyan dans l’ambulance pour aller à l’hôpital. Mes yeux se posèrent instinctivement sur Mariam. Avec détermination, elle s’avança vers l’ambulance, prête à affronter les épreuves qui se dressaient sur leur chemin.
Je pénétrai dans la maison avec une hâte frénétique, cherchant fiévreusement la présence de Sophie.
– Sophie ? m’échappai-je, priant pour que ma voix porte l’urgence de la situation.
– Oui, répondit-elle, captivée par la gravité de ma tonalité.
– Rejoins-moi immédiatement, insista ma voix, chargée d’une angoisse palpable.
– Pourquoi ? Que se passe-t-il ? implora-t-elle, cherchant des réponses dans mes yeux troublés.
– Arrête de questionner et viens avec moi dans la voiture, répondis-je.
– Peux-tu au moins m’éclairer sur la situation ? Pourquoi cet air si préoccupé ? supplia-t-elle.
– Ton frère est à l’hôpital. Il a été frappé par je ne sais quoi à la tête, déclarai-je, mes mots se brisant en échos.
– Oh mon Dieu ! Attends-moi, j’arrive, s’exclama-t-elle, précipitamment.
Ensemble, nous nous précipitâmes vers la voiture, les battements de nos cœurs résonnant en une symphonie d’angoisse partagée en direction du chemin de l »hôpital.

POINT DE VUE DE AMINA.

14h00.
Après de vaines tentatives pour entrer en contact avec Ilyan, l’exaspération m’envahit tel un orage. Ma patience s’érodait à chaque sonnerie sans réponse. Mais, déterminée à percer le mystère de son silence, je m’armai de courage et réitérai mon appel une fois de plus. Les secondes parurent interminables, jusqu’à ce que la voix tant espérée se fasse enfin entendre de l’autre côté de la ligne.
– Mais bon sang, Ilyan, que diable faisais-tu donc ? m’emportai-je.
Cependant, la réponse qui m’accueillit fut loin de correspondre à mes attentes.
– Ce n’est pas Ilyan au téléphone, mais son père, déclara-t-il.
Stupéfaite, je plaquai ma main sur ma bouche, cherchant à contenir ma confusion.
– Oh, je vous prie de bien vouloir m’excuser. Je croyais sincèrement m’adresser à Ilyan, m’empressai-je de m’excuser, submergée par la honte.
Malik, d’une voix empreinte de douceur, me rassura.
– Ne vous en faites pas, ma chère. D’ailleurs, Ilyan est gravement blessé. Il se trouve actuellement à l’hôpital central de la ville, m’informa-t-il.
Mes paroles se figèrent dans ma gorge, mes yeux s’écarquillant d’horreur devant cette révélation soudaine.
– Qu… quoi ? Mais comment cela a-t-il pu se produire ? balbutiai-je. J’arrive immédiatement.
Sans perdre une seconde de plus, je raccrochai brusquement, laissant la précipitation guider mes gestes. Mon cœur tambourinait avec une fébrilité débordante, et je m’empressai d’envoyer un message à Fatma pour la tenir informée de la situation. Il était crucial qu’elle contacte Moussa sans délai pour lui faire part de la gravité de la situation.

14h30.
Je m’extirpai de la voiture avec une hâte fiévreuse et pénétrai dans l’enceinte de l’hôpital. Les couloirs silencieux semblaient résonner de l’angoisse contenue de ses occupants. Guidée par l’instinct, je me dirigeai vers l’accueil où une femme, plongée dans sa tâche devant son ordinateur, m’attendait.
– Bonjour madame. Pourriez-vous m’indiquer la chambre de Ilyan ? Un patient qui devrait être ici depuis une demi-heure, demandai-je avec empressement.
La préposée à l’accueil me fit signe d’attendre quelques instants, puis entreprit de consulter les informations dans sa machine.
– C’est la chambre 47, à l’étage supérieur.
– Merci, répondis-je d’un ton empreint de gratitude.
Je pris mon temps pour trouver la chambre, déambulant dans les dédales de l’hôpital. Lorsque j’atteignis finalement ma destination, une scène poignante se déploya devant moi : la famille de Ilyan, déjà présente, était regroupée devant la porte, leurs visages empreints d’une inquiétude profonde.
– Des nouvelles ? m’empressai-je de demander, le cœur battant la chamade.
– Il ne s’est pas encore réveillé, répondit Malik.
À peine ces mots avaient-ils quitté ses lèvres que la mère de Ilyan éclata en sanglots, la douleur et l’incertitude déferlant sur elle telle une tempête. Je m’approchai d’elle avec douceur, enveloppant son être fragile dans mes bras.
– Ça ira, murmurais-je tendrement. Il va s’en sortir.

Après quelques minutes d’attente tendue, j’aperçus Fatma et Moussa qui venaient d’arriver à leur tour. À ce moment précis, la porte de la chambre s’ouvrit, laissant apparaître le médecin qui s’avança vers nous d’un pas solennel.
– Comment va-t-il ? interrogea la mère de Ilyan, l’angoisse se peignant sur son visage.
– Votre fils se porte bien, répondit le médecin d’une voix rassurante. Il vient tout juste de se réveiller, mais il est extrêmement faible. Tout ira mieux dans les deux ou trois prochains jours.
Un soupir de soulagement s’échappa de mes lèvres, libérant la tension qui s’était accumulée en moi.
– Pouvons-nous le voir ? demandai-je avec impatience.
– Malheureusement, pas pour le moment, répliqua le médecin en refermant délicatement la porte. Nous sommes en train de lui faire passer quelques tests. Nous vous prions de repasser demain matin.
Mon amie Fatma s’approcha de moi, ses yeux empreints d’une inquiétude sincère.
– J’étais tellement inquiète pour lui, murmura-t-elle en cherchant du réconfort dans ma présence. Qu’est-ce qui s’est passé ?
– Il a reçu un coup à la tête, répondit son père d’une voix lourde.
La mère de Ilyan prit alors la parole.
– Allons nous reposer, déclara-t-elle aussitôt. Nous reviendrons demain matin.
Ensemble, nous sortîmes de l’hôpital. Fatma décida de m’accompagner chez moi. Quant à Moussa, il avait préféré rester auprès de la famille de Ilyan, apportant sa présence réconfortante et son soutien.

Un tourbillon d’émotions tumultueuses m’envahit soudainement, m’engloutissant dans un océan d’incertitude. Je me sentais perdue, désemparée face à l’inconnu qui se dressait devant moi. Était-ce la tristesse de perdre un être cher qui s’insinuait en moi ? Ou bien était-ce autre chose, quelque chose de plus profond et complexe ? Les questions se bousculaient dans mon esprit sans trouver de réponses claires. J’étais en proie à une confusion déchirante, un mélange troublant d’émotions contradictoires.
Fatma, toujours attentive à mes états d’âme, remarqua mon inquiétude grandissante et me prit tendrement dans ses bras réconfortants. C’était comme si elle pouvait lire dans mon âme troublée, percevoir les tourments qui s’y agitaient. Les premières larmes commencèrent à perler au coin de mes yeux, libérant une détresse que je peinais à contenir.
Était-ce des larmes d’amitié, témoignant de l’affection profonde que je portais à Ilyan et à sa famille ? Ou bien étaient-ce des larmes d’un amour inavoué qui avait pris racine en moi, se nourrissant de l’admiration et de la proximité que j’avais développées avec Ilyan ? La frontière entre ces deux sentiments si intenses se troublait, se mêlant dans un tourbillon d’émotions indéchiffrables.
Dans cet instant de vulnérabilité, je me laissai aller à ces larmes qui coulaient librement, témoignant de la complexité des liens humains, de la beauté et de la confusion qui les accompagnent.

Chapitre 10

« Et j'ai peur que ma place ne soit prise par quelqu'un d'autre, très chanceux et pas trop timide, qui flirte avec tes yeux alors que c'est moi qu'ils fascinent. »

Nizar Qabbani

POINT DE VUE OMNISCIENT.

09h30.
Le lendemain, alors que les élèves étaient en plein cours de mathématiques, Monsieur Diouf, le directeur de l’école, fit son entrée dans la salle de classe, suscitant un murmure d’excitation parmi les élèves. D’un geste calme de sa main, il les invita à se lever.
– Bonjour à tous, commença-t-il d’une voix empreinte d’autorité bienveillante. Merci, vous pouvez vous asseoir.
Les élèves prennent place dans un silence respectueux, leurs regards braqués vers le directeur, chacun se demandant quelle était la raison de cette visite.
Le directeur prit une profonde inspiration.
– J’ai une mauvaise nouvelle à vous annoncer, poursuivit-il d’une voix qui résonnait dans le silence. Votre camarade de classe, Ilyan, a été victime d’un accident hier soir. Il se trouve actuellement à l’hôpital.
Un frisson d’inquiétude parcourut la classe, des regards inquiets se croisant à travers la pièce. Les élèves écoutaient attentivement, suspendus aux paroles du directeur. Les mots « accident » et « hôpital » flottaient dans l’air, emplissant la salle de tension.
– Les médecins nous ont rassurés en affirmant que Ilyan allait s’en sortir, d’après ce que son père m’a confié, poursuivit le directeur.
Un soupir collectif de soulagement se fit entendre.
– En attendant son retour parmi nous, je vous demande à tous de garder Ilyan dans vos pensées et vos prières. Montrez votre soutien en lui envoyant des ondes positives.

POINT DE VUE DE ILYAN.

12h15.
La clarté aveuglante de la pièce où je me trouvais m’assaillait dès mon réveil, provoquant un pincement de douleur dans mes yeux encore embrumés. Tout autour de moi, le blanc immaculé des murs et des draps donnait à cet espace une atmosphère étrangement aseptisée. Je me laissai quelques instants pour rassembler mes esprits, réalisant peu à peu que j’étais allongé sur un lit, un invité temporaire de ce monde hospitalier.

Tandis que ma vision s’adaptait à la luminosité ambiante, je perçus la présence de trois figures familières se tenant debout à mon chevet. Fatma, Amina et Moussa, m’accueillaient avec des regards empreints de soulagement. Leurs visages rayonnaient d’une affection sincère.
– Ilyan ! s’exclama Fatma d’une voix mêlée de joie.
Je tournai ma tête avec précaution vers eux, un sourire fatigué étirant mes lèvres. C’était un véritable réconfort de voir leur présence dans ce décor hospitalier.
– Tu as eu un petit accident, expliqua Amina doucement, posant avec tendresse sa main sur ma tête. Ne t’en fais pas, tes parents seront là dans quelques minutes. Tout va s’arranger, tu verras.
Les mots d’Amina apaisèrent mes inquiétudes naissantes. Dans l’attente de l’arrivée imminente de mes parents, je me sentais entouré de l’amour et de l’amitié qui avaient tissé des liens indestructibles avec ces êtres chers. L’hôpital pouvait sembler intimidant, mais la présence de Fatma, Amina et Moussa à mes côtés transformait ce lieu froid en un havre de chaleur et de réconfort.

12h30.
L’arrivée de mes parents et de ma sœur dans la chambre d’hôpital fut un mélange d’émotions. Ma mère, étreignant chaleureusement mon corps affaibli, exprimait sa profonde inquiétude et son soulagement de me voir en vie. Les bras de ma sœur, Sophie, m’entourèrent également, démontrant son affection et son besoin de savoir que j’allais bien. Je me sentais enveloppé dans leur amour, trouvant un réconfort indéniable dans leur présence.
– Hey petit, comment vas-tu ? s’enquit ma sœur Sophie. Tu peux nous dire ce qu’il s’est passé ?
Ma mémoire commençait à se dévoiler, faisant émerger des images floues d’une dispute avec Junior, mais ensuite tout devenait noir, comme effacé par un voile impénétrable.
Je choisis de garder le silence sur ces souvenirs confus.
– Je n’en ai aucune idée, mentis-je.
Mon père m’informa que le médecin avait autorisé ma sortie de l’hôpital ce soir même. Une nouvelle qui réchauffa mon cœur.
– Tes camarades de classe t’attendent à la maison, murmura ma mère doucement.
Mon esprit se mit à tourbillonner, essayant de reconstituer les pièces manquantes de ce puzzle. Qu’était-il vraiment arrivé ? Quelle était la nature de la dispute avec Junior ? Des questions sans réponses tournoyaient dans ma tête.

21h00.
Il faisait sombre dans les rues lorsque mon père vint me récupérer à l’hôpital, prêt à me ramener chez nous. Ensemble, nous nous installâmes dans la voiture, mettant le cap vers la maison. Une légère brise nocturne s’engouffrait par la fenêtre entrouverte, apaisant mon esprit agité.

À notre arrivée, je fus accueilli par un joyeux brouhaha émanant de ma chambre, où mes camarades de classe m’attendaient avec impatience. J’eus également la surprise de voir Amina, qui se trouvait dans la cuisine en compagnie de ma mère et de ma sœur. Un sourire illuminait mon visage tandis que je les rejoignais tous, sentant l’amour et le soutien de mes proches m’envelopper.

Ma mère nous fit signe de la rejoindre dans la salle à manger, où un festin avait été préparé pour célébrer mon retour à la maison. Les arômes délicieux chatouillaient mes narines, éveillant mon appétit ravivé par les épreuves traversées. Nous nous attablâmes ensemble, partageant des moments de convivialité et de complicité, savourant chaque bouchée avec gratitude.

POINT DE VUE DE MALIK.

Le lendemain, 10h10.
Le soleil était déjà haut dans le ciel lorsque j’entrai dans la cuisine, où ma femme vaquait à ses occupations matinales. Je m’approchai d’elle avec affection, l’enlaçant tendrement.
– Salut chéri, lançai-je.
Elle me fixa d’un regard neutre.
– Tu es déjà prêt ? interrogea-t-elle.
– Oui, j’ai appelé un taxi qui doit arriver dans une demi-heure, répondis-je.
Elle soupira lourdement, continuant à s’atteler à ses tâches.
– Tu veux toujours repartir en France, reprit-elle.
– À Rio de Janeiro, rectifiai-je. J’ai un nouveau projet là-bas.
Le temps était venu pour moi de reprendre mes responsabilités professionnelles à l’étranger. Je cherchai à lui expliquer mes motivations.
– « Si le lion part en chasse, c’est pour sa femelle et ses enfants », articulai-je, espérant qu’elle comprenne ma situation.
Elle poussa un soupir profond, tout en continuant son travail.
– Bon voyage, déclara-t-elle d’un ton ferme.
Je montai à l’étage pour rassembler mes affaires, tandis que le taxi venait d’arriver. Ilyan, bien encore très fragile, était là pour m’aider à transporter les valises jusqu’à la voiture. De sa chambre, Sophie me fixait par la fenêtre, le regard très sombre. Mon cœur se serra devant cette image déchirante.

Je m’installai dans la voiture, le conducteur démarra et nous nous dirigeâmes vers l’aéroport. Alors que les paysages défilaient à travers la vitre, je ne pouvais m’empêcher de ressentir un sentiment de culpabilité. J’étais animé par l’excitation de ce nouveau projet, mais aussi par l’angoisse de laisser ma famille derrière moi. Je repassais en boucle les moments importants que j’avais manqués, les anniversaires, les réussites, les instants de complicité qui s’étaient déroulés sans moi. J’espérais ardemment que mon absence serait compensée par les réussites que j’allais accomplir. Cependant, au fond de moi, je savais que le chemin serait semé d’embûches et que les choix que j’avais faits avaient un prix.

12h00.
Arrivée à l’aéroport, en entrant dans le salon d’honneur, je fus accueilli par l’effervescence des discussions et le bruit des conversations animées. Mon équipe était déjà présente, discutant avec les responsables de la commission de l’aménagement du territoire de Rio De Janeiro. Je m’approchai, saluant chacun d’entre eux d’une poignée de main chaleureuse.

La réunion commença, et nous nous plongeâmes dans les détails de notre projet. Les plans, les idées et les objectifs furent exposés, chacun apportant sa contribution et ses perspectives. Je fus ravi de constater l’enthousiasme et l’engagement de tous les participants.

POINT DE VUE OMNISCIENT.

12h45.
Malik sortit de la réunion intense avec les éminences grises de la Commission d’aménagement du territoire de Rio De Janeiro. Une lueur d’insatisfaction dans ses yeux, il se tourna vers ses associés, captivant leur attention d’un regard déterminé.
– Mes amis, annonça-t-il d’une voix chargée d’une gravité inattendue, nous mettons fin à tout cela.
Son assistant, Ali, un architecte de renom qui avait œuvré à ses côtés durant de longs mois sur ce projet ambitieux, afficha un air stupéfait, bouleversé par cette annonce abrupte.
– Tu ne peux pas faire cela, articula-t-il, la voix tremblante d’incompréhension.
Un sourire énigmatique s’étira sur les lèvres de Malik, témoignage étrange d’un soulagement profondément ancré dans son être. Jamais il n’aurait songé à prendre une telle décision par le passé, ni même l’année précédente. Pourtant, en cet instant précis, il percevait avec une clarté troublante que c’était la voie à suivre, le chemin le plus juste à emprunter.
– Et pourtant, c’est exactement ce que je viens de faire, répliqua-t-il à son équipe, suscitant leur surprise et leur perplexité. Je rentre chez moi.
Les deux hommes fixaient Malik, figés dans un étonnement muet. Leurs regards se tournèrent ensuite vers Ali, en quête d’une explication éclairante.
– Alors, le projet ne verra jamais le jour ? interrogea Ibrahim, le maître d’œuvre, laissant transparaître la déception. Après tout le travail acharné que nous avons fourni ?
– Tu étais présent à cette réunion, répondit Malik d’un ton résolu. Ils auraient continué à nous mener en bateau, à nous agiter des promesses sous le nez, aussi longtemps qu’ils l’auraient pu. Je soupçonne même que certains permis ne seraient pas accordés au final. Nous avons déjà perdu suffisamment d’argent. Il est temps de stopper l’hémorragie, de vendre le terrain et de tourner la page.
Ibrahim semblait ébranlé.
– Et que dire de tous nos sous-traitants ?
– Ce sont de remarquables entreprises locales, et il y a encore beaucoup de travail pour elles, répondit Malik avec une conviction tranquille. Nous les avons déjà retenues suffisamment longtemps. Tous les contrats comportent des clauses de retrait, et nous y ferons appel si nécessaire. Si nous devons les indemniser, nous le ferons. Aucune de ces entreprises ne sera prise au dépourvu. En se lançant dans ce projet, elles savaient, peut-être mieux que nous, que l’obtention des permis serait ardue.
Malik se tourna vers Ali, son fidèle associé.
– J’aimerais que tu te rendes à Rio et que tu prennes en charge ce projet, à moins que cela ne te pose un problème, déclara-t-il. Après tout, c’était ton bébé depuis le début.
Le visage d’Ali s’illumina d’un enthousiasme contagieux.
– Je suis capable de le faire ? demanda-t-il, à la fois surpris et ravi.
Malik lui adressa un sourire taquin, sachant qu’il avait pris cette décision en cours de route, anticipant le dénouement inévitable de la réunion matinale, qui avait abouti à une impasse.
– À moins que tu ne veuilles que je te colle au train, plaisanta-t-il.
Le jeune architecte lui renvoya un sourire radieux, prêt à relever ce défi.
– Non, je peux me débrouiller, répondit-il d’une voix confiante.
– Et tu pourras toujours me contacter par téléphone si tu as des questions, ajouta Malik à l’attention d’Ali.
Puis, se tournant vers Ibrahim, il poursuivit :
– Qu’aimerais-tu faire ? Accompagner Ali ou rester ici ? Et toi, David ?
David prit un moment de réflexion avant de répondre.
– Laisse-moi y réfléchir. Cela fait un certain temps que nous sommes dans la ville, et j’apprécie cet endroit. Je pense peut-être rester ici et voir quel travail je peux trouver.
Malik acquiesça, comprenant les sentiments de David.
– Tu sais que je serais désolé de te voir partir, mais si tu as besoin de références, tu peux compter sur moi pour t’en fournir d’excellentes. Et si tu décides de rentrer chez toi, je t’aiderai à trouver du travail là-bas. C’est à toi de décider.
– Merci, répondit David, reconnaissant pour cette offre de soutien.
Ibrahim, quant à lui, semblait légèrement envieux de l’opportunité qui se présentait aux autres.
– J’aimerais beaucoup partir avec Ali, déclara-t-il. Mais ma femme me tuerait si elle apprenait que j’ai eu l’occasion de rentrer chez nous et que je ne l’ai pas saisie.
– Alors, tu peux venir avec moi en voiture, suggéra Malik, lui offrant une solution.
Ali observa Malik d’un regard scrutateur.
– Je pensais que cette défaite t’affecterait davantage. Tu as investi énormément d’énergie dans ce projet.
– Ce n’est pas un échec complet, répondit Malik. En apportant quelques modifications, nous pourrons l’adapter ailleurs.
Ali nota avec surprise :
– Après cinq ans de collaboration, c’est la première fois que je te vois aussi enthousiaste à l’idée de rentrer chez toi.
Malik prit quelques instants de réflexion.
– Tu as raison. J’ai hâte de rentrer. Ma petite-fille fête son anniversaire dans deux jours, et je suis impatient d’être avec elle et ma famille. Ils traversent quelques difficultés en ce moment. Mon fils a eu un petit accident avant-hier. Je me sentirai mieux si je suis près d’eux.
Dans cet échange empreint d’optimisme et de complicité, une nouvelle opportunité se dessinait pour Ali, tandis que Malik lui accordait sa confiance, convaincu qu’il avait fait le bon choix en confiant ce projet entre les mains habiles de son talentueux associé.
Ce projet avorté avait ouvert une fenêtre vers une priorité plus profonde, éveillant en lui le désir de retrouver ses êtres chers et d’être présent pour eux en ces temps difficiles.

POINT DE VUE DE AMINA.

13h05.
Junior avait toujours été un personnage turbulent, prêt à déchaîner sa colère à la moindre occasion. Son silence inhabituel me laissait perplexe, m’incitant à m’interroger sur son sort.
– Hey, Fatma, c’est bizarre que Junior ne soit pas venu me chercher querelle depuis deux jours. Je ne l’ai même pas vu dans la cour de l’école, fis-je remarquer, étonné.
– Peut-être qu’il ne fréquente plus l’école, suggéra Fatma d’une voix pensée, semblant elle-même surprise par cette hypothèse.
– Mais tu penses qu’il va bien ? demandai-je.
– Tu as encore des sentiments pour lui ? s’enquit-elle, laissant entrevoir une part de frustration face à ma préoccupation persistante pour Junior.
– Non, ce n’est pas ça, m’empressai-je de répondre. Je m’inquiète simplement pour lui, sans arrière-pensée.
Fatma poussa un soupir de lassitude, révélant ainsi le fossé d’incompréhension qui nous séparait sur cette question.
– As-tu trouvé un cadeau pour l’anniversaire de Sophie ? lançai-je, espérant changer de sujet.
– Je prévois d’aller lui chercher quelque chose ce soir. Et toi ? répondit Fatma.
– Je n’ai pas encore eu le temps, avouai-je en toute honnêteté.
– Dans ce cas, je passerai te prendre pour que nous allions ensemble au magasin, proposa Fatma.
À cet instant précis, je sentis mon téléphone vibrer dans mon sac. Il me fallut un instant pour le sortir, mais dès que je l’eus entre les mains, un sourire illumina mon visage.

POINT DE VUE DE ILYAN.

13h30.
Une douleur lancinante me martelait la tête. Après une longue période de sommeil, je sentais le besoin impérieux de prendre l’air et de faire quelques pas. Accompagné de Moussa, je sortis de la maison et nous nous engagions sur le bord de mer. L’idée de contacter Amina me traversa l’esprit, comme une brise fraîche dans ma conscience. Je sortis mon téléphone portable de ma poche et composai son numéro.
Le temps sembla s’étirer avant qu’elle ne décroche finalement.
– Allô ! Ilyan, comment ça va ? s’enquit-elle joyeusement.
– Ça va très bien. Que fais-tu en ce moment ? lui demandai-je.
– Je suis à l’école avec Fatma. Nous nous préparons à rentrer. Et toi ? répondit-elle.
– Je me balade sur la plage, révélai-je.
– Quoi ? Tout seul ? s’inquiéta-t-elle.
– Non, je suis accompagné de Moussa. Ne t’en fais pas, la rassurai-je.
– Ah, d’accord, souffla-t-elle, visiblement apaisée.
– Penses-tu pouvoir passer chez moi ce soir ? proposai-je.
– J’ai promis à Fatma de l’accompagner quelque part ce soir, expliqua-t-elle.
– À quelle heure pensez-vous rentrer ? questionnai-je.
– Je ne suis pas sûre. Si nous revenons tôt, je passerai certainement chez toi, répondit-elle.
– D’accord, acquiesçai-je.
– Salut, conclut-elle avant de raccrocher.
Je continuai ma promenade le long de la plage, laissant le bruit des vagues m’apaiser. Des pensées tourbillonnantes envahissaient mon esprit, alors que je me laissais bercer par le doux murmure de la mer.

17h00.
– Ilyan, tu as de la visite ! s’écria ma mère d’une voix enjouée depuis la chaleur réconfortante de la cuisine.
Descendant les escaliers, j’aperçus Laïcha se tenant fièrement devant la porte. Un frisson d’excitation parcourut mon être alors que je m’approchais d’elle, mes bras s’ouvrant naturellement pour l’accueillir. Sans un mot, je l’invitai à pénétrer dans l’intimité de ma chambre.
– Laïcha, cela fait une éternité depuis notre dernière rencontre, la saluai-je avec émotion.
Un sourire mélancolique étira ses lèvres.
– Oui, c’est vrai. J’ai appris ton accident par Moussa, et je priais chaque nuit pour ton rétablissement. J’espère sincèrement que tu te portes mieux maintenant.
Je lui rendis son sourire, appréciant la douceur de ses paroles.
– Oui, grâce à la grâce divine et aux soins attentionnés, je suis en voie de guérison complète. Mais, assez parlé de moi. Dis-moi, qu’est-ce qui t’anime ces jours-ci ?
Son regard se perdit un instant dans l’horizon de ses pensées, puis elle soupira légèrement.
– Je ne peux m’empêcher de penser à Cherif, Ilyan. Nous nous sommes éloignés l’un de l’autre, et il me manque terriblement. Je suis consciente qu’il préfère les filles plus audacieuses que moi. Je ne suis qu’une âme timide et réservée à ses yeux.
Je m’approchai d’elle avec empathie, plaçant une main réconfortante sur son épaule.
– Ne laisse pas les doutes te tourmenter, Laïcha. L’amour est une chose complexe, et parfois, nous sous-estimons l’impact que nous pouvons avoir sur les autres. Pourquoi ne pas essayer de parler avec Cherif ? Peut-être qu’il est également en proie à des pensées similaires.
Elle hésita un instant, les émotions se bousculant en elle, puis acquiesça.
– Tu as raison. Je ne peux pas laisser la peur m’empêcher d’explorer les chemins de mon cœur. Je lui parlerai lorsque l’occasion se présentera.
Un sourire complice illumina mon visage.
– Cherif sera ici dans quelques heures, accompagné de mes camarades de classe. Tu auras l’opportunité de lui parler.
– Non, je ne pense pas. Je dois rentrer avant qu’il ne soit trop tard, répondit-elle.
– D’accord. J’essaierai de lui parler quand il sera là. Ah, et n’oublie pas que l’anniversaire de Sophie est après-demain. J’espère sincèrement que tu seras présente pour célébrer ce moment avec nous.
Son regard s’illumina d’une lueur d’excitation.
– Oh oui, les soirées me manquent terriblement. J’ai hâte.
– C’est génial ! m’exclamai-je.

19h00.
Les contours de mon sommeil se dissipèrent lentement, chassés par les bruits insistants qui résonnaient à ma porte. À travers le voile de ma torpeur, je répondis d’une voix engourdie :
– Entrez donc.
La porte s’ouvrit avec précaution, dévoilant la silhouette familière d’Aicha, précédée d’une joyeuse troupe. Muhamed, Cherif, Libasse et Ramatoulaye suivaient de près, leurs sourires radieux illuminant la pièce de leur présence.
– Ilyan ! s’écria Ramatoulaye, la voix portée par l’excitation. Comment te portes-tu ?
– Divinement bien, à présent que vous êtes là, répondis-je avec un sourire chaleureux.
– Y a-t-il de quoi se manger en ces lieux ? demanda Cherif, toujours en quête de plaisirs gustatifs.
– Es-tu venu pour manger ou pour rendre visite à ton ami ? répliquai-je taquin.
– Je suis pour les deux, répliqua-t-il avec espièglerie, provoquant l’hilarité générale.
– Sinon, quand est-ce que tu reviens à l’école ? Tu nous manques, Ilyan, fit remarquer Aicha avec tendresse.
– Probablement la semaine prochaine, répondis-je.
– Encore une fois, est-ce qu’il n’y a vraiment rien à manger ici ? s’exclama Cherif, fouillant chaque recoin de la pièce du regard.
– Toi, si ton estomac crie famine, le réfrigérateur de ma mère dans la cuisine regorge de trésors, répliquai-je, amusé par son appétit insatiable.
– C’était pas si difficile, grommela-t-il en se dirigeant vers la cuisine d’un pas décidé.
– Comment se passent les cours ? m’enquis-je.
– À merveille, répondit Ousmane.
– Formidable ! s’exclamai-je
– Alors, qu’allons-nous faire ? s’enquit Ramatoulaye, impatiente de plonger dans une aventure mémorable.
– Et si nous nous lancions dans une partie effrénée de « Action ou Vérité » ? proposai-je.
Leurs visages s’illuminèrent d’anticipation, prêts à se lancer dans ce jeu qui allait révéler leurs secrets les plus enfouis.

Dans les replis de la soirée, un cercle s’est formé. Je me suis emparé d’une bouteille, et l’ai placée au centre.
– Que le jeu commence ! résonna ma voix.
J’ai fait tournoyer la bouteille avec une grâce maîtrisée, jusqu’à ce qu’elle s’immobilise, désignant Libasse.
– Action ou vérité ? lançai-je, plongeant mon regard profond dans ses yeux.
– Action, répondit-il.
– Enlève tes vêtements pendant dix minutes, révélai-je avec un sourire narquois.
– Mais il fait froid, objecta Libasse, cherchant un écho compatissant dans le cercle.
– Aucun refus de gage n’est toléré, rétorquai-je d’un ton impérieux.
Ainsi, Libasse ôta son pull et sa chemise, laissant entrevoir sa vulnérabilité face au froid hivernal. Il croisa ses bras sur ses épaules, cherchant à conjurer l’inconfort tout en bravant l’adversité glacée.
– À toi, Aicha, déclarai-je, transférant le pouvoir de la bouteille entre ses mains délicates, dont le regard pétillant trahissait une excitation.
Elle fit virevolter la bouteille avec une grâce féline, jusqu’à ce qu’elle s’arrête, impérieuse, devant Muhamed.
– Action ou vérité ? susurra Aicha.
– Vérité, répondit Muhamed.
– As-tu déjà goûté à l’interdit des liqueurs soûlant ? interrogea Aicha.
– Non, répondit-il avec assurance.
– Et combien de fois as-tu invité une belle âme à partager l’intimité de ton lit ? lançai-je.
– Une fois, révéla-t-il. Mais, il ne s’est rien passé.
– A toi, Cherif, annonça Aicha, faisant tourner la bouteille dans une danse hypnotique.
Les secondes s’écoulèrent, suspendues dans l’attente, jusqu’à ce que la bouteille s’immobilise, captivée par le mystère de Ramatoulaye.
– Dis-nous, Ramatoulaye, trouves-tu que Libasse incarne la beauté au masculin ? souffla Aicha d’une voix douce.
– Il n’est pas dénué de charme, admit Ramatoulaye.
– Es-tu venu ici, parmi nous, avec l’espoir secret de trouver quelqu’un ? demanda Aicha.
– Non, répliqua-t-elle.
– Et si tu te trouvais face à un danger imminent, qui appellerais-tu en premier ? chuchotai-je.
Elle prit le temps de la réflexion.
– Batman… Non, je plaisante. Mon père, déclara-t-elle avec le sourire.
Elle prit la bouteille et la tourna à son tour, jusqu’à ce que le destin capricieux me désignant moi, le patriarche de la soirée.
– Ilyan, action ou vérité ? interrogea Ramatoulaye, la curiosité pétillant dans ses yeux.
– Vérité, répondis-je, prêt à dévoiler une parcelle de mon existence.
– Alors, qu’en est-il entre toi et Amina ? demanda-t-elle.
– Pour l’instant, rien de particulier, avouai-je.
– En disant « pour l’instant », penses-tu à quelque chose dans l’avenir ? insinua Aicha.
– Oui, répondis-je.
Alors que je m’apprêtais à faire tourner la bouteille une fois de plus, le destin s’amusa à la figer devant Cherif.
– Action ou vérité ? demandai-je.
– Action, répondit-il, prêt à relever le défi qui lui serait lancé.
– Bien. Réalise pour nous cinquante pompes, annonçai-je.
Muhamed prit sur lui la tâche de compter les mouvements.
– Te sens-tu épuisé ? demanda Libasse.
– J’ai encore faim, répondit Cherif en se relevant. Je vais chercher de quoi me sustenter.
Il ne restait plus que Aicha, cette âme pleine de mystères et de charme.
– Action ou vérité ? lui demandai-je.
– Vérité, répondit-elle.
– Es-tu en couple ou célibataire ? s’enquit Libasse.
– En couple, avoua-t-elle.
– Et as-tu déjà connu l’étreinte passionnée de l’amour ? osa demander Ramatoulaye.
– Non, répondit-elle avec honnêteté.
– Bon, je pense que tout le monde a passé son tour, déclarai-je.

POINT DE VUE DE SOPHIE.

20h30.
Dans les tourments des préparatifs de mon anniversaire à venir, Ilyan et moi étions happés par le tumulte de dernières minutes, tandis que ma mère passait en revue avec minutie la liste des invités.
Son regard se posa sur moi, scrutant mes traits.
– Tu es resplendissante, même si je dénote une légère pâleur. Mais tu es toujours aussi ravissante, ma sœur.
– Je trouve que mon visage est affreux, lâchai-je d’un ton morose.
Ilyan fronça les sourcils, captant immédiatement ma détresse.
– Jamais, ô grand jamais, tu ne pourras arborer un visage affreux, répliqua-t-il. Pourquoi dis-tu cela ?
J’inspirai profondément, prête à dévoiler mes pensées.
– J’ai cessé de me bercer d’illusions quant à tout ce qui m’entoure, confiai-je.
Un silence pesant s’installa, tandis que je cherchais mes mots, essayant de les façonner pour exprimer l’essence même de mes pensées.
– Je me suis rendue compte que je me voilais la face depuis trop longtemps.
Ilyan se mordilla la lèvre, conscient de ma souffrance intérieure.
– Que veux-tu dire par là ? demanda-t-il.
– Ce n’est rien, répondis-je rapidement. Je n’aurais pas dû mentionner cela.
Un sourire forcé se dessina sur mes lèvres.
– Et toi, comment va Amina ? tentai-je de changer de sujet.
Ilyan accepta avec réticence de suivre ma diversion, comprenant que mon coeur était hermétiquement scellé, réticent à toute révélation supplémentaire.
– Elle est aussi adorable que toujours, répondit-il.
– Et des nouvelles de papa ? demandai-je.
Un soupçon d’amertume s’insinua dans la voix de Ilyan.
– Il n’a pas encore pris contact depuis son départ, confessa-t-il. Il te manque déjà ?
Je laissai échapper un rire amer.
– Moi ? Papa n’a jamais vraiment su comment m’appréhender. J’ai toujours été dans l’ombre, trop absorbée par mes lectures solitaires et mes écrits intimes. J’observais la vie plutôt que de la vivre, du moins c’est ce que je me suis dit récemment, en écoutant des théories troublantes.
La douleur que je tentais de dissimuler se manifesta dans ma voix, frappant les sensibilités de Ilyan.
– Qui a dit cela ? s’enquit-il d’un ton mordant.
– Peu importe, soufflai-je, évitant d’approfondir davantage le sujet. Nous parlions de papa. La plupart du temps, j’ai l’impression qu’il ne prêtait même pas attention à mon existence.
Un soupir mélancolique s’échappa des lèvres de Ilyan, reconnaissant en partie la justesse de mes propos. Dans un geste empreint de réconfort, il tendit sa main par-dessus la table et saisit la mienne.
– Il est en train de changer, Sophie. Tu vas t’en apercevoir très vite. Il essaie réellement de renouer avec nous, déclara-t-il.
Je fixai nos mains entrelacées.
– C’est toujours le même vieux Ilyan, à vouloir que tout soit rangé dans un joli petit paquet et que tout le monde s’entende bien, répliquai-je. N’as-t-il pas encore compris que la vie ne se déroule pas ainsi ?
Il me lança un regard empreint de douceur.
– Crois-moi, après avoir eu affaire avec Amina, je sais à quel point la vie peut te jouer de mauvais tours. Je préfère me concentrer sur le positif. Alors ça va, crois-moi !
Un sentiment d’épuisement s’empara de moi, pesant sur mes épaules fatiguées.
– Je suis un peu fatiguée, je pense que je vais me coucher, déclarai-je d’une voix lasse.
Ilyan acquiesça avec compréhension.
– J’attendais Amina, elle m’avait dit qu’elle passerait peut-être, avoua-t-il en quittant la table.
– Je te laisse, conclut-il sobrement, me laissant face à mes pensées tourbillonnantes alors que je m’éloignais, en quête de réconfort et de sérénité dans le silence de ma chambre solitaire.

POINT DE VUE DE JUNIOR.

23h15.
Deux jours s’étaient écoulés depuis que mes pas avaient déserté les corridors scolaires. Je demeurais, en vérité, cloîtré chez moi, ne franchissant même pas le seuil de ma porte. Ma mère n’avait pas encore éveillé le soupçon, mais je savais que son instinct maternel ne tarderait pas à s’éveiller, alimentant sa curiosité croissante.

Là, face à l’imposante demeure d’Amina, je ressentais une appréhension incommensurable. Cette appréhension naissait du simple fait que je craignais qu’elle ne me quitte définitivement si Ilyan venait à lui révéler la triste vérité. Dans mon esprit torturé, il était préférable que les mots sortent de ma bouche avant qu’ils ne s’échappent de celles d’une tierce personne.

Soudain, elles apparurent à l’horizon, Amina accompagnée de la mystérieuse Fatma. Leur marche était calme, empreinte de sérénité, leurs regards plongés dans l’écran lumineux de leurs téléphones. Échangeant des sourires complices, elles s’avançaient doucement vers moi. Mais dès que Fatma posa les yeux sur ma présence, elle fit immédiatement volte-face, telle une ombre fuyant la lumière. Son ressentiment à mon égard était palpable, fruit de mes remarques absurdes et inappropriées. En vérité, elle avait toujours nourri une aversion profonde à mon égard, une animosité qui ne s’était jamais estompée.
Amina, tiraillée par l’incertitude, demeurait de l’autre côté de la rue. D’un pas résolu, je me dressai et m’avançai vers elle.
– Amina, je t’attendais précisément. Comment vas-tu ? lançai-je.
– Ça va, répondit-elle d’un ton glacial.
– Je désirais ardemment te parler, insistai-je.
– Ah bon ! Qu’as-tu donc encore à me dire ? Que tu es désolé ? Que tu souhaites que nous renouions ? Que tout cela s’efface de nos mémoires ? répliqua-t-elle d’une voix teintée d’ironie, laissant percer sa colère à travers ces mots acerbes. Junior, tu incarnes le paroxysme de la faiblesse parmi tous les garçons qui ont jalonné ma vie. Tu n’es qu’un lâche, un être indigne. Plus personne dans mon entourage ne te porte estime, et moi non plus, cracha-t-elle avec une intensité qui aurait pu briser des vitres.
Elle chercha à s’échapper, à se soustraire à cette confrontation. D’un geste déterminé, je saisis sa main, faisant face à la tempête qui faisait rage dans son regard.
– Amina, tout ce que tu as exprimé est une triste réalité. Mais je ne suis pas ici pour cela, articulai-je d’une voix empreinte d’une sincérité profonde.
Elle sembla surprise, captivée par la tournure inattendue de la situation.
– Que souhaites-tu donc, Junior ? demanda-t-elle.
– D’abord, tu dois retrouver ton calme. Il m’est difficile de te révéler la vérité dans cet état d’agitation qui te consume. Sache également qu’il s’agit d’un accident regrettable, une tragédie dont je ne voulais en aucun cas être l’auteur. J’ai commis une erreur impardonnable et la douleur qu’elle suscite en moi est dévastatrice. Je me méprise moi-même en revivant cette sombre période, avouai-je, mes mots se frayant un chemin à travers l’oppression de mes regrets.
– Junior ! Putain ! Peux-tu me dire ce qu’il se passe ? me coupa-t-elle, impatiente.
– Amina, c’est moi qui l’ai fait, prononçai-je avec une voix empreinte de douleur.
– Quoi ? murmura-t-elle, incrédule.
– L’accident de Ilyan… c’était moi, avouai-je.
– Mais, Junior, est-ce que la lucidité te fuit ? Prends-tu conscience de l’ampleur de tes actes ? questionna Amina avec mépris.
– Je ne souhaitais nullement lui infliger le moindre mal, seulement échanger avec lui, me défendis-je, désemparé.
Mais les mots peinaient à dissiper l’ombre grandissante de mes erreurs.
– Et est-ce ainsi que tu as appris à communiquer, Junior ? rétorqua la voix d’Amina, teintée d’une colère froide. Tu sembles avoir perdu tout sens des convenances, tu es en train de perdre la raison !
– C’est à cause de toi, Amina, que j’en suis arrivé là. Je suis fou, oui, fou d’amour pour toi. Mais tu ne comprendras jamais la profondeur de mes sentiments. Pourquoi suis-je condamné à l’incompréhension ? Avant toi, je refusais de voir la vérité, aveuglé par les liens du cœur. Amina, je t’en supplie, essaie de saisir ne serait-ce qu’une parcelle de mon être, j’ai changé.
Le silence s’abattit alors, lourd et oppressant, enveloppant nos deux âmes égarées. Amina, telle une statue, me fixait d’un regard mêlé d’incrédulité et de compassion. Les secondes s’étiraient, semblables à des éternités suspendues dans le temps.
Finalement, elle brisa le silence, se frayant un chemin vers moi, m’enserrant dans ses bras. Dans cet étreinte salvatrice, elle répandit la chaleur réconfortante de son amour. Sa présence apaisait mes tumultes intérieurs.
Puis, lentement, elle se détacha de moi, plongeant son regard dans le mien.
– Rentre chez toi, il est tard, murmura-t-elle doucement.
Les mots étaient dénués de reproche, un simple rappel de réalité empreint de bienveillance.
– Merci d’avoir accordé du temps à ma détresse, parvins-je à articuler.
Et dans ce geste, un petit sourire se dessina sur les lèvres d’Amina, une promesse silencieuse que l’espoir n’était peut-être pas perdu.

POINT DE VUE DE LAÏCHA.

00h01.
Allongée sur le lit, mes yeux fixaient le plafond dans une contemplation infinie. La nuit se parait de son manteau étoilé, mais mon esprit, empli d’une douce tourmente, refusait de s’abandonner au sommeil. Les battements de mon cœur trahissaient une vérité qui m’envahissait irrésistiblement : j’étais prisonnière des délices enivrants de l’amour, emportée par les flots tumultueux de mes sentiments pour Cherif. Deux jours s’étaient écoulés depuis notre dernier échange, et chaque seconde semblait un supplice, une éternité d’absence.
Incapable de résister davantage, je saisis mon téléphone portable et m’engageai sur la voie périlleuse de la communication.
– Salut, petit garçon. Semble-t-il que je me sois évaporée de ton existence ?
La réponse ne tarda pas à poindre à l’horizon lumineux de l’écran.
– Laïcha, comment vas-tu ? En effet, cela fait une éternité.
– Je me porte à merveille. Et toi ?
– Les jours se suivent sans véritable éclat. Le sommeil se dérobe, me fuyant telle une étoile filante. Et toi, comment te retrouves-tu face aux douces caresses de la nuit ?
– Je suis prise au piège de l’insomnie, tout comme toi. Je pense que nous partageons cet état d’égarement.
– Mais pourquoi, donc, ne parviens-tu pas à trouver le sommeil ?
– Les pensées de quelqu’un qui me manque cruellement envahissent mon esprit, s’immiscent dans chaque recoin de mon âme en quête de réconfort.
– Ah, l’amertume de penser à quelqu’un qui n’accorde pas à ton égard la même attention brûlante.
– Comment peux-tu comprendre cela avec une telle justesse ?
– Cette situation m’est bien trop familière, une ombre qui m’accompagne régulièrement dans les ténèbres de mes pensées.
La peur s’empara de moi.
– As-tu osé lui dévoiler tes sentiments ?
– Non, j’ai peur.
– Nous partageons le même fardeau. Je ressens la même chose.
– C’est une épreuve ardue à surmonter.
– Néanmoins, il faut essayer de tenter de lui exprimer ce que tu ressens. Après tout, on ne sais jamais.
À cet instant précis, j’aurais volontiers jeté mon maudit téléphone et me serait effondrée en larmes. La réalité était cruelle, lorsque celui qui hantait nos pensées était lui-même captivé par une autre âme.
– Oui, j’ai pris ma décision, répondit-il. Je vais lui dévoiler mes sentiments avant qu’il ne soit trop tard.
Je ne trouvai même pas la force de lui répondre. Déposant mon téléphone, je me laissai submerger par un flot de larmes. L’amour semblait se dérober devant moi, comme une énigme insoluble. J’avais espéré trouver la personne qui m’était destinée, mais il semblerait que le destin en ait décidé autrement.

00h35.
Cinq minutes s’étaient à peine écoulées lorsque mon regard se posa sur un nouveau message : « Regarde par ta fenêtre. »
Comme guidée par une force mystérieuse, je me levai précipitamment et me dirigeai vers la fenêtre, mêlant excitation et appréhension. Là, à ma grande stupéfaction, Cherif se tenait en contrebas.
– Cherif ! Qu’est-ce que tu fais ici ? m’échappai-je, criant depuis le rebord de la fenêtre.
– Descends, j’ai quelque chose à te montrer, répondit-il.
Sans hésitation, je me précipitai vers la porte, l’ouvris et me trouvai face à lui, un sourire énigmatique illuminant son visage. Derrière son dos, il dissimulait quelque chose. Lentement, il se rapprocha de moi, ses yeux brillants d’émotion, et dévoila son trésor caché : un bouquet majestueux de fleurs.
Les mots me manquèrent devant une telle splendeur.
– Lorsque je t’ai parlé de mes pensées obsessionnelles envers une personne, de ma crainte de lui avouer mes sentiments, je parlais de toi, déclara-t-il. Depuis un moment, mes sentiments pour toi grandissent, mais je ne pouvais imaginer que tu puisses les partager. Aujourd’hui, je choisis de mettre de côté mes peurs, de m’affranchir des conséquences. Je souhaite faire face à la réalité sans crainte de ses répercussions.
Les larmes embuèrent mes yeux alors que je recevais cette déclaration sincère. Je pris délicatement le bouquet de fleurs entre mes mains, incapable d’articuler le moindre mot. Je me contentai de l’enlacer, laissant mes émotions parler à ma place.
Une fois de plus, je contemplai ce bouquet éblouissant avant de me tourner vers lui.
– Tu sais, la personne qui hantait mes pensées n’était autre que toi, susurrai-je.
Son étonnement était palpable.
– Oui, continuai-je. Je croyais déjà t’avoir perdu, et cela me rongeait de culpabilité.
Je m’inclinai doucement vers lui, déposant mes lèvres sur les siennes. Ce moment fut d’une beauté envoûtante, un instant suspendu dans l’éternité.

Chapitre 11

« Pourquoi les gens cessent-ils à un certain moment d'être tels que nous les avons connus ? »

POINT DE VUE DE MALIK.

Le lendemain, 10h05.
Depuis mon retour de l’aéroport, j’avais élu domicile en plein cœur de la ville, gardant pour moi seul l’annulation de mon voyage, à l’exception de ma mère. J’avais pris soin de la prévenir, sachant qu’elle résidait à proximité de notre foyer. Je me délectais de l’idée de leur réserver une surprise.

Tout au long de cette journée, une tension palpable m’avait étreint. Dans d’autres circonstances, j’aurais sans doute investi mon temps au travail pour m’évader, mais cette fois, je m’étais promis de demeurer à la maison, prêt à répondre à tout appel de Ilyan ou de Sophie, au cas où ils auraient besoin de moi. Bien qu’il ne soit guère dans leurs habitudes de solliciter mon aide, je m’en veux secrètement pour avoir, des années auparavant, semé l’idée qu’ils ne pouvaient compter sur moi.
Face à un silence devenu insoutenable, ou plutôt lorsque mon agitation se répercuta sur les nerfs de ma mère, c’est elle qui me suggéra d’aller flâner le long de la plage.
– Tu aimais ça, autrefois, me rappela-t-elle avec douceur. À l’époque où ton esprit n’était pas encombré par le poids du travail, au point de reléguer les choses véritablement importantes au second plan.
Je lui lançai un sourire.
– Il n’y que toi pour transformer une simple proposition en sermon sur mes péchés.
Elle éclata d’un rire léger.
– Il faut bien que je te rappelle ces choses-là, mon cher. Allez, vas-y, accorde-toi une promenade sur la plage. Cela te fera un bien fou de t’évader de cette cuisine où tu te morfonds. De mon côté, je dois terminer ma pâtisserie pour la partager avec Sophie demain.
– Tu as raison, comme toujours. Une escapade en bord de mer est exactement ce qu’il me faut pour apaiser mon esprit.

J’étais rempli d’une douce euphorie en retrouvant ma ville natale, un lieu où je me sentais véritablement chez moi. L’accomplissement de mon travail m’emplit de fierté, cette ville était devenue une authentique communauté, fidèle à mes aspirations. Cependant, un sentiment de regret s’immisçait en moi, celui de ne pas avoir consacré une part égale de ce temps à bâtir ma propre famille. Mon parcours professionnel avait englouti mes priorités au détriment de ce qui avait réellement de la valeur. Cette proposition de ma mère était comme une invitation à renouer avec les racines que j’avais laissé se dessécher. Dans cet environnement apaisant, peut-être pourrais-je retrouver la clarté qui me faisait tant défaut et, qui sait, rétablir ces liens familiaux que j’avais laissé se distendre.
Mais maintenant, il était temps de trouver un cadeau digne de Sophie, un présent qui illuminerait son visage de joie.
Après une réflexion approfondie, une idée germa en moi, soudaine et prometteuse.
– J’ai trouvé ! m’exclamai-je, enthousiaste.
Je saisis mon téléphone et composai le numéro d’un de mes collègues, Hassan, qui se trouvait actuellement dans la ville.

POINT DE VUE DE AMINA.

11h30.
Depuis la veille au soir, les mots prononcés par Junior continuaient de résonner dans les recoins de mon esprit. C’était à croire que ce jeune homme était destiné à semer le chaos partout où il passait. Une profonde compassion m’envahissait à son égard. Mais pourquoi donc Ilyan avait-il gardé le silence à ce sujet ? Il était bien au courant de la situation. Je devais m’entretenir avec lui, sans plus tarder. Je saisis mon téléphone portable et lui envoyai un message.
– Ilyan, serait-il possible que nous nous rencontrions ? J’ai besoin de te parler.
La réponse ne se fit pas attendre.
– Hier soir, je n’avais pas eu de tes nouvelles.
– J’étais si absorbée par mes occupations que je n’ai pas pu me rendre chez toi.
– Tu veux que l’on se rencontre ? Pourquoi ne viens-tu pas à la maison ?
– J’aimerais que nous nous retrouvions ailleurs.
– Bien, retrouvons-nous au parc alors. Cela te convient-il ?
– Oui, d’accord. À tout de suite.
Je déposai mon téléphone et me dirigeai vers ma garde-robe afin de choisir une tenue adéquate. Je décidai d’opter pour des vêtements décontractés, reflétant l’ambiance de notre rendez-vous. Je saisis mon sac et quittai la maison d’un pas déterminé.

Le parc était presque vide alors que je rejoignais Ilyan sur le banc. Il était assis là, le regard perdu dans l’horizon, le portable dans la main. Un sourire s’épanouit sur son visage lorsqu’il me vit m’approcher.
– Amina, tu es resplendissante, murmura-t-il.
Je le remerciai d’un signe de tête, mais il pouvait clairement lire l’inquiétude qui habitait mes yeux.
– Qu’est-ce qui te tracasse ? me demanda-t-il.
Je laissai échapper un soupir profond.
– Pourquoi ne nous as-tu rien dit ? commençai-je, mon regard fixé intensément sur lui. Tu savais, Ilyan, tu savais tout.
Un léger froncement de sourcils apparut sur son visage.
– Que veux-tu dire, Amina ? Je crains de ne pas saisir de quoi tu parles, répondit-il.
– Ilyan, arrête cette comédie. Tu sais parfaitement de quoi je parle, répliquai-je d’un ton déterminé. C’est Junior qui était à l’origine de ton accident. Tu le savais depuis le début mais tu as préféré ne rien dire, même à tes parents.
Un silence pesant s’installa entre nous, puis il prit ma main dans la sienne avec douceur.
– Je suis désolé, Amina, de ne pas t’avoir tout dit plus tôt. Je connaissais son implication, mais j’ai choisi de garder le silence. C’est par ma faute que l’accident est arrivé. C’est moi qui l’ai poussé en premier, le faisant trébucher. J’ai voulu lui éviter des ennuis, car si ma famille avait découvert qu’il était responsable de mon hospitalisation, il aurait de très gros problèmes. Je suis convaincu qu’il n’avait pas l’intention que cela se produise.
– Tu défends celui qui t’a fait du mal, articulai-je.
Il secoua doucement la tête.
– Cela fait partie du passé. Ne t’en fais pas. S’il te plaît, offre-moi un sourire. Je ne supporte pas de te voir dans cet état.
Je me laissai convaincre, incapable de rester en colère contre lui. Ilyan était un homme d’une bonté infinie. Il m’enlaça tendrement, ses bras réconfortants enroulés autour de moi.

POINT DE VUE DE SOPHIE.

15h00.
Ilyan fut tiré de sa chambre par mon appel pressant.
– Viens donc ici, l’invitai-je.
Curieux, il s’approcha.
– Mais que se passe-t-il encore ?
– Ilyan, je te présente Momo, annonçai-je avec une pointe d’excitation.
Momo, à son tour, se présenta poliment.
– Enchanté, Ilyan, dit-il en lui tendant la main.
Un doux échange de regards accompagna leurs salutations.
– Alors, maintenant tu as trouvé quelqu’un d’autre qui compte plus pour toi que moi ?
– Oh, Ilyan, tu es toujours et seras toujours mon frère préféré, lui assurai-je tendrement, priant Momo de jouer le jeu et d’ignorer les taquineries.
Le rire éclata dans la pièce.
– Nous devons sortir pendant un instant, faire quelques pas à l’extérieur, annonçai-je.
– D’accord, consentit-il. À plus tard, dit-il en adressant un regard à Momo. Je compte sur toi pour veiller sur elle.
– Ne t’en fais pas, Ilyan. Je suis capable de me défendre, ajouta-t-il avec une pointe d’humour dans la voix.
Un éclat de rire accompagna ces paroles.
– Vous êtes véritablement divertissants, s’exclama Ilyan.
Il nous accompagna jusqu’à la porte.
– Que cette sortie soit belle et pleine de joie, nous souhaita-t-il.

17h00.
Momo semblait déterminé à me pousser à bout. Il m’avait entraînée dans une véritable course effrénée à travers la ville, en commençant par le meilleur restaurant où il m’avait régalée de mets exquis. Puis, il avait décidé de m’emmener au zoo, un endroit que je n’avais jamais eu l’occasion de visiter. J’étais émerveillée de voir de mes propres yeux ces espèces animales que je n’avais connues qu’à travers un écran de télévision. C’était une expérience formidable. Et pour couronner le tout, il avait insisté pour faire du shopping. J’avais craqué pour les plus belles robes de soirée, des chaussures à faire tourner les têtes, ainsi que d’autres merveilles qui avaient fait grimper ma fatigue d’un cran.
– Tu es épuisée ? me demanda-t-il avec un sourire malicieux.
– Oh, énormément, soufflai-je.
– Eh bien, je n’en ai pas encore fini avec toi, lança-t-il. Que dirais-tu d’une balade sur la plage pour clôturer cette journée en beauté ?
– Momo… Je veux juste rentrer chez moi, avouai-je d’un ton épuisé.
– S’il te plaît, insista-t-il, cherchant à m’amadouer.
– Hum… D’accord. Tu es vraiment insupportable, tu le sais ça ? lui lançai-je en soupirant.
– C’est pour ça que tu m’aimes, répliqua-t-il avec un clin d’œil espiègle.
– Qui t’a dit que je t’aimais ? ripostai-je.
– Hum, allez, dis-le, insista-t-il.
– Non, refusai-je.
– Pourquoi ? s’enquit-il.
– Je ne veux pas, répliquai-je.
– D’accord, contenta-t-il de dire.

Nous nous rendîmes ensemble à la plage pour une agréable promenade. Tout au long du trajet, Momo garda le silence, se contentant d’admirer la vue magnifique de la plage. Une culpabilité grandissante s’empara de moi. J’aurais dû lui dire ce qu’il voulait entendre, après tout ce qu’il avait fait pour moi. Le silence pesant entre nous devenait de plus en plus inconfortable.
– Momo ? l’appelai-je doucement.
Il se tourna vers moi, attendant ma parole.
– Je t’aime, avouai-je finalement.
Un silence s’installa pendant quelques secondes, puis Momo s’approcha de moi, déposant tendrement ses lèvres sur les miennes. Un frisson parcourut tout mon être, enveloppé dans une chaleur délicieuse. Je souhaitais ardemment que ce moment puisse durer éternellement.

POINT DE VUE DE MOUSSA.

17h30.
Seul dans ma chambre, je me trouvais devant la télévision sans réellement prêter attention à ce qui s’y déroulait. Mes pensées étaient entièrement tournées vers Fatma. J’avais un désir ardent de lui parler, de me connecter avec elle. Je pris mon téléphone et composai son numéro.
Après cinq bips, elle décrocha.
– Hé Princesse ! Comment vas-tu ? lançai-je avec enthousiasme.
– Ça va super bien. Et toi ? répondit-elle d’une voix douce.
– Tu me manques, confessai-je.
– Moi aussi, tu me manques, avoua-t-elle tendrement.
– Vraiment ? demandai-je.
– Oui, bien sûr, affirma-t-elle.
– Qu’est-ce que tu fais en ce moment ? questionnai-je.
– J’aide ma mère dans la cuisine, répondit-elle.
– Es-tu prête pour la soirée de demain chez Ilyan ? m’enquis-je.
– Oui, je suis prête. D’ailleurs, en parlant de Ilyan, j’espère qu’il va mieux, exprima-t-elle.
– Il va très bien, rassurai-je. Il s’est bien rétabli.
– Super ! J’avais tellement peur pour lui, souffla-t-elle, soulagée.
– Il se porte à merveille, assurai-je. Nous nous verrons demain.
– Oui, à demain, conclut-elle.
Je raccrochai et à ce moment précis, ma sœur Laïcha fit son entrée dans ma chambre.
– Tu parlais avec qui ? me demanda-t-elle curieusement.
– En quoi ça te concerne ? répliquai-je.
– C’est juste une question innocente, dit-elle en esquissant un sourire.
– C’était Fatma, ma petite amie, avouai-je.
– Ah bon ! Petite amie ? Tu ne me l’as pas encore présentée, remarqua-t-elle.
– L’occasion ne manquera pas, lui assurai-je.
– Si tu le dis, répondit-elle.
– Sinon, comment vas-tu ? demandai-je.
– Ça va super bien. Je dois sortir dans quelques minutes pour aller faire du shopping, révéla-t-elle avec enthousiasme.
– Tu sembles d’humeur étrange aujourd’hui, qu’est-ce qui se passe ? m’enquis-je.
– Mais rien, tu recommences à te faire des idées, balaya-t-elle mes interrogations.
Pendant notre discussion, elle reçut un message qu’elle ouvrit avec un sourire qui se dessina immédiatement sur ses lèvres. Puis, elle releva la tête pour me faire face.
– Mais quoi encore ? m’interrogea-t-elle, intriguée.
– C’est Cherif qui t’a envoyé un message, admis-je.
– Comment le sais-tu ? demanda-t-elle.
– J’ai vu son nom s’afficher sur la barre des notifications, expliquai-je.
– Oui, c’est lui. D’ailleurs, il m’attend devant la porte, annonça-t-elle.
– Êtes-vous ensemble ? questionnai-je, curieux.
– Oui, répondit-elle simplement.
– Depuis quand ? insistai-je.
– C’est bon là, je ne t’ai pas posé autant de questions concernant Fatma, répliqua-t-elle avec une pointe de taquinerie.
– C’était juste des questions innocentes, rétorquai-je en rigolant.
– À tout à l’heure, dit-elle en se dirigeant vers la porte.
– Fais bien attention, lui lançai-je.

POINT DE VUE DE JUNIOR.

18h02.
Les tourments d’Amina hantaient mes pensées depuis la veille, une empreinte indélébile sur mon esprit. L’idée de la perdre à jamais me déchirait le cœur. Je me demandais sans relâche s’il existait une chance de renouer avec elle, de rétablir le lien qui s’était brisé entre nous. Les interrogations se bousculaient dans ma tête, cherchant désespérément des réponses. Une balade solitaire sur la plage, accompagnée du spectacle flamboyant du coucher du soleil, m’apparaissait comme un baume réconfortant.

Mes pas, nus et libres, s’enfonçaient doucement dans le sable, effleurant la grève qui s’étendait à l’infini. Chaque grain se faisait le témoin silencieux de mes pensées les plus intimes. Un sentiment d’apaisement émanait de cet océan qui s’étendait devant moi, et je me résolus à m’enivrer de cette atmosphère sereine. Après une marche méditative, j’optai enfin pour un lieu où m’installer, cherchant refuge auprès d’une retraite éphémère. Mon portable sortit de ma poche, tandis que mes écouteurs enveloppaient délicatement mes oreilles. Le son monta crescendo, atteignant le volume maximum, comme pour étouffer les tumultes de mon esprit et me plonger dans une parenthèse musicale salvatrice.

18h30.
Je levai les yeux et aperçus Ilyan qui se dirigeait vers moi à quelques centaines de mètres de distance. Son allure calme et concentrée, son regard fixé sur les vagues qui s’écrasaient sur le rivage, suscitèrent en moi une stupeur paralysante. Mon cœur s’emballa à l’idée de cette rencontre inattendue.
– Bonsoir, Junior, lança-t-il.
Je lui répondis simplement d’un signe de tête. La langue nouée, j’étais dans un état de vulnérabilité que je ne m’expliquais pas.
– Tu savais que je serais ici ? demanda-t-il.
– Non, pas du tout, réussis-je à articuler.
– Vraiment ? s’enquit-il.
– Oui, répondis-je.
Un silence tendu s’installa entre nous.
– Écoute-moi, Ilyan, commençai-je d’une voix empreinte de remords. Je suis vraiment désolé pour ce qui s’est passé entre nous. Je n’ai jamais voulu que les choses en arrivent là.
– Pourquoi as-tu fait ça ? me demanda-t-il.
– C’était une question de jalousie, avouai-je à contrecœur.
– Nous ne sommes même pas ensemble, Amina et moi, précisa-t-il.
– Je le sais, mais vous êtes si proches l’un de l’autre. Je regrette sincèrement d’avoir rompu avec elle. C’est une fille exceptionnelle. Tu l’aimes, n’est-ce pas ? lançai-je.
– Je ne suis pas ici pour parler de ça avec toi, rétorqua-t-il fermement.
– Je comprends, mais sache que vous seriez heureux ensemble, ajoutai-je.
Sa surprise se lisait clairement sur son visage, comme s’il ne s’attendait pas à une telle révélation de ma part.
– Comment ça ? demanda-t-il.
– J’ai pris le temps de réfléchir sérieusement à cette question, et je pense sincèrement que la meilleure chose que je puisse faire est de la laisser vivre sa vie avec qui elle souhaite. Après tout ce que j’ai fait, je ne peux pas prétendre mériter son amour. Je tiens également à te remercier de ne pas avoir porté plainte contre moi. Cela montre la grandeur de ton cœur. Je suis sûr qu’Amina sera ravie de te savoir à ses côtés. Quant à moi, je dois quitter cette ville pour aller vivre avec mon père à l’étranger. Transmets mes salutations à Amina, lui dis-je avec sincérité.
Je me levai, gardant mon regard fixé sur Ilyan, qui demeurait silencieux, sans émettre le moindre son. Un sourire se dessina sur mon visage, avant de me retourner et de m’éloigner, disparaissant peu à peu de son champ de vision.

POINT DE VUE DE MALIK.

20h15.
Sur la route, ma voiture fendait l’air, libérée de toute entrave. La destination était la demeure d’Hassan, mon ami de longue date. Il n’y avait pas pratiquement d’embouteillages sur la route, me permettant d’arriver bien avant l’heure convenue.

Je franchis le seuil de la maison, accueilli par le gardien qui me conduisit avec déférence jusqu’au salon où Hassan m’attendait, se levant à ma vue. Un sourire chaleureux éclairait son visage tandis qu’il me tendait la main, scellant notre rencontre.
– Je t’attendais impatiemment, déclara-t-il.
– Dis-moi que tu as pu trouver ce que je t’ai demandé, lançai-je très impatient d’entendre sa réponse.
– Les affaires dont nous avions discuté ont été trouvées avec diligence, répliqua-t-il.
Les documents qu’il avait réuni me furent transmis. Je les examinai brièvement avant d’acquiescer.
– Merci infiniment, cher ami, d’avoir accompli cette mission avec célérité et efficacité, lui témoignai-je.
– Tu n’as pas à me remercier, c’est un plaisir de pouvoir t’assister, répondit-il.
Son regard se posa alors sur les papiers soigneusement emballé.
– Et à qui est destiné ce présent ? interrogea-t-il.
– C’est pour ma fille, je souhaite lui offrir en l’honneur de son anniversaire, demain, expliquai-je.
– Une idée des plus merveilleuses, s’exclama-t-il avec enthousiasme. J’espère sincèrement qu’elle l’appréciera.
– Je l’espère également, confiai-je en me levant. Je te laisse à tes occupations, nous nous reverrons plus tard.
– À plus tard, mon ami. Porte mes salutations à ta fille, me souhaita-t-il.
La soirée se profilait avec une promesse d’émotions et de joie, une célébration qui marquerait un jalon précieux dans le voyage de nos vies entrelacées.

POINT DE VUE DE OMNISCIENT.

22h00.
Après sa rencontre avec Junior, Ilyan se mit à l’abri de ses soucis dans une paire de chaussures de sport. Comme une bête en cage, il dévala les petites artères de la ville, cherchant désespérément une échappatoire. D’ordinaire, la course à pied suffisait à apaiser son esprit tourmenté, mais aujourd’hui, sa mauvaise humeur grandissait de façon inquiétante, se nourrissant de chaque pas qu’il faisait.

Quand il franchit enfin le seuil de son foyer, il esquiva sa sœur d’un geste brusque, sans même daigner lui accorder un regard. Son unique préoccupation était de s’engouffrer dans l’intimité de sa chambre, loin des interrogations inévitables qui l’attendaient. Allongé sur son lit, lourd de pensées, son téléphone portable entre les mains, les mots lui manquaient pour exprimer son désarroi.
Dans l’obscurité de sa chambre, Ilyan tenta de fermer les yeux, espérant ainsi conjurer les révélations de Junior qui hantaient son esprit.
Cependant, à ce moment précis, il remarqua sa sœur se tenant devant la porte de sa chambre, l’observant en silence.
– Tu m’espionnes ? demanda-t-il d’un ton accusateur.
– Non ! J’ai frappé à la porte, mais tu ne m’as pas entendue, répondit-elle précipitamment.
– Bon, viens t’asseoir, l’invita-t-il enfin.
– Tu peux me dire ce qui t’arrive ? insista-t-elle doucement.
– Quoi ? Je vais bien, mentit-il d’une voix faible.
– Je sens que ça ne va pas du tout. Tu es passé devant moi sans me saluer. Si tu ne me dis pas ce qui se passe, je vais tout raconter à maman, menaça-t-elle d’un ton sérieux.
– Tu me fais du chantage maintenant ? répliqua-t-il.
– Pas du tout, c’est pour ton bien, répondit-elle.
– J’ai juste eu une petite discussion avec Junior, finit-il par avouer.
– Qui est Junior ? demanda-t-elle.
– L’ex-petit ami d’Amina, expliqua-t-il.
– Vous vous êtes disputés ? s’enquit-elle, soucieuse.
– Non, on a juste parlé. Et tu sais, c’était lui la cause de mon accident, révéla-t-il.
– Quoi ? Tu le savais avant ? Pourquoi ne l’as-tu pas dit ? s’exclama-t-elle.
– Je ne voulais pas plus de problèmes avec lui. Il m’a confié qu’il se sentait très mal à l’aise de me voir souvent traîner avec Amina. Il m’a également informé qu’il quitterait le pays pour partir vivre chez son père, révéla-t-il.
– Comment ça ? demanda Sophie, étonnée.
– C’est quelque chose que je n’arrive toujours pas à comprendre, admit-il, troublé.
– Amina est au courant de tout ça ? interrogea sa sœur.
– Pour l’accident, oui. Mais pour la seconde partie, je ne pense pas, à moins que Junior ne lui en ait parlé, répondit-il.
– Tu dois faire attention à tes choix, réfléchir attentivement avant de prendre une décision, conseilla sa sœur en se levant du lit. Je vais en bas pour servir le dîner, on t’attend.
– D’accord, acquiesça-t-il, laissant ses pensées vagabonder dans la solitude de sa chambre, conscient qu’il devait faire face à des décisions difficiles qui l’attendaient.

Chapitre 12

« Et surtout, n'oubliez pas, à chaque problème sa solution. Et s'il n'y a pas de solution, c'est qu'il n'y avait pas de problème. »

POINT DE VUE OMNISCIENT.

Le lendemain, 08h03.
Le samedi matin, Momo s’engagea dans une quête pour dénicher les cadeaux parfaits pour sa tendre bien-aimée. En ce jour radieux, Sophie célébrait ses vingt-deux ans, bien que leur histoire ne comptât que six mois d’existence. Mais pour Momo, chaque instant passé à ses côtés était un trésor, une évidence qui s’ancrait irrémédiablement dans son âme.

Tels des trésors précieux, les présents soigneusement sélectionnés reposaient entre ses bras. Il quitta la boutique, le visage illuminé par l’anticipation des retrouvailles à venir. Avant de rentrer chez lui, il ressentit le besoin de parler avec Sophie par le biais du téléphone.
– Salut, mon amour, comment vas-tu ? s’enquit-il.
– Mon ange, je vais merveilleusement bien après avoir entendu ta voix, murmura-t-elle avec douceur.
– Ah, vraiment ? Te manquais-je donc ? demanda-t-il.
– Oh oui, éperdument. J’attends avec impatience de te retrouver ce soir, confia-t-elle.
– Pour ce soir, je te réserve une grande surprise, chuchota-t-il.
– Une surprise ? Qu’est-ce que c’est ? s’enquit-elle.
– Tu sauras ce soir, ma chère. Une merveille que je souhaite préserver jusqu’au moment propice, répondit-il.
– Mais je suis dans l’incapacité d’attendre ! S’il te plaît, implora-t-elle, une pointe de supplication dans sa voix.
– Non, je préfère garder ce secret suspendu dans l’air du temps. On se dit à ce soir ? proposa-t-il.
– Oui, à ce soir, répondit-elle.
– Salut, murmura-t-il, raccrochant délicatement avant de s’installer dans sa voiture.
Durant le trajet, ses prières se mêlaient à la mélodie des rues, implorant que tout se déroule selon ses désirs les plus chers. Une soirée mémorable se profilait à l’horizon, et Momo nourrissait l’espoir fervent qu’elle scellerait leur amour d’une manière indélébile.

10h15.
Amina, émergeant avec peine de sa nuit presque sans repos, lutta pour quitter le confort de son lit. Ses paupières lourdes se soulevèrent enfin alors qu’elle se dirigeait d’un pas léthargique vers la salle de bain. Après avoir pris une douche, elle se dirigea vers son armoire en quête d’une tenue appropriée pour la journée.
À ce moment-là, sa mère pénétra dans la chambre, une enveloppe en main.
– Je crois que c’est pour toi, annonça-t-elle en lui tendant le précieux courrier.
– Pour moi ? s’étonna Amina.
– Oui, je dois sortir pour aller au supermarché. À ce soir, expliqua sa mère avant de s’éclipser.
– D’accord maman, je t’aime, répondit Amina.
Amina prit un instant pour ouvrir l’enveloppe, sentant une appréhension monter en elle. À l’intérieur, elle découvrit une lettre. Lorsqu’elle vit qu’elle provenait de Junior, elle s’effondra doucement sur le lit.

« Chère Amina,

Dans l’ombre d’une triste solitude, je t’adresse ces mots chargés de regrets, espérant que mes lignes atteindront ton cœur. C’est avec une profonde douleur que je te livre cette lettre, où se mêlent souvenirs brûlants et confessions sincères. Je veux que tu saches combien je suis reconnaissant d’avoir eu le privilège de partager un fragment de ton existence avec moi. La rencontre qui a scellé nos destins, cette magie fugace, m’a révélé la fille extraordinaire que tu étais, portant en toi un cœur immense, prêt à embrasser l’amour avec ferveur.

Je me suis efforcé de te combler de bonheur, de t’offrir une vie qui aurait comblé tes rêves les plus profonds. Hélas, malgré ma volonté, j’ai échoué à matérialiser tes aspirations les plus secrètes. Je n’ai pu concrétiser cette promesse d’une existence enchanteresse, qui aurait été tienne.

En ces mots, j’implore ton pardon, cherchant rédemption pour les maux que je t’ai infligés. Jamais n’était-ce mon intention de te causer souffrance. Dès l’instant où tu m’as quitté, j’ai compris à quel point tu occupais une place essentielle dans ma vie. Mais hélas, mes efforts de reconquête furent vains, trop tardifs pour inverser le cours du destin. Dans un désarroi infantile, j’ai commis des actes si déraisonnables que mes regrets les enveloppent maintenant de manière dévorante. Je sais que tu me détestes plus que tout au monde, ce poids écrasant qui pèse sur ton cœur. Mais je comprends et accepte ta position, sans omettre la lourdeur de mes fautes.

Tel un naufragé abandonnant sa terre natale, je t’annonce mon départ imminent vers d’autres horizons, aux côtés de mon père. Je ne souhaite plus être l’obstacle qui entrave ta quête de bonheur. Tu mérites une félicité infinie après tout ce que tu as enduré. Ton prénom dansera toujours sur mes lèvres, ton visage s’inscrira éternellement dans les méandres de ma mémoire, et la flamme de notre première soirée continuera de briller dans l’obscurité de mes souvenirs. Que le reste de ta vie soit empli de moments d’une pure béatitude, et je t’implore humblement d’accorder ton pardon.

Au revoir, Amina… »

Les larmes perlèrent aux coins des yeux d’Amina tandis qu’elle achevait la lecture de la lettre. Un torrent d’émotions la submergea, éveillant en elle un sentiment de culpabilité déchirant face au départ de Junior. Une lueur fugace traversa son esprit, l’invitant à envisager une seconde chance, un nouveau départ à leurs histoires entrelacées. Pourtant, les souvenirs des tourments infligés par Junior s’immisçaient sans cesse, réduisant à néant toute possibilité de réconciliation.

En cet instant, Amina ressentit un besoin poignant de réconfort, mais elle se trouvait seule dans l’intimité silencieuse de sa demeure. Guidée par une impulsion désespérée, elle saisit son téléphone et composa un numéro au hasard.
La réponse, presque miraculeusement, fut immédiate, suscitant à la fois soulagement et appréhension.
Une voix familière s’éleva de l’autre côté de la ligne, brisant la solitude pesante d’Amina.
– Salut Amina ! Comment vas-tu ? s’enquit Fatma.
La voix tremblante, Amina articula d’un ton bas, trahissant la profondeur de son mal-être.
– Fatma, ça ne va pas du tout.
– Qu’est-ce qui se passe ?
Amina, déconcertée et incapable de formuler une réponse claire, se plongea dans un silence troublé. Comment pouvait-il être possible qu’elle ressente une telle tristesse, un déchirement de l’âme, pour un homme qu’elle avait tant détesté ? Un homme qu’elle s’était efforcée d’évincer de sa vie avec force et détermination ? Les sentiments qui l’assaillaient étaient d’une puissance qui dépassait son entendement, submergeant son être tout entier.
– Amina, tu es là ? Dis-moi ce qui t’arrive s’il te plaît, insista Fatma.
– Fatma, il s’agit de Junior, parvint à articuler Amina.
Une exclamation indignée jaillit des lèvres de Fatma.
– Encore ce con, oh mon Dieu. Ne bouge pas de chez toi, j’arrive dans quelques minutes.
Désemparée, Amina tenta de raisonner son amie.
– Non, Fatma, ce n’est pas la peine…
Mais ses paroles se perdaient déjà dans le néant, car Fatma avait déjà raccroché, emplie d’une détermination irrépressible à venir en aide à son amie.
Amina se trouvait là, pétrifiée par l’élan de générosité de Fatma. Elle réalisa alors qu’elle n’était pas seule, qu’il existait encore des âmes compatissantes prêtes à la soutenir dans les abîmes de sa douleur.

POINT DE VUE DE FATMA.

10h30.
Alors que je me rendais chez Amina, les pensées tourbillonnaient dans ma tête. Dans la voiture, je cherchais désespérément un moyen de prévenir Ilyan sans éveiller les soupçons d’Amina. Cependant, je réalisai rapidement que cela pourrait compliquer davantage la situation. Je décidai donc de ne pas ajouter de complexité inutile. Qu’est-ce que Junior pouvait bien faire à mon amie pour la plonger dans cet état de détresse ?
La voix du chauffeur me tira de mes réflexions intenses.
– Nous sommes arrivés ! annonça-t-il.
– Merci beaucoup, répondis-je, sortant de la voiture tout en lui remettant le montant de la course.
Un léger sourire s’épanouit sur son visage avant qu’il ne reprenne la route.
Je me retrouvai donc seule devant la porte de la maison d’Amina. Je pris une pause pour sonner, remarquant que la porte était verrouillée.
Un homme de taille moyenne, arborant une barbe soigneusement entretenue, ouvrit la porte pour moi. C’était le jardinier, fidèle serviteur de la demeure. Je le remerciai d’un signe de tête et pénétrai dans la chambre d’Amina, où je la découvris allongée sur le lit. Elle semblait épuisée, les traces de ses larmes encore visibles sur son visage. Je m’approchai d’elle avec précaution, veillant à ne pas faire le moindre bruit, et posai doucement ma main sur ses joues humidifiées par les larmes. À ce contact, elle s’éveilla, affichant un sourire fragile.
– Tu es là depuis quand ? demanda-t-elle.
– Je viens tout juste d’arriver, répondis-je d’une voix apaisante.
– Tu veux boire quelque chose ? proposa-t-elle.
– J’apprécierais, mais cela peut attendre. En revanche, pourrais-tu me dire ce qui t’arrive ? Je suis sincèrement inquiète pour toi.
Elle me tendit une enveloppe que j’ouvris immédiatement. À l’intérieur, une feuille attendait mon regard, probablement une lettre. Je pris le temps de la parcourir, lisant chaque mot entre les lignes, m’immergeant dans son contenu du début à la fin.

Les paroles de la lettre semblaient avoir un impact différent sur moi que sur Amina. Pour ma part, je percevais en ces mots une opportunité de stabilité et de renouveau dans la vie de mon amie.
– Depuis quand as-tu reçu cette lettre ? demandai-je.
– Je l’ai eue ce matin. Ma mère me l’a remise, répondit-elle.
– Pourquoi es-tu si attristée par ces paroles ? insistai-je.
– Comment peux-tu dire ça ? Tu voudrais que je me réjouisse de cette décision ? Fatma, tu sais très bien que c’est à cause de moi qu’il en est arrivé là. Même s’il n’y avait plus rien entre nous, je ne peux pas me résoudre à lui souhaiter un tel destin.
– Écoute-moi, Amina, commençai-je doucement. Je comprends à quel point il est difficile pour toi d’accepter que tu n’y es pour rien. Mais il a pris cette décision de son propre chef, indépendamment de tes actions. Ne te tourmente pas avec des questions sans réponse. Au contraire, essaie d’en tirer quelque chose de positif.
– Comment pourrais-je en profiter ? demanda-t-elle, perplexe.
– Je sais que tu es follement amoureuse de Ilyan, même si tu te l’interdis, révélai-je. Tu fais semblant de cacher tes sentiments envers lui, mais essaie, ne serait-ce qu’une fois, d’assumer ce que tu ressens réellement. Ce garçon a captivé ton attention dès votre première rencontre. Combien de fois t’a-t-il proposé de sortir avec lui ? Je suis sûre et certaine que Ilyan t’aime bien plus que tu ne peux l’imaginer. Mets ta fierté de côté et essaie de lui parler, sinon cette situation continuera à te tourmenter sans relâche.
– Mais comment lui dire tout cela ? Tu sais bien que ce n’est pas si simple, exprima Amina, doutant de sa capacité à agir.
– Sois simplement toi-même. Tu en es tout à fait capable, l’encourageai-je.
– Non, je ne peux pas le faire, répliqua-t-elle, perdant un peu confiance en elle-même.
– Arrête de dire cela, Amina. Pourquoi te sous-estimes-tu ainsi ? questionnai-je.
– Je ne me sous-estime pas, se défendit-elle.
– Va parler à Ilyan et exprime-lui ce que tu penses de lui, ce que tu ressens pour lui, l’incitai-je. Donne-lui la chance de te prendre dans ses bras et de te protéger.
– Tu crois vraiment qu’il s’intéresse encore à moi après tout ce qui s’est passé ? douta-t-elle.
– Non, je ne le crois pas, je le sais, affirmai-je avec conviction.
– Je ne suis pas certaine que ce soit une bonne idée, Fatma.
– Tu sais, je ne te pousse pas à te mettre avec quelqu’un que tu n’aimes pas. Mais réfléchis-y attentivement, Amina. Tu sauras que c’est la meilleure décision à prendre.
– Je vais prendre le temps d’y réfléchir, décida-t-elle.
– D’accord, si c’est ce que tu souhaites.
– Je suis vraiment reconnaissante que tu sois ici, dit-elle avec gratitude.
– Je serai toujours là pour toi, peu importe où nous nous trouvons, assurai-je.
– Merci infiniment, répondit-elle sincèrement.
– Allez, lève-toi, nous avons une soirée à préparer, la motivai-je.
– Vas-y doucement, petite connasse, plaisanta-t-elle. Mais au fait, j’ai oublié de te demander des nouvelles de Moussa. Comment va-t-il ?
– Il se porte à merveille, annonçai-je avec enthousiasme.
– C’est génial, se réjouit-elle.
Nous étions prêtes à passer une soirée mémorable, et qui sait, peut-être que cette conversation avec Ilyan apporterait des changements inattendus dans la vie d’Amina.

POINT DE VUE DE LAÏCHA.

11h30.
Alors que les dernières lignes de mon travail d’Histoire et de Géographie se dessinaient sur le papier, une fatigue pesante m’envahissait. Depuis le matin, je m’étais enlisée devant mes cahiers, épuisée par la somme de connaissances à assimiler. Un besoin pressant d’étancher ma soif me poussa à me diriger d’un pas las vers la cuisine, où une gorgée d’eau fraîche s’imposait pour adoucir ma gorge asséchée.

Les murmures de ma mère, depuis le retour de Moussa à la maison, résonnaient comme un écho persistant dans mon esprit. Elle dénonçait, à juste titre, notre négligence vis-à-vis de la famille, un constat amer auquel je ne pouvais me soustraire. En effet, ma chambre était devenue mon royaume solitaire, un refuge où je m’abandonnais aux interminables séances de révisions, laissant parfois de côté les liens qui nous unissaient.
Quant à Moussa, sa présence à la maison était aussi éphémère qu’un éclat de lumière. Son travail exigeant l’entraînait inlassablement dans des déplacements incessants, l’éloignant de notre foyer. Je savais pertinemment que ce phénomène touchait désormais de nombreuses familles, pris au piège d’un dilemme moderne.

Un soupir m’échappa tandis que je regagnais ma chambre d’un pas las. Refermant la porte derrière moi, je me laissai choir sur mon lit, m’enfonçant dans les draps comme pour échapper aux questionnements qui m’assaillaient. Mon esprit déjà tourné vers la soirée qui se préparait, une lueur d’excitation dansait dans mes yeux. C’était un moment tant attendu, notre première soirée ensemble. Deux jours à peine s’étaient écoulés depuis que ma mère avait eu connaissance de notre relation naissante. Elle semblait l’apprécier énormément, ce qui nourrissait mes espoirs. Mon impatience grandissait, l’envie de le retrouver et de l’étreindre de toutes mes forces se faisait brûlante, comme une flamme insatiable.

Quelques instants plus tard, le son strident de la sonnette résonna à travers la maison. Un frisson d’anticipation me parcourut alors que je me hâtai d’ouvrir la porte.
– Salut, est-ce bien chez Laïcha ? interrogea un homme étranger à mes yeux.
– Oui, c’est moi, répondis-je, curieuse de découvrir l’objet de sa visite.
– J’ai un colis pour toi.
Le mystérieux messager me tendit un immense bouquet de fleurs, accompagné d’un paquet soigneusement emballé et d’une note. Il m’invita à signer un document, officialisant ainsi la réception du présent.

L’excitation me submergea alors que je m’empressai d’ouvrir le paquet. Montant prestement les escaliers jusqu’à ma chambre, je brûlais d’impatience de révéler son contenu.
Et là, devant mes yeux émerveillés, se dévoila une robe d’une beauté envoûtante. Des couleurs chatoyantes, une élégance raffinée… C’était tout simplement magnifique !
Je dépliai soigneusement la note qui l’accompagnait, dévorant chaque mot avec délice :
« Ta robe pour ce soir, Princesse.
De la part de ton cavalier, Cherif. »
Quelle surprise qui fit basculer ma journée dans un conte de fées enchanté !

POINT DE VUE DE MALIK.

13h10.
Une conversation intime s’épanouissait entre ma mère, en pleine préparation culinaire, et ma personne, dans le halo chaleureux de la cuisine.
– Je suis comblée de te savoir présent pour l’anniversaire de ta fille.
Une émotion sincère imprégna ma voix.
– Je considère que c’est le moins que je puisse faire. J’ai d’ailleurs acquis un cadeau d’exception, spécialement choisi pour elle.
Une étincelle de gratitude embrasa son regard.
– Ton geste témoigne d’une grande générosité ! Voilà précisément ce que tu aurais dû faire dès le commencement.
– J’ai enfin saisi la portée de mes actions. J’ai décidé d’offrir une place dans mon entreprise à Sophie, qu’elle puisse travailler à mes côtés et prendre en charge l’une de mes agences. En outre, j’envisage des vacances en famille après cette occasion.
– Tu fais vraiment des efforts remarquables. C’est tout ce qui compte désormais, répondit-elle avec douceur.
– Je tente de me racheter. J’aspire vraiment à ce qu’ils soient fiers de moi.
– J’ose formuler le même souhait, répondit-elle.

14h00.
Plongé dans l’examen minutieux des projets orchestrés par Ali à travers les contrées cariocas, un compte rendu récemment expédié atterrit entre mes mains. Une agréable constatation s’imposa à moi : tout semblait progresser favorablement. Ali se révélait être un chef d’orchestre compétent, capable de mener à bien ces ambitieux projets sans ma présence. Un soupir de soulagement s’échappa de mes lèvres, confirmant ainsi la possibilité d’une prolongation inattendue de mon séjour sur ces terres enchantées.

POINT DE VUE DE OMNISCIENT.

14h15.
Dès les premières lueurs du jour, Sophie fut inondée d’une marée infinie d’appels et de messages empreints de souhaits chaleureux pour son anniversaire. Mariam et Ilyan, ses complices dévoués dans les préparatifs festifs, s’employèrent avec acharnement à créer une atmosphère féérique en déployant une décoration aussi somptueuse qu’exquise. L’ensemble était presque achevé, ne manquait plus qu’une dernière touche de grâce : l’arrivée des invités qui allaient bientôt faire irruption dans ce sanctuaire enchanté. Consciente de l’énergie qui lui était nécessaire pour profiter pleinement de cette soirée si précieuse, Sophie prit la sage décision de s’accorder un repos bien mérité avant l’embrasement des festivités.

Cependant, malgré ses efforts pour trouver le sommeil, une inquiétude lancinante la tourmentait, l’empêchant de se plonger dans les bras de Morphée. Elle était parfaitement consciente que son père, une fois de plus, ne serait pas présent pour partager ce jour si spécial à ses côtés. Mais d’ordinaire, il trouvait toujours quelques instants pour envoyer un petit message affectueux ou même lui passer un coup de fil. Mais, depuis ce matin, Sophie n’avait rien reçu venant de lui. Cette absence silencieuse, pesante comme une ombre mélancolique, infligeait une douleur lancinante à son cœur, tel un pétale fané au sein du bouquet éclatant de son anniversaire.

POINT DE VUE DE MOMO.

15h30.
– Momo, es-tu réellement certain de vouloir t’engager sur cette voie ? interrogea ma mère d’un ton empreint d’inquiétude.
– Maman, j’ai consacré de longues heures à méditer sur cette décision, et je suis convaincu que c’est une idée remarquable, répondis-je d’une voix assurée.
– Prends conscience que les conséquences peuvent osciller entre gâcher sa soirée et la transformer en un instant d’une beauté inouïe. Tout dépendra de la manière dont elle en sera informée, souligna-t-elle avec prudence.
– Je le sais, maman. Je suis profondément persuadé que cela la comblera de joie, affirmai-je.
– Je te souhaite sincèrement bonne chance, mon fils. Sache que ta mère te soutient sans réserve, conclut-elle.
Elle m’enveloppa, m’offrant ainsi une démonstration tangible de son soutien.
Ma mère avait toujours été présente à mes côtés, tant dans les épreuves les plus ardues que dans les instants de béatitude les plus intenses. Toutefois, ce soir-là marquait l’instant décisif, le moment propice pour libérer les sentiments qui affluaient dans les replis de mon cœur, l’occasion tant espérée de m’unir à celle que j’ai chérie depuis notre tout premier échange de regards. Oui, l’instant tant attendu était enfin arrivé, et il ne fallait en aucun cas le laisser filer entre mes doigts.

POINT DE VUE DE AMINA.

18h00.
Après avoir passé une journée des plus agréables en compagnie de Fatma, dont les plaisanteries ne cessaient de fuser, celle-ci s’absenta pendant une trentaine de minutes pour récupérer sa tenue de soirée. Je me retrouvai ainsi seule dans la demeure, attendant patiemment son retour. Profitant de ce répit, je décidai de prendre une douche afin d’optimiser le temps qui s’offrait à moi.

Un quart d’heure plus tard, frais et revigoré, je me dirigeai vers ma chambre pour me vêtir. Il était encore trop tôt pour revêtir ma nouvelle robe destinée à la soirée, alors je choisis une tenue plus décontractée.

Prenant mon téléphone portable entre mes mains, je me laissai aller à parcourir les réseaux sociaux. Instagram s’ouvrit devant moi, dévoilant en première plan une photo récente de Ilyan accompagné de Moussa. Leur complicité transparaissait de manière touchante, m’incitant à réagir en aimant la publication et en y laissant un commentaire.
Je poursuivis ma déambulation virtuelle, faisant défiler les autres photos de mes amis, lorsque je reçus une notification provenant de Ilyan en réponse à mon commentaire. Il s’était contenté de me répondre avec un autocollant de cœur rouge. Je préférai ignorer cette réponse et quittai l’application, n’ayant pas réellement envie de converser à ce moment-là.
Cependant, cela ne signifiait nullement que je ne pensais pas à lui. Son image persistait obstinément dans mon esprit, m’empêchant de l’effacer de mes pensées. Pour ma part, cette soirée s’annonçait délicate. J’allais être contrainte de le croiser et d’engager la conversation, si par hasard Fatma décidait de rester avec Moussa pour la soirée. Et si je ne restais pas à ses côtés, il serait probablement enclin à flirter avec d’autres jeunes femmes, ce qui ne ferait qu’accroître mon malaise.
– Ça va bien se passer, Amina, ne t’inquiète pas, me murmurais-je intérieurement, cherchant à me rassurer.
J’espérais sincèrement que ma raison ne me trahirait pas. Un soupir d’apaisement s’échappa de mes lèvres, comme pour me délester de ces pensées qui m’assaillaient.

Chapitre 13

« Il a frappé à la porte de mon cœur. Je lui ai ouvert la fenêtre de mon âme. »

POINT DE VUE OMNISCIENT.

21h00, chez Sophie.
La demeure de Sophie vibrait au rythme envoûtant de sa propre essence lorsque les portes s’ouvrirent pour accueillir Amina et Fatma. Ilyan, en observateur attentif, fut captivé par la manière dont sa sœur se mouvait avec grâce parmi la foule d’invités. Elle semblait fusionner avec son environnement, rayonnant d’une confiance éclatante. Chaque personne qui croisait son chemin était honorée d’un regard qui les enveloppait de toute son attention, leur faisant ressentir une importance singulière. Même lorsqu’elle croisa Amina et Fatma, elle leur accorda de précieux instants, les félicitant avec sincérité pour leur choix vestimentaire, mettant en valeur leur beauté éclatante.

Quel que soit le coin où il posait les yeux, Ilyan était enveloppé d’un tourbillon d’éloges envers la splendeur de la décoration. Les murmures d’admiration se répandaient tel un écho enchanté dans les pièces parées de mille feux. Même l’oncle paternel, Karim, accompagné de son épouse dont la broche en émail scintillait telle une étoile, s’arrêta un instant pour confier à Sophie sa satisfaction infinie face à ce spectacle magnifique.
Mariam se trouvait à proximité, captant chaque mot échangé entre sa fille et le frère de son mari. Un sourire épanoui se dessina sur son visage alors qu’elle s’approchait de Sophie pour lui prodiguer une étreinte chaleureuse, avant de saluer Karim d’une poignée de main sincère.
– Voilà le genre de remarques que j’aime entendre, dit-elle avant de serrer la main de Karim. Je dois reconnaitre que vous m’avez surpris, ta femme et toi.
– Je ne pourrai pas manquer cette occasion, répondit Karim.
Tandis que Sophie se dirigeait vers les autres convives, Malik s’approcha de sa femme avec précaution, veillant à ne pas éveiller l’attention de leur fille.
Il entoura tendrement la taille de Mariam de son bras.
– Et comment ! s’exclama Malik, un éclat malicieux dans le regard. Puis-je me permettre de dérober cette ravissante femme à nos invités pendant quelques précieuses minutes ?
Il guida Mariam vers un coin isolé, loin des regards indiscrets. L’expression inquiète de Malik ne passa pas inaperçue.
– Malik ! Je croyais que tu étais parti à Rio. Pourquoi es-tu ici ?
– Non, je ne suis pas allé à Rio. En vérité, j’ai annulé mon voyage.
Un mélange de surprise se dessina sur le visage de Mariam. Elle ne savait comment réagir, restant silencieuse, tandis qu’il poursuivait :
– J’ai passé tout ce temps chez ma mère. Je voulais te faire une surprise. C’est pourquoi je n’ai rien dit.
Les mots se perdaient dans l’air, suspendus entre eux. Mariam se blottit alors contre son mari, lui offrant un câlin réconfortant, exprimant par ce geste la joie qu’elle ressentait pour le sacrifice qu’il avait consenti afin d’être présent à la fête de leur fille.
– Je suis tellement heureuse, Malik.
– Moi aussi, murmura-t-il. Maman est dans ta chambre, elle sera ravie de te voir.
– Vraiment ? Elle est venue avec toi ?
– Oui, elle voulait te surprendre, elle aussi.
Un sourire radieux illumina le visage de Mariam. Sans un mot de plus, elle se détacha de l’étreinte de son mari et se hâta vers la chambre, impatiente de retrouver sa belle-mère.

Tel une ombre furtive, Mariam gravit les majestueux escaliers, s’élevant vers l’étage supérieur pour rejoindre sa chambre. Tandis qu’elle s’engouffrait dans le couloir, Malik, les yeux scrutant chaque recoin de la pièce, aperçut soudain Ilyan aux côtés de Moussa et des filles. D’un geste discret, il l’invita à le rejoindre, attirant ainsi l’attention de Ilyan qui, sidéré par la présence inattendue de son père, se détourna de ses amis sans émettre le moindre son.
– Papa ! s’exclama-t-il à voix basse. Qu’est-ce qui t’amène ici ?
– Chut… Parle doucement. Je commettrais une faute impardonnable si je n’étais pas présent.
– Sophie est-elle au courant ? T’a-t-elle vu ?
– Non, pas encore. Cela s’avère plus complexe que je ne l’anticipais. Je ne souhaite pas précipiter les événements ce soir. Je ne voudrais en aucun cas ternir la soirée pour elle.
Son père marqua une brève pause, hésitant un instant dans ses paroles.
– Cependant, j’ai une idée pour remédier à cela.
– Comment ? interrogea Ilyan.
– Laisse-moi m’en charger.
D’un pas solennel, Malik traversa la pièce, son visage imprégné d’une gravité indéniable. Tandis qu’il s’approchait de Mariam, accompagnée de sa mère, un frémissement d’appréhension parcourut l’assistance. D’un geste empreint de délicatesse, il se pencha vers elle, murmurant des paroles à peine audibles à son oreille. Des interrogations fusèrent de la bouche de sa femme, mais Malik refusa d’accorder une attention quelconque à ses inquiétudes. Ensemble, ils se dirigèrent vers Sophie, son père manifestant une réticence à peine dissimulée.
– Oh, non…, souffla Ilyan, redoutant les conséquences funestes de leurs intentions.
Animé d’une volonté farouche de les stopper, il se fraya un passage à travers la foule compacte, se heurtant aux corps massés sur son chemin. Lorsqu’il parvint enfin à proximité de leur groupe, il observa sa mère tenant fermement la main de Sophie, l’éloignant d’un groupe d’invités.
Le timbre de voix de Sophie s’éleva, affirmant qu’elle ne pouvait accorder aucun instant à leur entreprise.
– Une fois que tu découvriras ce que c’est, tu seras comblée de bonheur, lui chuchota sa mère.
La porte de la maison s’ouvrit, laissant entendre la sortie de Sophie. Ilyan observa la stupéfaction se peindre sur le visage de sa sœur lorsqu’elle découvrit la voiture Mercedes d’un rouge éclatant qu’elle avait tant fantasmé.
Bouche bée, elle leva les yeux vers Malik.
– C’est toi qui a acheté ça ? balbutia-t-elle, saisie d’incrédulité.
– Ta mère et moi, répondit Malik. Nous souhaitions tous les deux te montrer à quel point nous sommes fiers de toi.
Mariam semblait légèrement mal à l’aise, mais elle se prêta au jeu.
– C’est ton père qui a eu cette idée, ajouta-t-elle.
– Mais ta mère a immédiatement dit oui dès que je lui en ai parlé, insista-t-il.
Ilyan esquissa un sourire, touché par l’effort déployé par Malik pour inclure Mariam dans ce geste généreux. C’était une tentative magnanime de réconciliation entre un père et sa fille.
– Comment as-tu su que je le désirais ? demanda Sophie, son regard se fixant sur Ilyan.
– Je suppose que c’est toi qui le leur as dit, n’est-ce pas ? ajouta-t-elle.
Ilyan haussa les épaules avec une légère nonchalance.
– J’ai peut-être mentionné à quel point tu aimais ce type de voiture.
Un éclat de rire s’échappa des lèvres de Sophie.
– Aimer ? J’ai toujours rêvé de cette voiture, oui !
Elle s’approcha, enlaçant Ilyan dans ses bras, puis se tourna vers ses parents.
– Merci infiniment, maman.
Puis, après avoir avalé difficilement sa salive, elle se tourna vers son père.
– Merci à toi aussi.
Ilyan vit son père cligner des yeux, cherchant à contenir ses larmes. Il vit également sa mère l’entourer de son étreinte, réalisant que tout ce qu’elle espérait allait finalement se réaliser. Cela prendrait certainement du temps. Ce ne serait peut-être pas facile, mais leur famille retrouverait son unité.
– J’ai encore une autre surprise, annonça Malik.
– Une autre surprise ? s’étonna Mariam.
– De quoi s’agit-il ? demanda Sophie.
Malik sortit de sa poche une enveloppe qu’il remit à sa femme. Celle-ci l’ouvrit sans attendre et y découvrit cinq billets pour Venise.
– Oh mon Dieu ! s’exclama Mariam. Un voyage en famille à Venise.
– Venise ? s’écria Ilyan. La ville de mes rêves.
– J’en ai déjà assez reçu pour aujourd’hui, murmura Sophie. Papa, tu en as déjà fait énormément.
– Et je continuerai à en faire pour retrouver ma famille, déclara Malik.
– Merci, exprima Sophie avec émotion.

23h00.
Les yeux pétillants, Sophie observait avec tendresse son frère, accompagné d’Amina, qui éclataient de rire. À leurs côtés, leur père, autrefois soucieux, semblait désormais serein. Un sentiment de soulagement l’envahit alors qu’elle portait la bouteille d’eau fraîche à ses lèvres. Lorsqu’elle se retourna, ses prunelles rencontrèrent celles de sa cousine, Yasmine, qui se tenait à ses côtés.
– Yasmine ! Toi ici ? s’exclama Sophie, un sourire radieux ornant ses lèvres.
– Oui, chère Sophie. Joyeux anniversaire ! répondit Yasmine.
– Je te remercie, ma chère cousine, répliqua Sophie.
Yasmine, le regard illuminé, s’exprima avec enthousiasme.
– Cet endroit est tout simplement merveilleux. L’ambiance qui y règne est des plus agréables.
– Je suis si heureuse que cela te plaise, confia Sophie, ses yeux pétillants de bonheur. Au fait, comment se portent tes affaires dans le domaine de l’immobilier ?
Un sourire éclaira le visage de Yasmine.
– Étonnamment bien, ma chère. En réalité, la semaine dernière, j’ai conclu une vente d’une importance considérable.
– Vraiment ? s’exclama Sophie, intriguée.
– Oui, c’était la magnifique demeure de notre oncle Malik, située un peu plus haut sur la route, confia Yasmine, savourant l’instant.
Le regard de Sophie s’illumina d’excitation.
– La maison de Monsieur Fall ? Je n’ai pu m’empêcher de remarquer le panneau « À Vendre » qui orne son entrée depuis déjà trois semaines.
Yasmine acquiesça, mais son expression se fit plus songeuse.
– J’admirais cette demeure, s’exclama Sophie. Sa véranda m’a toujours fascinée. Mais qui l’a donc achetée ? demanda-t-elle.
Une lueur d’inquiétude se dessina dans les yeux de Yasmine.
– Tu ne sais pas ? murmura-t-elle.
Sophie fronça les sourcils.
– Pourquoi devrais-je le savoir ?
– Je pensais juste que… Oh, laisse tomber, balbutia Yasmine, s’interrompant brusquement.
Sophie sentit tous ses sens s’aiguiser. Était-ce Momo ? Non, cela semblait impossible. Il ne ferait jamais une chose pareille sans lui en parler au préalable.
– Momo ? demanda-t-elle.
Yasmine tressaillit face à cette question directe, ou peut-être était-ce le ton acéré de Sophie qui l’affectait.
– Je n’aurais pas dû dire quoi que ce soit, avoua-t-elle, visiblement consternée. Il voulait sûrement te faire la surprise.
– Oui, certainement, murmura Sophie entre ses dents, sa frustration se faisant sentir.
Elle fixa sa cousine, lui lançant un regard empreint d’excuse.
– Ne te préoccupe pas d’avoir vendu la mèche. Tu n’as rien fait de mal.
– J’ai simplement laissé échapper des mots alors que je n’aurais pas dû, marmonna Yasmine, mécontente.
– Ce n’est pas comme si tu l’avais crié sur tous les toits, assura Sophie. Tu m’en as parlé parce que tu pensais que j’étais déjà au courant.
– J’espère que Momo comprendra, soupira Yasmine.
– Crois-moi, il aura d’autres préoccupations, répliqua Sophie d’un ton sombre.
Sophie se laissa envahir par un tourbillon de pensées tandis qu’elle se demandait pourquoi Momo avait acquis cette maison en ville sans lui en souffler mot. S’agissait-il d’une marque éclatante de confiance en ses capacités de persuasion ou était-ce une façon manifeste de lui révéler ses intentions ? Un frisson parcourut son échine alors qu’elle effleurait du bout des doigts son téléphone portable dans la poche de sa robe, prête à le saisir pour l’appeler. Cependant, avant qu’elle puisse agir, une sensation étrange se fit ressentir. Se retournant, elle vit Momo s’approcher d’elle avec grâce. Yasmine, attentive à la présence de Momo, prit congé de sa cousine après lui avoir déposé un baiser rapide sur la joue.
– Je pense qu’il est temps pour moi de prendre congé, annonça Yasmine.
– Poule mouillée ! s’exclama Sophie taquinement dans son dos, avant de se tourner entièrement vers Momo.
Son regard se posa sur elle, captivé par sa prestance.
– Tu es tout simplement sublime, lui murmura-t-il.
Dans un geste tendre, Momo se pencha pour l’embrasser, mais Sophie esquiva son étreinte. La lueur de désir qui brillait dans ses yeux s’évanouit aussitôt, laissant place à la surprise.
– Quelque chose ne va pas ? demanda-t-il, perplexe.
– Quand comptais-tu m’en parler ? lui lança-t-elle d’un ton accusateur.
Momo jeta un regard furtif à Yasmine qui s’éloignait, puis poussa un soupir résigné.
– Tu es au courant pour la maison, commença-t-il.
– Oui, répondit-elle sèchement.
– Tu as toujours été amoureuse de cette maison, lui rappela-t-il doucement.
– Oui, mais cela ne signifie pas que tu puisses faire un tel achat sans même m’en parler. Je pensais que nous prenions les choses jour après jour, que nous avancions ensemble, répliqua Sophie, son ton trahissant sa déception.
– C’est exactement ce que nous faisons, rétorqua Momo.
– Donc, tu as acheté cette maison ici pour que j’accepte de rester dans cette ville, résuma-t-elle.
– J’ai acheté cette maison parce que je savais qu’elle te plaisait, corrigea-t-il. Si, au final, tu veux vivre ailleurs, nous partirons ensemble. Mais au moins, nous aurons toujours un endroit où venir passer des week-ends ou des vacances.
Sophie n’était pas convaincue que c’était réellement ce qu’il désirait profondément.
– Mais tu veux rester ici, reprit-elle, consciente que son ton était plus accusateur qu’interrogateur.
Il haussa les épaules, puis acquiesça.
– Oui, mais je pensais tout ce que j’ai dit. Je vais où tu vas. Je t’aime, et je n’ai pas l’intention de te perdre à cause de quelque chose d’aussi ridicule que le choix de la ville. Je peux travailler n’importe où.
Il plongea son regard dans le sien avant de poursuivre.
– Tu veux bien descendre de tes grands cheveux, maintenant, et m’embrasser comme tu meurs d’envie de le faire ? J’estime que je mérite un accueil plus chaleureux que celui que je viens d’avoir.
Sophie n’était pas prête à clore le sujet, mais elle l’embrassa tout de même.
Tandis qu’une douce chaleur gagnait ses membres, la question lui sembla de moins en moins importante. C’était une bonne chose de trouver un compromis. Elle devrait y réfléchir.

Alors que les derniers échos de la fête s’estompaient, Amina et Ilyan se trouvaient inexorablement rapprochés. Moussa et Fatma, comprenant la tension entre les deux âmes en quête de réconfort, décidèrent sagement de leur accorder un moment d’intimité.
Dans l’ombre tamisée, Ilyan brisa le silence d’une voix empreinte d’une douce sollicitude.
– J’espère que cette fête a su combler ton cœur, Amina.
Un éclat sincère illumina le visage d’Amina.
– C’était tout simplement merveilleux. J’ai été comblée au-delà de mes espérances.
Ilyan, le regard empreint d’une lueur mélancolique, murmura d’un ton presque imperceptible.
– J’ai appris la nouvelle du départ de Junior. Mes plus sincères excuses pour cette épreuve.
– Qui donc t’a révélé cela ? Fatma ? questionna-t-elle Intriguée.
Ilyan secoua la tête.
– Non, c’est Junior lui-même qui me l’a dit.
– Tu l’as rencontré ? interrogea Amina surprise par cette révélation.
– Oui
Un soupçon de tristesse s’empara de l’âme d’Amina.
– Je suis responsable de tout ceci, confessa-t-elle avec peine.
D’un geste calme, Ilyan posa une main réconfortante sur celle d’Amina.
– N’accable pas ton cœur, Amina. Cette décision ne repose en aucun cas sur tes épaules.
Mais Amina persista, murmurant d’une voix chargée d’auto-condamnation.
– C’est ce que vous croyez. C’est ce que tout le monde pense, n’est-ce pas ?
Ilyan, empli d’une détermination sincère, planta son regard dans celui d’Amina.
– Écoute-moi attentivement, Amina. Je suis convaincu que tu n’es en rien responsable de son départ. Junior m’a tout dit. Cesse de te torturer l’esprit ainsi. Il est simplement parti poursuivre sa propre existence aux côtés de son père, et je suis intimement persuadé qu’il ne te tient pas rigueur.
– Comment peux-tu en être si sûr ? questionna Amina.
– Je me mets à sa place, tout simplement. Peut-être n’étais-je pas ton petit ami, mais je te trouve magnifique et d’une gentillesse incomparable. J’apprécie sincèrement ta présence à mes côtés.
Un sourire éclaira le visage d’Amina, illuminée par la sincérité qui émanait de chaque mot prononcé par Ilyan. Levant les yeux, elle scruta attentivement les traits de son visage, cherchant à déchiffrer les émotions qui s’y déployaient.
– Penses-tu réellement que nous avons une chance, toi et moi ? demanda-t-elle, l’espoir brillant dans ses yeux.
– Je sais, au plus profond de mon être, que mon amour pour toi transcende toute réalité. Je déploierai mes forces pour t’offrir le bonheur qui te revient de droit.
Une inspiration profonde emplit les poumons d’Amina, telle une infusion parfumée d’audace et de courage. Les mots qu’elle s’apprêtait à prononcer, délicats et essentiels, allaient enfin jaillir de ses lèvres.
– Je t’aime aussi, confia-t-elle.
En cet instant précieux, les premiers mots d’amour qu’elle osait déclarer à voix haute, après des semaines de silencieuses acclamations de son cœur, tracèrent une étreinte invisible entre leur destinée.
Un sourire éclatant se dessina sur le visage de Ilyan, reflétant la joie qui embrasait son cœur.
– Finalement, ce n’était pas si difficile, n’est-ce pas ? dit-il avec une pointe de malice.
– Comment ça ? interrogea Amina, perplexe.
Un froncement léger se forma sur le front de Ilyan tandis qu’il cherchait ses mots.
– Je veux dire, laisser parler ton cœur, exprimer tes sentiments, expliqua-t-il d’une voix douce.
– Si tu veux tout savoir, c’est effrayant.
Les sourcils de Ilyan se froncèrent en entendant ces mots.
– Pas avec moi, Amina. Tu ne devrais pas avoir peur avec moi.
Un frisson parcourut l’échine d’Amina. Elle comprenait les paroles de Ilyan, mais sa crainte ne reposait pas sur le doute concernant l’amour qu’il lui portait. C’était plutôt l’ampleur du pouvoir qu’il détenait sur sa vie qui la troublait, mélange d’excitation et d’appréhension face aux bouleversements qu’il était capable d’engendrer.

Le lendemain, 08h00.
Telle une famille réunie autour d’une table baignée de chaleur dans la cuisine, tous les membres partageaient un moment précieux, y compris Malik, qui se sentait légèrement décalé en cet instant. Mariam avait insisté pour qu’il se joigne à eux pour le petit-déjeuner, souhaitant ainsi renforcer les liens familiaux.
Le cœur rempli d’une satisfaction profonde, Ilyan savourait chaque échange, captant les nuances des conversations. Les doutes qui avaient naguère assailli l’esprit de sa sœur semblaient désormais évaporés, laissant place à une certitude nouvelle quant à sa place au sein de la famille.

Alors que les membres de la famille se préparaient à se lever pour entamer leurs activités respectives, Malik décida de retenir leur attention.
– Doucement, tout le monde, annonça-t-il. Sophie, une opportunité de travail en centre-ville s’est présentée, et ils souhaitent savoir si tu ne serais pas la personne idéale pour occuper ce poste.
Un silence respectueux s’installa alors que chacun attendait la réaction de Sophie. Elle retint son souffle, espérant ressentir cette étincelle d’excitation qui d’ordinaire embrasait son être à la perspective de nouveaux défis. Mais, hélas, cette fois-ci, l’étincelle ne jaillit pas.
Cependant, Malik ne se laissa pas démonter, convaincu de la pertinence de sa proposition. Il poursuivit, son regard brillant de certitude.
– Mon agence en centre-ville a besoin d’un nouveau directeur. Ce n’est qu’à une heure d’ici, n’est-ce pas ? ajouta-t-il. Je suis convaincu que tu serais parfaite pour ce poste. Tes compétences en organisation et en gestion de portefeuilles pourraient transformer cette agence en l’une des plus rentables de la société. Leurs performances dans la gestion des portefeuilles laissent à désirer. Nous perdons continuellement des clients qui préfèrent s’adresser à d’autres sociétés de courtage, leurs proches réalisant de meilleurs profits ailleurs. Avec toi à sa tête, tu pourrais inverser cette tendance tout en demeurant près de ta famille, Sophie.
Sophie tenta de considérer la proposition sous différents angles, mais ne pouvait s’empêcher de ressentir une pointe de méfiance. Elle avait l’impression que Malik cherchait à lui présenter la situation de manière trop optimiste, masquant ainsi une réalité potentiellement difficile à accepter.
– Pourrais-je y réfléchir un peu ? demanda-t-elle, cherchant à gagner du temps pour analyser la proposition avec plus de prudence.
Malik acquiesça avec bienveillance.
– Bien sûr, prends tout le temps dont tu as besoin. Je peux attendre jusqu’au début de la semaine prochaine. Qu’en penses-tu ?
– Dès lundi matin, je te donnerai ma réponse, promit-elle.

Deux jours plus tard, 10h00.
Lorsque le lundi tant attendu arriva, Sophie se trouvait toujours dans l’incertitude quant à sa décision. Elle avait réalisé qu’elle devait se rendre en centre-ville pour se faire une idée précise de l’environnement dans lequel elle envisageait de s’aventurer. Il lui fallait cette expérience directe pour déterminer si ce poste représentait un défi stimulant qu’elle apprécierait de relever, ou bien une impasse qui la piégerait à terme.

Sophie prit place dans sa nouvelle voiture et se dirigea vers le centre-ville. Arrivée devant les bureaux de la société, elle resta un moment assise dans sa voiture, contemplant le bâtiment. Contrairement aux gratte-ciels imposants auxquels elle était habituée, elle découvrit un édifice historique de cinq étages qui, bien qu’ayant un certain charme, ne se distinguait guère des autres constructions environnantes.
Finalement, elle se décida à franchir les portes du bâtiment. À l’intérieur, elle constata que les locaux abritaient également un cabinet d’avocats, une compagnie d’assurances et plusieurs cabinets médicaux. Elle prit l’ascenseur qui l’amena au quatrième étage.

Lorsque les portes de l’ascenseur s’ouvrirent, Sophie fut accueillie par une épaisse moquette bleu marine. Une sensation de luxe et de raffinement l’enveloppa immédiatement. Cette première impression lui apporta un certain soulagement, car elle était soulagée de constater que l’environnement semblait prometteur et de qualité.
La réceptionniste leva les yeux lorsqu’elle vit Sophie entrer.
– Vous devez être Sophie. Veuillez entrer. Monsieur Rodriguez vous attend. Son bureau se trouve dans le coin à gauche, c’est celui avec la meilleure vue. On peut voir le port, déclara-t-elle avec un sourire.
Sophie ressentit à nouveau cette impression lorsqu’elle pénétra dans le bureau. Lorsqu’elle frappa à la porte de Rodriguez, ce dernier l’ouvrit et elle faillit ne pas le remarquer, captivée par la vue époustouflante qui se déployait derrière lui.
Rodriguez lui adressa un sourire en voyant son expression impressionnée.
– Cela en vaut la peine, n’est-ce pas ? dit-il en lui serrant la main, puis il lui indiqua un siège. Je jure que c’est la seule raison qui m’a fait accepter ce poste il y a trente ans. Je vais avoir du mal à quitter cette vue.
– Vous prenez votre retraite ? s’enquit Sophie, curieuse.
– Oui, à la fin du mois. Et vous, allez-vous prendre ma place ? demanda-t-il avec intérêt.
Sophie se sentit hésitante.
– Je suis encore indécise.
À ce moment précis, un homme qui ne semblait pas avoir plus de vingt-cinq ans fit une brève apparition à la porte du bureau.
– Excusez-moi de vous interrompre, déclara-t-il en inclinant légèrement la tête en direction de Sophie. Rodriguez, j’ai Ousmane en ligne. Il insiste pour effectuer une opération dont je ne comprends rien. Pourriez-vous vous en occuper ?
Rodriguez se tourna vers Sophie.
– Voulez-vous essayer ? lui demanda-t-il.
– Pourquoi pas, répondit-elle en faisant un geste en direction du courtier. Prenez la ligne avec nous.
Surpris, le jeune homme acquiesça et prit le deuxième téléphone du bureau pendant que Sophie entrait en conversation avec le client, Ousmane.
Il souhaitait revendre des actions d’une société, puis lui donna le nom des actions qu’il souhaitait acheter.
Sophie prit le temps d’examiner les perspectives d’avenir, la marge brute et le taux de capitalisation de la société en question, étant donné que cette action faisait beaucoup parler d’elle en ce moment. Elle expliqua à Ousmane qu’il commettrait une énorme erreur en vendant les actions sans une surveillance étroite du marché, car il risquait de perdre autant qu’il pouvait gagner, à moins de s’en débarrasser rapidement en suivant de près les flux du marché.
Sophie était plongée dans ses pensées lorsque le courtier raccrocha et la gratifia d’un regard empreint de respect.
– Merci, je pense qu’il était sur le point de clôturer son compte car je n’arrivais pas à lui faire comprendre mon point de vue. C’est une chance que vous ayez été là, lui dit-il avec gratitude avant de quitter la pièce.
Sophie remarqua alors que Rodriguez l’observait attentivement.
– Vous voyez maintenant ce que je veux dire ? Vous avez le pouvoir de faire une réelle différence ici, lui lança-t-il avec conviction.
Sophie hocha lentement la tête, laissant ces paroles résonner en elle. Peut-être que Rodriguez avait raison. Une part d’elle-même éprouvait le désir intense d’appeler son père pour lui annoncer qu’elle acceptait ce poste à l’essai. Mais elle chassa rapidement cette idée de son esprit. Elle devait s’engager pleinement dans ce poste, avec ces gens, dans cette ville et auprès de Momo. Il était temps pour elle de faire un choix qui impacterait sa vie de manière significative.

Chapitre 14

« Il n'y a pas un jour qui se meurt sans que mon coeur ne soit pincé par ton souvenir. »

POINT DE VUE OMNISCIENT.

Cinq ans plus tard.

12h00.
Ilyan n’avait jamais songé à renouer avec les tourments de l’amour après deux longues années d’absence d’Amina. Cependant, l’heure était venue de déclarer sans équivoque ses intentions. Cette fois-ci, il aspirait à tout : le mariage, une famille et le bonheur absolu. Et ce, sans plus tarder.

Alors qu’il revenait de la banque, son regard se porta instinctivement vers son fidèle moto depuis les années de jeunesse. Bien qu’il ne s’agissait pas d’un véhicule qui criait la notion de famille, il ne put s’empêcher d’acquiescer d’un mouvement de tête empreint de nostalgie.
Afin d’accomplir sa mission, il attrapa son téléphone portable et composa le numéro de sa sœur, Sophie.
– J’ai besoin que l’on me véhicule. Pourrais-tu venir me chercher à la maison, je t’en prie ?
La gratitude de Sophie envers son frère, qui avait intercédé en sa faveur à maintes reprises, était incommensurable. Elle ne tarda pas à réagir sans poser la moindre question.
– Donne-moi quelques minutes, j’arrive.
Sophie avait déjà scellé son destin conjugal avec Momo, donnant naissance à un petit garçon d’à peine dix-huit mois. De plus, Sophie avait brillamment réussi à relever l’entreprise de son père dont elle assurait la direction depuis cinq ans. Sous sa houlette, cette société avait prospéré, devenant une entité lucrative, conforme aux aspirations de son père. Elle trouvait un réel bonheur à demeurer en ces lieux familiers, où elle avait forgé son existence, aux côtés de son époux, de son frère et de ses chers parents. La paix intérieure qu’elle ressentait désormais dépassait de loin tout ce qu’elle avait connu auparavant.

Après avoir obtenu son diplôme de baccalauréat, Ilyan s’était orienté vers des études en marketing et communication digitale. Après avoir terminé son master et accumulé une solide expérience grâce à divers stages en entreprise, il rejoignit l’une des sociétés de son père en tant que Directeur Marketing. Sous la direction de sa grande sœur, ils prirent en charge les affaires de leur père, qui s’était installé en ville définitivement. Enfin réunis, ils espéraient rester sous le même toit et partager des moments précieux ensemble. Malik consacrait également une grande partie de son temps libre à des activités bénévoles pour les projets d’aménagement de sa ville, apportant son expertise aux nouvelles constructions d’infrastructures.

De son côté, Amina s’était lancée dans une carrière en commerce international après ses études supérieures. Passionnée depuis toujours, elle travaillait en freelance avec plusieurs entreprises à travers le monde. Cela lui permettait également de jouir d’une certaine liberté pour profiter pleinement de sa vie, entre voyages et soirées avec sa compagne de toujours, Fatma, qui attendait déjà son premier enfant avec Moussa.

Après avoir dévoilé sa destination à Sophie, celle-ci ne cessa de le dévisager avec des yeux interrogateurs. Son impatience grandissait peu à peu.
– Vas-tu me le dire ou pas ? finit-elle par s’exclamer, perdant patience.
Ilyan répondit du tac au tac.
– Non.
Il éclata de rire en voyant sa sœur contrariée.
Lorsqu’ils entrèrent dans le parking du concessionnaire automobile, elle le suivit, observant ses pas assurés se diriger droit vers un Range Rover.
– Qu’en penses-tu ? lui demanda-t-il.
Soudain, elle comprit.
– Tu vas demander à Amina de t’épouser, n’est-ce pas ? C’est pour cela que tu achètes cette voiture.
– Ai-je dit ça ? répliqua-t-il, feignant l’innocence.
Elle lui donna un petit coup dans les côtes.
– Pas besoin de me le dire. Rien d’autre au monde ne pourrait te convaincre d’abandonner ta moto.
– Exactement, tu as deviné. Maintenant, dis-moi ce que tu penses de ce véhicule. Il y a même un lecteur pour les sièges arrière, peux-tu imaginer cela ? dit-il, les yeux brillants d’émerveillement en scrutant l’intérieur.
Un sourire moqueur se dessina sur les lèvres de Sophie.
– De nos jours, les voitures sont équipées de tant d’accessoires que les motos n’ont pas. Il est grand temps que tu réalises cela et que tu grandisses un peu.
Ilyan fronça les sourcils.
– Ce n’est pas une question de grandir, Sophie.
Elle glissa son bras sous le sien.
– Bon, d’accord. Es-tu sûr de vouloir acheter la première voiture que tu vois ?
Il haussa les épaules.
– C’est une voiture. Elle fonctionne.
Sophie leva les yeux au ciel.
– Tu es désespérant. Bien, si c’est celle-ci que tu veux, allons à l’intérieur et signons les papiers. Cependant, sache que tu prives un pauvre vendeur l’occasion de mettre ses talents de négociation à l’épreuve.
Alors qu’ils progressaient au milieu de la concession, un vendeur surgit soudainement. D’un geste brusque, Sophie arrêta son frère.
– Ne paie pas le prix demandé. Laisse-moi m’en occuper.
Ilyan la regarda d’un air amusé.
– Comme tu veux.
À sa grande surprise, elle parvint à faire sensiblement baisser le prix et, une heure plus tard, Ilyan traversait le parking, les clés en main.
– Vas-tu voir Amina maintenant ? lui demanda-t-elle.
Il acquiesça.
En réalité, la bague se trouvait dans sa poche, mais il avait le sentiment que la voiture serait un témoin de sa motivation à fonder une famille et être un père exemplaire et responsable.

Plutôt que de se diriger directement chez Amina, Ilyan stationna majestueusement son nouveau véhicule devant la maison qu’il venait d’acquérir. Puis, d’un pas décidé, il entreprit de se rendre à pied jusqu’au domicile d’Amina. Il la trouva plongée dans ses affaires, jonglant avec plusieurs conversations téléphoniques. À peine daigna-t-elle lever les yeux à son arrivée.
Lorsque le dernier appel fut conclu, un sourire fatigué se dessina sur les lèvres d’Amina.
Ilyan se leva gracieusement et lui tendit la main.
– Tu as besoin de faire une pause. Viens, laisse-moi t’offrir une promenade.
À sa grande surprise, elle se leva promptement, empoigna sa main et le suivit sans hésitation vers l’extérieur. Ensemble, ils traversèrent la pelouse, se dirigeant d’un pas léger vers la plage.
– Je ne peux malheureusement pas m’attarder trop longtemps, confia-t-elle alors qu’ils cheminaient le long du rivage. Ma charge de travail pour aujourd’hui est considérable.
Ilyan posa délicatement sa main sur la sienne.
Détends-toi, lui dit-il en la guidant, sans qu’elle ne s’en rende compte, vers sa nouvelle maison.
Le froncement de sourcils d’Amina trahissait son incompréhension.
– Mais je…
Il la coupa d’un regard compatissant.
– Je sais. Mais, nous pouvons passer à autre chose. Viens avec moi.
Elle observa attentivement les alentours et réalisa l’endroit où ils se trouvaient.
– La maison que tu as achetée, murmura-t-elle.
Leurs regards se croisèrent, capturant une lueur de désir partagé.
– Notre maison, j’espère, répondit-il.
Ils gravirent les marches jusqu’au jardin, contournèrent la maison pour atteindre l’allée où était garée la voiture.
– Notre voiture, ajouta-t-il.
Elle resta bouche bée, incapable de prononcer un mot.
– Tu as acheté une voiture ? finit-elle par dire.
Il lui adressa un clin d’œil complice.
– Je ne peux tout de même pas faire monter nos enfants sur ma moto, plaisanta-t-il. Mais j’espère aussi te faire monter à bord de temps en temps. Cette voiture, c’est simplement pour te montrer que je serai un père responsable.
Un sourire se dessina sur ses lèvres.
– Je n’ai jamais douté de cela.
Il prit une profonde inspiration, se préparant à prononcer le discours qu’il avait minutieusement préparé.
– Écoute, je sais que tu n’es pas certaine de vouloir rester avec moi, et si tu ne le souhaites vraiment pas, je le comprendrai. Mais cette maison est réellement faite pour nous. Mon père l’a construite, et il me semble que c’est un héritage familial que l’un de ses enfants y habite. Tout ce qui compte pour moi, c’est que nous soyons ensemble.
Elle posa doucement sa main sur la sienne.
– Moi aussi, affirma-t-elle. Avant même que tu ne commences à énumérer tous les sacrifices que tu es prêt à faire pour moi, sache que c’est ici, chez nous, Ilyan. Dans cette maison, ici, avec toi. Je crois qu’elle n’attendait que nous.
Un large sourire illumina le visage de Ilyan.
– Tu n’as même pas attendu de voir la bague ni d’entendre ma proposition de mariage. J’avais l’intention de te dire que je t’aimais depuis une éternité. Je veux t’épouser et fonder une famille avec toi. Et au cas où tu t’inquièterais de la réaction de Fatma, sache qu’elle est d’accord. Tes parents et ta grand-mère m’ont également donné leur approbation.
Les yeux d’Amina se remplirent de larmes, des larmes qu’il espérait être des larmes de bonheur.
– D’accord, tu as fait ta demande, chuchota-t-elle. La réponse est oui.
– Et la bague ? Veux-tu la voir ? lui demanda-t-il avec une pointe d’excitation.
– Oh oui ! s’exclama-t-elle. Mais seulement parce que c’est un symbole de notre engagement mutuel. Un signe que nous appartenons l’un à l’autre.
Incapable de croire que ce qu’il avait autrefois rêvé devenait réalité, il glissa délicatement la bague au doigt d’Amina.
– As-tu pensé à la date du mariage ? demanda-t-il, l’invitant à s’asseoir à ses côtés sur les marches de ce qui serait leur première et unique maison.
– Dans un mois, répondit-elle doucement.
– Et où ?
– Où tu voudras, répliqua-t-elle avec un sourire.
Un rire joyeux s’échappa des lèvres de Ilyan.
– Je t’aime, Amina.
– Et moi aussi, je t’aime, Ilyan. Je commence à comprendre ce que Malik envisageait lorsqu’il a conçu cette ville. C’est l’endroit parfait pour tomber amoureux et construire une famille. Il y a quelque chose dans l’air, je le sens.
Ilyan prit une profonde inspiration, captant les doux effluves de la mélodie du souvenir. Peut-être qu’il y avait réellement un soupçon d’amour dans l’air.

Chapitre Spécial 1

Le soleil de Venise brillait intensément dans le ciel azur, tandis que la famille Malik se promenait le long des ruelles étroites de la ville. Mariam était en tête, armée d’une carte touristique dépliée, tandis que Malik traînait derrière, sa casquette vissée sur la tête pour se protéger du soleil.

Sophie, avec un sens de l’humour piquant, se tourna vers son frère Ilyan.
– Eh bien, Ilyan, as-tu entendu parler de la Gondolite aiguë ? C’est une maladie qui affecte les gondoliers qui chantent trop souvent.
Ilyan leva un sourcil douteux.
– Sérieusement, Sophie ? Gondolite aiguë ?
– Oui, et la seule prescription, c’est de prendre une pause musicale, dit-elle en riant.
Pendant ce temps, leur grand-mère, assise sur un banc à proximité, observait la scène avec amusement.
– Eh bien, si les gondoliers sont malades, peut-être que nous devrions essayer les gondoles sans chanteurs. Ça pourrait être plus paisible !
Malik, qui s’était finalement rejoint à la conversation, ajouta :
– Je ne sais pas, maman. Une gondole sans chanteur, c’est comme une pizza sans fromage.
Tout le monde éclata de rire. Même Mariam, qui était perdue dans la lecture de la carte, leva les yeux et sourit.
– Eh bien, au moins une gondole silencieuse nous permettrait de profiter du paysage sans distractions.
Alors qu’ils se promenaient le long des canaux, Malik pointa du doigt une boutique de masques vénitiens excentriques.
– Regardez ça ! On dirait que même les masques sont en train de faire la fête ici.
Sophie s’approcha d’un masque orné de plumes et leva les yeux vers son père.
– Papa, est-ce que ça irait bien avec ton short hawaïen ?
Ilyan se joignit à la taquinerie.
– Oui, et avec ses sandales blanches, il serait la vedette du carnaval.
Malik fit semblant d’être offensé.
– Eh bien, si vous pensez que c’est une bonne idée, peut-être que je devrais aussi ajouter une danse funky pour compléter le look.
Grand-mère, en riant, conclut :
– Eh bien, c’est sûr que nous serions la famille la plus mémorable du carnaval.

Tout en continuant leur balade à travers les canaux et les ruelles, la famille Malik partagea des rires, des blagues et des moments précieux. Les souvenirs de leurs vacances à Venise resteraient gravés dans leur cœur, une aventure joyeuse et pleine d’amour.

 

Chapitre Spécial 2

Moussa et Fatma étaient assis dans leur salon, visiblement nerveux mais excités à l’idée de devenir parents pour la première fois. Leur ami Ilyan était assis sur le canapé, en train de pianoter sur son téléphone, tandis que Amina était debout à côté de la fenêtre, observant les passants.
Moussa se tourna vers Ilyan.
– Eh bien, tu sembles plongé dans ton téléphone. Tu es en train de chercher des astuces pour devenir le meilleur oncle du monde ?
Ilyan leva les yeux, souriant.
– Exactement, Moussa. Je me prépare à être le modèle d’oncle cool. Tu sais, celui qui fait des blagues à l’enfant dès le berceau.
Fatma rit doucement.
– Espérons juste que notre enfant hérite de ton humour et pas le sens du style vestimentaire d’Amina.
Amina se retourna, faignant l’indignation.
– Hé, je te rappelle que mes choix vestimentaires sont très distinctifs !
Moussa se leva et imita une démarche exagérée.
– Ah oui, comment pourrions-nous oublier la chemise hawaïenne fluorescente de l’été dernier ?
Tout le monde éclata de rire, y compris Amina, qui secoua la tête avec un sourire.
– Vous avez tous la mémoire sélective.
Pendant ce temps, Ilyan se tourna vers Fatma avec un air conspirateur.
– Fatma, j’ai entendu dire que la musique classique rendait les bébés plus intelligents. Peut-être que nous devrions commencer à jouer du Beethoven près de ton ventre dès maintenant.
Fatma éclata de rire.
– Ilyan, je ne suis pas sûre que notre bébé veuille devenir un prodige de la musique classique dès sa naissance.
Moussa ajouta avec un clin d’œil malicieux :
– Oui, et si le bébé préfère le hip-hop, je suppose que tu devras aussi apprendre à beatboxer, Ilyan.
Ilyan leva les mains en signe de reddition.
– D’accord, d’accord, pas de Beethoven ni de beatboxing. Je suppose que nous devrons juste compter sur nos talents innés pour être les meilleurs amis de bébé.
Tout le monde éclata de rire à nouveau, l’atmosphère légère et pleine de joie. Moussa et Fatma étaient rassurés de savoir qu’ils avaient des amis aussi drôles et attentionnés pour les accompagner dans cette nouvelle aventure de la parentalité.

 

Chapitre Spécial 3

Assis à une table dressée sur le sable doux, Ilyan et Amina étaient enveloppés par la douce brise de la mer. Le ciel était un mélange de teintes chaudes alors que le soleil se couchait lentement à l’horizon. Une lueur dorée se reflétait sur les vagues, créant un tableau magique pour leur dîner romantique.
Ilyan avait choisi un endroit parfait pour cette soirée spéciale. Les étoiles commençaient à scintiller au-dessus d’eux, ajoutant une touche de féerie à l’atmosphère. À la lueur d’une lanterne posée sur la table, Amina et Ilyan étaient plongés dans la lecture de la dernière partie d’un livre romantique qu’ils avaient entamé ensemble.

Amina tourna la page avec précaution, captivée par l’histoire.
– Écoute ça, Ilyan : « Sous le ciel enflammé, leurs regards se croisèrent, et dans ce moment suspendu, le monde entier sembla s’évanouir, laissant place à leur amour éternel. »
Ilyan posa sa main sur celle d’Amina et sourit doucement.
– Cela me rappelle un certain jour où je t’ai embrassé, ici à la plage, les vagues dansant à l’unisson avec nos cœurs.
Amina lui lança un regard complice.
– Ah oui, ce jour où Fatma nous a surpris, et où j’ai su que tu étais différent des autres.
Ils se sourirent, se perdant un instant dans leurs souvenirs partagés. La lueur dorée du coucher de soleil se reflétait dans leurs yeux alors qu’ils continuaient de lire le livre ensemble.
Ilyan prit la suite et lut à voix haute.
– « Ils s’embrassèrent sous le ciel embrasé, scellant leur amour avec la promesse de toujours rester côte à côte, peu importe les tempêtes de la vie. »
Leurs regards se croisèrent avec une émotion profonde. Ilyan referma le livre avec douceur et le posa sur la table. Il se leva, tendant la main à Amina. – Dans ce moment, sous le ciel enflammé, je veux renouveler cette promesse, Amina. De toujours être là pour toi, de te soutenir et de t’aimer, peu importe les tempêtes que la vie pourrait nous réserver.
Les yeux d’Amina s’emplirent de larmes de joie. Elle se leva et prit la main de Ilyan, le regardant avec amour.
– Et moi aussi, Papy. Je renouvelle cette promesse de t’aimer, de t’honorer et de partager chaque instant précieux avec toi.
Ils se rapprochèrent l’un de l’autre, les bras enlacés, regardant ensemble le coucher de soleil qui colorait le ciel en une palette de teintes chaudes et douces. Leurs cœurs battaient en harmonie avec le rythme de la mer, une preuve vivante de l’amour inébranlable qui les avait unis et les unirait pour toujours.

 

Chapitre Spécial 4

La petite brasserie du quartier était animée ce soir-là, remplie de conversations animées et de rires contagieux. Ilyan, Cherif, Libasse, Muhamed, Ramatoulaye et Aïcha s’étaient réunis pour une soirée de retrouvailles de leurs jours de lycée, plusieurs années après avoir quitté les bancs de l’école.

Cherif, toujours le blagueur du groupe, se leva soudainement et fit un geste dramatique.
– Eh bien, eh bien, regardez qui nous avons ici. Les survivants de la classe de terminale !
Des éclats de rire retentirent dans la salle, et Ilyan secoua la tête en souriant.
– Cherif, tu n’as vraiment pas changé du tout. Toujours le maître de cérémonie du divertissement.
Libasse, avec son habituel calme, ajouta d’un ton taquin :
– Oui, et toi, Ilyan, tu es toujours aussi prompt à te faire remarquer.
Tous éclatèrent de rire, car ils savaient que ces taquineries faisaient partie intégrante de leur amitié. Ils échangèrent des histoires sur les dernières années, se rappelant les moments hilarants et les difficultés qu’ils avaient partagés au lycée.
Muhamed, avec sa voix grave et son air sérieux, fit une pause dramatique.
– Eh bien, tout a changé sauf une chose : notre capacité à raconter des histoires incroyables pour impressionner les autres.
Ramatoulaye secoua la tête avec un sourire.
– Oui, Muhamed, mais maintenant nous sommes un peu plus expérimentés dans l’art du bluff.
Ils rirent tous, se rappelant les exagérations excentriques qu’ils avaient utilisées pour tenter d’impressionner les autres à l’époque.
Aïcha, toujours pétillante et pleine d’énergie, leva son verre.
– À notre jeunesse, à nos souvenirs et à notre amitié indestructible.
Tous levèrent leur verre en un toast chaleureux. Les rires et les sourires enveloppaient la table alors qu’ils partageaient des anecdotes et se taquinaient les uns les autres comme s’ils n’avaient jamais été séparés.

Au fur et à mesure que la soirée avançait, les discussions devinrent plus profondes et empreintes d’émotion. Ils évoquèrent les moments difficiles qu’ils avaient traversés individuellement et se soutinrent les uns les autres avec sincérité et affection.
La soirée se termina avec des câlins et des promesses de se revoir bientôt. Alors qu’ils se séparaient, leurs cœurs étaient remplis de gratitude pour cette amitié qui avait survécu au temps et avait évolué avec eux. Les retrouvailles avaient été à la fois drôles et émouvantes, une véritable célébration de l’amitié qui les avait liés depuis leurs jours de lycée.

 

Chapitre Spécial 5

Le soleil se couchait lentement, teintant le ciel de nuances chaudes et dorées. Junior et son père se tenaient côte à côte sur une colline surplombant la ville où Junior avait grandi. Les souvenirs semblaient flotter dans l’air, et le doux parfum des champs rappelait les jours d’enfance.
– Ça te rappelle des souvenirs, hein ?, dit le père, le regard perdu dans l’horizon lointain.
Junior hocha la tête, un sourire mélancolique se dessinant sur ses lèvres.
– Oui, papa. C’est difficile de croire à quel point le temps a passé depuis que je courais dans ces champs avec mes amis, en riant à gorge déployée.
Son père acquiesça, semblant perdu dans ses propres pensées.
– Ces souvenirs sont comme des trésors, Junior. Ils forgent une partie de qui nous sommes, tout en nous rappelant le chemin que nous avons parcouru.
Junior soupira doucement, ses yeux fixés sur les lumières qui s’allumaient dans la ville.
– Tu te souviens, papa, de cette vieille fontaine où nous allions pêcher des pièces de monnaie ? Tu m’as appris que chaque pièce jetée dans l’eau symbolisait un vœu.
Le père esquissa un sourire.
– Oh oui, je m’en souviens bien. Et je me rappelle aussi que tu voulais un vélo tout neuf à l’époque. Alors, tu as jeté beaucoup de pièces dans cette fontaine.
Junior rit, se remémorant ce désir intense d’avoir ce vélo.
– Eh bien, tu sais, papa, je me rends compte que ces vœux étaient beaucoup plus que des souhaits pour des choses matérielles. Ils symbolisaient mes rêves et aspirations, tout ce que je voulais accomplir.
Son père posa une main affectueuse sur son épaule.
– C’est vrai, Junior. Ces vœux étaient le reflet de tes espoirs et de ta détermination. Et regarde où tu es maintenant, avec un avenir plein de promesses.
Le vent doux agita légèrement leurs cheveux, créant une sensation de communion avec la nature et les souvenirs. Junior tourna le regard vers son père.
– Mais parfois, papa, je me demande si c’était la bonne décision de quitter Amina et cette ville.
Son père leva les yeux vers les étoiles qui commençaient à scintiller dans le ciel.
– Chaque décision que nous prenons dans la vie vient avec des choix et des conséquences. Il est normal de se poser des questions et de ressentir de la nostalgie, mais il est important de se rappeler pourquoi tu as fait ce choix.
Junior soupira, son regard cherchant les étoiles comme s’il cherchait des réponses.
– Mais cela ne signifie pas que c’est facile.
Son père posa une main sur sa joue, le regard empreint de compréhension.
– Je comprends, Junior. La vie est faite de défis et d’ajustements. Mais n’oublie jamais que le passé fait partie de qui tu es, mais ce sont tes choix présents qui façonnent ton avenir.
Ils restèrent silencieux un moment, laissant les mots et la sagesse imprégner l’air autour d’eux. Dans ce moment de connexion profonde, père et fils se soutenaient mutuellement à travers les incertitudes de la vie.

 

Chapitre Spécial 6

Chérif avait minutieusement planifié chaque détail de la soirée. Les lumières tamisées et les bougies disposées en cercle autour d’un tapis au milieu de leur salon créaient une atmosphère romantique et chaleureuse. Laïcha était en train de feuilleter un livre sur le canapé, ignorant complètement les préparatifs en cours.

Chérif, le cœur battant, entra dans la pièce avec un sourire nerveux.
– Euh, Laïcha, est-ce que tu pourrais venir ici un instant ? J’ai besoin de ton aide pour quelque chose.
Laïcha leva les yeux de son livre, curieuse, et posa le livre sur le côté avant de se lever.
– Qu’est-ce qui se passe, Chérif ?
Chérif l’entraîna doucement vers le tapis au centre de la pièce, le sourire s’élargissant sur son visage.
– Eh bien, je me suis dit que nous pourrions faire un petit jeu.
Laïcha haussa un sourcil, intriguée.
– Un jeu ? Quel genre de jeu ?
Chérif s’agenouilla devant elle, sortant de sa poche une boîte délicate.
– C’est un jeu spécial. J’ai caché un trésor quelque part, et je veux que tu le trouves.
Laïcha regarda la boîte avec étonnement, puis sourit.
– D’accord, mais quel est ce trésor ?
Chérif ouvrit la boîte pour révéler une bague scintillante.
– Le trésor, c’est toi, Laïcha. Et le jeu, c’est celui de la vie que nous voulons construire ensemble.
Les yeux de Laïcha s’emplirent de larmes de joie alors qu’elle réalisait ce qui se passait. Chérif prit sa main et dit d’une voix douce :
– Laïcha, depuis le moment où nous étions ensembles, tu as toujours été ma complice, ma meilleure amie et mon amour. Je ne peux pas imaginer ma vie sans toi. Alors, Laïcha, veux-tu m’épouser ?
Les larmes glissèrent doucement sur les joues de Laïcha alors qu’elle souriait et hochait la tête avec émotion.
– Oui, Chérif, oui !
Tout à coup, une sonnerie éclata dans la pièce. Chérif et Laïcha se regardèrent, confus. Laïcha se précipita vers le canapé et fouilla dans le coussin où le son provenait. Elle en sortit un téléphone, son visage rouge de gêne.
Chérif éclata de rire.
– Je suppose que notre moment romantique a été interrompu par un téléphone oublié.
Laïcha rit aussi, secouant la tête.
– C’est comme ça que nous sommes, n’est-ce pas ? Toujours avec des surprises inattendues.
Chérif se releva et passa doucement la bague à l’annulaire de Laïcha.
– C’est ça, Laïcha. Notre vie sera remplie d’aventures et de moments spéciaux, qu’ils soient émouvants ou drôles.
Ils s’étreignirent tendrement, l’amour et la complicité dans leurs regards. Ce moment d’émotion et de légèreté était le reflet parfait de leur relation unique et précieuse.

 

Chapitre Spécial 7

Le sable chaud chatouillait leurs pieds tandis qu’Ilyan et Amina se tenaient main dans la main sur une plage ensoleillée. L’océan bleu s’étendait à l’infini devant eux, créant un décor spectaculaire pour leur mariage intime. Fatma et Moussa, avec des sourires chaleureux, se tenaient à leurs côtés en tant que témoins, prêts à partager ce moment spécial avec eux.

Les amis et la famille d’Ilyan et d’Amina étaient assis sur des chaises blanches disposées en demi-cercle sur le sable, chacun d’eux portant un sourire d’anticipation. Chérif, Libasse, Muhamed, Ramatoulaye, et Aïcha étaient présents, ajoutant leur soutien et leur énergie à la scène.

Le moment tant attendu arriva. La musique douce commença à jouer alors qu’Amina, vêtue d’une robe de mariée fluide, fit son entrée, accompagnée de son père. Ilyan regarda sa bien-aimée, les yeux brillants d’émotion, ébloui par sa beauté rayonnante. Leurs amis et leur famille observaient avec des sourires émus.
Le cœur battant, Ilyan prit la main d’Amina alors qu’elle se tenait devant lui. Leurs regards se croisèrent, et ils savaient que ce moment marquait le début d’un chapitre nouveau et excitant de leur voyage ensemble.
Le célébrant prononça des paroles d’amour et de complicité, évoquant les moments précieux qu’Ilyan et Amina avaient partagés et les aventures qui les attendaient. Les vœux qu’ils s’étaient écrits se révélèrent être à la fois émouvants et drôles, suscitant des sourires et des rires parmi les invités.

Lorsque le moment vint pour les alliances, Fatma et Moussa, avec un sentiment de joie, remirent les anneaux à Ilyan et Amina. Les deux fiancés se regardèrent en souriant, échangeant les anneaux qui symbolisaient leur engagement.
À mesure que la cérémonie touchait à sa fin, le célébrant annonça :
– Je vous présente maintenant le couple marié, Ilyan et Amina !
Les applaudissements et les cris d’enthousiasme retentirent dans l’air, tandis qu’Ilyan et Amina échangèrent un baiser tendre.

La soirée se poursuivit avec une fête animée sur la plage. Les amis et la famille dansèrent, rirent et partagèrent des moments inoubliables. Les toasts furent à la fois touchants et drôles, et Ilyan et Amina se laissèrent emporter par la chaleur de l’amour et de l’amitié qui les entouraient.

Cette journée, mélange parfait d’émotion et d’humour, marquait le début de leur vie ensemble, et tous savaient que les aventures à venir seraient remplies de rires, de joie et d’amour.